Ghardaïa en Algérie: un mal-être régional derrière les violences
Ecoles et magasins fermés, stigmates d’une guérilla urbaine, notamment dans les quartiers arabes de Ghardaïa, et chaque camp retranché dans sa zone par crainte de représailles adverses, comme le décrit El Watan…
Après les violences, qui ont fait deux morts et des centaines de blessés, la situation sécuritaire reste des plus fragiles dans cette vallée qui connaît des troubles récurrents entre les deux communautés depuis 2008. Et qui, pour ceux de la mi-janvier, ont été attisés par des rumeurs et des appels haineux diffusés via les réseaux sociaux, comme l’a affirmé l'agence algérienne APS.
En mai 2013, les hostilités avaient été déclenchées par un différend autour d'un cimetière mozabite que les Chaâmbis voulaient «accaparer par le biais de documents fonciers falsifiés», selon une source mozabite. Cette fois, un incident mineur, sur fond d’échéance électorale, aurait servi d’étincelle.
Début 2014, le Premier ministre Abdelmalek Sellal a reçu à Alger des représentants des deux communautés. Résultat : des décisions ont été prises pour permettre un retour à la normale à Ghardaïa, avec notamment la création au niveau des communes touchées d'un conseil de sages, un «espace d'arbitrage et de conciliation».
Mais ce qui a surtout fait taire la violence, c’est un déploiement massif de policiers et de gendarmes (3000) à Ghardaïa et dans la vallée de M’zab, ces derniers contrôlant toute la ville quadrillée en «lignes de «séparation» entre les secteurs hostiles», précise El Watan.
Si la plupart des habitants se demandent encore ce qui a mis le feu aux poudres, la sociologue Fatma Oussedik, interviewée par El Watan, a une idée sur la question.
Mme Oussedik avance qu’en définissant ces heurts comme des heurts communautaires, ils finissent par le devenir. Et au-delà, elle dénonce des manipulations, une stigmatisation des Mozabites du M’zab (comme peuvent l’être les Kabyles ou les touaregs), des forces de l’ordre partisanes (d’aucuns accusent la police locale de servir les intérêts arabes) et «la faiblesse de l’Etat» qui montre «la difficulté des institutions nationales à se présenter comme l’incarnation d’un bien collectif, au-dessus des parties en présence».
Mais dans les faits, force est de constater que les deux communautés s’accrochent tant sur la pratique de la religion que sur la langue (berbère ou arabe). Le tout sur fonds de chômage galopant (en dépit des immenses richesses énergétiques du sous-sol), de problème de logement, de trafic de drogue et la menace de militants islamistes dans une région délaissée par le pouvoir central.
Si aujourd’hui, le calme est revenu à Ghardaïa, ce n’est pas le cas à Berriane, où des échauffourées ont eu lieu durant le week-end du 25 janvier, comme le raconte L’Expression. Et il ne faut négliger aucun dérapage qui remettrait le feu aux poudres.
Dans une volonté d’apaiser les esprits, des pacifistes se sont rassemblés en silence le 26 janvier Place du 1er mai à Ghardaïa en brandissant des pancartes, selon la presse algérienne, avec des slogans prônant l’union nationale : «Je suis Mozabite, je suis Chaâmbi, je suis Algérien». Une action forte lancée via Facebook par des citoyens algériens inquiets, «fatigués de la partition de l’Algérie».
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