La reconstruction en Côte d'Ivoire
Quatre mois de crise meurtrière et deux semaines de guerre qui s’achèvent le 11 avril 2011 par l’arrestation de Laurent Gbagbo – déféré depuis au TPI de la Haye –, ont laissé, en plus de 3.000 morts, une lourde empreinte dans l’économie ivoirienne alors que l’unité du pays se fait lentement.
Débuts de la reconstruction et de la réconciliation
AFP, le 11 avril 2012
Rebond de l’économie
Plus de 400 PME ont fait faillite et 1,52 milliards d’euros ont été perdus durant le conflit intérieur, selon le président du patronat ivoirien. Après la chute économique enregistrée à l'époque, la croissance en 2012 doit atteindre 8,5%. Ubifrance annonce une hausse des importations de 30 à 40% par rapport à 2010. La production et l'exportation du cacao – avec 40% du marché mondial la Côte d’Ivoire est le premier producteur au monde de ces fèves – ont repris.
Pour croire en un avenir prometteur, le pays attend l’effacement, en juin 2012, d’une partie de la dette de 14 milliards de dollars contractée auprès du FMI et de la Banque mondiale.
L’appel de Paris de Ouattara
Reçu à Paris en janvier 2012 par les autorités françaises, le président ivoirien Alassane Ouattara a lancé un appel aux entreprise hexagonales. Il souhaite qu'elles s’associent à « la renaissance ivoirienne ». François Fillon a assuré du «plein appui de la France face aux nombreux défis qu'Abidjan doit encore relever». Paris a également annoncé un resserrement de la présence de l’armée française qui se limitera à la formation des forces de sécurité ivoiriennes avec 250 à 300 hommes.
Aujourd'hui, les hommes d’affaires remplissent les hôtels d'Abidjan et les chantiers fleurissent dans la capitale ivoirienne. Les entreprises déjà là, Bouygues, Bolloré et Total se remettent aux affaires – des droits de prospection ont été accordés à la société pétrolière. Cependant, les industriels ne reviendront en nombre sur le sol de la première puissance économique de l'Afrique de l'Ouest que lorsque les problèmes de sécurité seront résolus. Des milliers de jeunes « volontaires » toujours armés, ayant combattu pour Alassane Ouattara, sont sans encadrement dans la nature.
Réconcilier le nord et le sud
Pour l’heure, la réconciliation en est à ses prémices. «Il est nécessaire d'instaurer un dialogue politique concret pour éviter un sentiment d’exclusion», indique Rinaldo Depagne, expert à International Crisis Group. Pour ce dernier, même si la presse « bleue » favorable à Ouattara est libre, il existe de nombreux obstacles à la réconciliation.
La Commission de réconciliation à pied d'oeuvre
Tous les yeux sont fixés sur cette Commission mise en place par Ouattara en septembre 2011 pour faire avancer le dialogue et atténuer les blessures. Ses travaux commenceront en mai par des consultations nationales où 40.0000 personnes doivent être consultées par oral ou par écrit. En août, une phase d’enquête permettra aux victimes de déposer plainte.
La Commission de réconciliation a été conçue comme un forum où chacun peut venir expliquer ce qu'il a vu, subi ou infligé. La finalité est une demande de pardon. Sera-ce suffisant pour resouder la population ?
Dans le même temps, Allassane Ouattara, qui estime que la Constitution doit mieux garantir les droits de la cinquantaine d’ethnies du pays, veut s’attaquer au problème du « foncier rural ». Il doit effectuer fin avril, une première tournée dans l’Ouest du pays. Selon le président, la sécurité a été rétablie le long de la frontière avec le Libéria, d’où des mercenaires étaient venus combattre aux côtés de Laurent Gbagbo.
Des mesures, qualifiées d’équitables, ont été prises par le gouvernement dans l’armée, où dans la hiérarchie militaire, les nominations étant partagées entre le FN (ancienne rébellion nordiste) et les anciennes forces régulières.
Les séquelles de la guerre civile
Ces efforts seront-ils consentis dans tous les secteurs ? La composition du conseil d’administration du Conseil du café et cacao, une structure récemment créée pour gérer la production de ces deux denrées laisse circonspect. Selon Leslie Varenne, journaliste à Capital, tous les administrateurs appartiennent au clan Ouattara ou à celui de Guillaume Soro (l'ex Premier ministre).
Le sort de ce dernier était devenu un souci pour le nouveau pouvoir. Principal seigneur de guerre des troupes nordistes, fin politique, Soro a conservé la haute main sur les commandants militaires qui sont le soutien d’Alassane Ouattara. Après que des ONG ont affirmé que les deux camps (les hommes de Gbagbo et ceux de Ouattara) ont commis des violations des conventions internationales sur la guerre, la position de Soro s'est fragilisée. Paris et Washington souhaitaient qu’il quitte ses fonctions.
Il a finalement démissionné le 8 mars avant d'être élu président de l'Assemblée nationale. L'homme qui lui a succédé à la tête du gouvernement, Jeannot Ahoussou-Kouadio, proche du PPCI, le parti de feu Félix Houphouët-Boigny a une réputation d'intégrité. Sa feuille de route est la reprise du dialogue politique.
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