"L'extrême pauvreté s'intensifie en Afrique subsaharienne", affirme Oxfam dans son dernier rapport
Régulièrement, l'ONG Oxfam publie des rapports mettant en lumière l'ampleur des inégalités sur la planète. En 2018, 26 milliardaires ont entre leurs mains autant d'argent que la moitié la plus pauvre de l'humanité, affime l'organisation. A propos de l'Afrique, Oxfam écrit que "le taux de réduction de la pauvreté a été divisé par deux depuis 2013".
Dans son rapport, Oxfam insiste sur les inégalités à l'échelle planétaire. Celles-ci se traduisent dans les chiffres. La richesse des milliardaires dans le monde a augmenté de 900 milliards en 2018, soit au rythme de 2,5 milliards par jour, alors que celle de la moitié la plus pauvre de la population de la planète a chuté de 11%, explique l'ONG.
En Afrique, le recul de la pauvreté a été un des grands objectifs des organisations internationales. "Le recul conséquent du nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté (soit avec 1,90 dollar par personne et par jour, selon la Banque mondiale) constitue l’une des plus grandes avancées de ces dernières décennies", se félicite Oxfam qui tempère cet enthousiasme en notant que "de nouvelles données de la Banque mondiale montrent que le taux de réduction de la pauvreté a été divisé par deux depuis 2013. L’extrême pauvreté s’intensifie en Afrique subsaharienne".
Dans son rapport, Oxfam insiste sur l'importance de la fiscalité pour corriger les inégalités. "Les fortunes des super-riches atteignent des niveaux record. En taxant plus équitablement les richesses, il serait possible de collecter suffisamment de recettes pour s’assurer que chaque enfant est scolarisé et que personne ne tombe dans la pauvreté à cause de frais médicaux trop coûteux", affirme Oxfam.
Au Kenya, un garçon d’une famille riche a une chance sur trois de poursuivre ses études au-delà du cycle secondaire, contre une chance sur 250 pour une fille issue d’une famille pauvre
Oxfam
"Rien qu’en Afrique, jusqu’à 30% de la fortune privée peut être détenue à l’étranger, privant les Etats africains de 15 milliards de dollars de recettes fiscales", estime Oxfam pour qui "avec l’aide de véritables armées de conseillers et conseillères en fiscalité, les multinationales exploitent les moindres failles des codes fiscaux pour transférer les bénéfices vers des paradis fiscaux et échapper à l’impôt, engendrant un manque à gagner estimé à 100 milliards de dollars pour les pays en développement."
Oxfam multiplie les exemples d'inégalités
"En moyenne au Kenya, un enfant issu d’une famille riche fréquentera deux fois plus longtemps les bancs de l’école, qu’un enfant issu d’une famille pauvre", précise Oxfam dans son rapport. Pour lutter contre ces inégalités, Oxfam met en avant l'importance des services publics et note que "longtemps, des institutions comme la Banque mondiale ont considéré que les services publics devaient être rationnés et réduits à leur minimum et que le secteur privé était souvent un meilleur prestataire. L’argument avancé était que les personnes devaient payer pour leurs écoles et leurs hôpitaux, que les mécanismes du marché devaient organiser les services et que la protection sociale devait être très restreinte et cibler uniquement les personnes les plus pauvres. Bien que le discours, les programmes et les conseils aient évolué, y compris et de manière notable de la part du FMI, le changement se révèle plus lent dans la pratique."
De l'importance de la fiscalité
Cette question des services publics a des conséquences directes. "Chaque année, de nombreuses personnes meurent ou souffrent inutilement parce qu’elles ne peuvent pas se payer de soins de santé, et 100 millions de personnes sont plongées dans l’extrême pauvreté à cause des frais de santé. Dans des pays comme le Kenya, la République démocratique du Congo (RDC) et l’Inde, il arrive que des personnes pauvres soient maintenues prisonnières dans les hôpitaux, parfois même enchaînées, jusqu’à ce qu’elles puissent payer. Selon une étude menée en RDC, sur une période de six semaines en 2016, 54% des femmes qui avaient accouché ont été retenues, car elles ne pouvaient pas payer les frais."
Sur la question des services publics (éducation, santé notamment), Oxfam critique l'attitude de certaines grandes organisations internationales comme la Banque mondiale pour leur défense de choix comme les PPP (partenariats public-privé) pour assurer ces services.
Plus politique, Oxfam met en avant l'importance de la fiscalité pour lutter contre les inégalités. "Si l’on ne s’attaque pas au problème de la sous-imposition des personnes qui ont le plus les moyens de payer, la crise des inégalités échappera à tout contrôle et nous serons incapables de vaincre la pauvreté", affirme l'ONG.
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