Djibouti, une position stratégique
Une «rente stratégique»
Ancienne colonie française, devenue indépendante en 1977, Djibouti occupe une position éminemment stratégique. Voisin d’Etats fragiles ou en guerre comme la Somalie et le Yémen, le pays est situé le long d’une route maritime qui passe par le canal de Suez, la mer Rouge et l’océan Indien. Une route maritime très fréquenté : 20.000 navires transitent chaque année au large de ses côtes.
Cette situation permet à Djibouti d’être «un point d’appui idéal dans la lutte contre la piraterie et le terrorisme». Ce qu’ont bien compris les Occidentaux qui y ont installé des équipements militaires. Conséquence : «la rente stratégique (aérienne et portuaire) est la seule ressource» de l’Etat djiboutien, explique dans Le Monde Diplomatique le journaliste Philippe Leymarie, bon connaisseur de la région. Une rente qui rapporte 100 millions d’euros par an.
Des milliers de militaires étrangers
Héritage colonial, l’implantation française est traditionnelle. Malgré un allègement de son dispositif militaire, Paris garde 2100 hommes sur place, son plus important contingent en Afrique. Un nouvel accord de défense a été signé en décembre 2011 entre les deux parties.
Le président djiboutien s'explique sur le nouvel accord de défense avec la France
France 24, 26-12-2011
D’autres pays occidentaux se sont installés à Djibouti.
Les Etats-Unis y gèrent ainsi depuis 2002 une base qui compte aujourd’hui 2000 hommes. La CIA l’utiliserait pour lancer des drones contre des responsables d’al-Qaïda dans la région, notamment en Somalie. Quant au Japon, il a ouvert dans le petit Etat (23.200 km²) sa première base à l’étranger depuis 1945. Précision : alors que les neuf dixièmes des exportations japonaises passent au large, plusieurs navires nippons ont subi des attaques de pirates.
Apparemment, la position stratégique de Djibouti n’intéresse pas que les pays occidentaux. Le commandant de la marine iranienne y a ainsi été aperçu il y a 18 mois…
«Répression tous azimuts»
Djibouti est gouverné depuis 1999 par le président Ismaïl Omar Guelleh, réélu en avril 2011 avec plus de 80 % des voix. Il avait fait modifier la Constitution pour pouvoir se représenter une troisième fois. Mais il a assuré qu’au bout de son mandat en 2016, il quitterait le pouvoir. «Ce dernier mandat, je ne le voulais pas. C’est un mandat forcé, le peuple ayant estimé que la relève n’était pas prête», a-t-il expliqué.
Le «Printemps arabe» a réveillé l’opposition. En février 2011, plusieurs milliers de personnes ont manifesté pendant plusieurs jours dans la ville de Djibouti pour exiger le départ d’Ismaïl Omar Guelleh. Au cours de heurts avec les forces de l’ordre, un policier et un manifestant ont été tués, selon un bilan officiel (6). Dans le même temps, trois des principaux dirigeants de l’opposition ont été arrêtés.
En novembre, la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) a dénoncé la «répression tous azimuts» et la présence de détenus politiques, «souvent torturés», dans les prisons du pays, notamment «depuis les grandes manifestations de février 2011». «Il n’y a pas de prisonniers politiques à Djibouti, ou alors tous les voyous condamnés à Londres après les émeutes [de 2011, NDLR] étaient eux aussi des politiques !», rétorque le président.
Depuis plusieurs années, ce dernier est mis en cause par plusieurs témoignages dans la mort du magistrat français Bernard Borrel. Lequel aurait été chargé «de constituer un dossier sur l’ensemble des trafics auxquels Imaïl Omar Guelleh était mêlé». L’affaire, particulièrement complexe, a empoisonné pendant des années les relations de son pays avec la France.
210.000 personnes menacées par la sécheresse
Au niveau régional, un conflit oppose Djibouti à l’Erythrée à propos d’un tracé de frontière. Des affrontements armés ont eu lieu en 2008 avant que les deux parties ne signent un accord pour faire examiner la question par des experts internationaux, grâce à une médiation du Qatar.
Au-delà de ses problèmes politiques, le pays traverse sa plus grande sécheresse depuis près de 50 ans, phénomène qui touche toute la Corne de l’Afrique. A Djibouti, 210 000 personnes (sur une population de 800.000) ont besoin d’aide, selon l’UNICEF. En 2011, la saison des pluies, qui dure de juillet à septembre, n'a pas suffi à régénérer les points d'eau et les pâturages.
Facteur aggravant : l’afflux de réfugiés éthiopiens, somaliens et yéménites. Chaque mois, 500 personnes supplémentaires arrivent dans le pays, selon le HCR.
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