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La fonte de la calotte glaciaire du Groenland serait une menace pour le Sahel

La fonte des glaces du Groenland contribue de plus en plus à la hausse du niveau des mers. Dans un scénario, inspiré d’événements qui se sont déjà produits et imaginé par des chercheurs français, le Sahel pourrait pâtir de ce phénomène. Comment? En s’asséchant davantage que prévu par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution climatique (GIEC).
Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 2 min
Troupeau de zébus dans la région de Ferlo, dans le Sahel (Sénégal) (SPANI Arnaud/ Hemis)

L’assèchement du Sahel, lié au réchauffement climatique du fait de la baisse des précipitations, pourrait être aggravé par la fonte de la calotte glaciaire du Groenland. C'est la conclusion d'une récente étude menée en France, au Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE).

Iceberg en mer près d'Angmassalik, côte est du Groenland (24/04/17) (PHILIPPE ROY / Aurimages)

Pas nouveau
L'hypothèse de départ des scientifiques repose sur des phénomènes, connus sous le nom «d’épisodes ou évènements d'Heinrich», qui ont été déjà observés lors du dernier âge glaciaire.

A l'époque, «la calotte Laurentide, en Amérique du Nord, s’est disloquée et le processus a libéré beaucoup d’eau douce. Cette libération et la diminution naturelle du Gulf Stream a conduit au refroidissement de l’Europe et a influencé la mousson africaine», explique Dimitri Defrance, l'un des coauteurs de l'étude. Les sédiments observés dans le fleuve Sénégal (fleuve d'Afrique de l'Ouest qui arrose notamment le pays dont il porte le nom) en donnent la preuve.

Des milliers d'années plus tard, les chercheurs de l’IRD ont réussi à modéliser le phénomène. Ainsi, décrit Dimitri Defrance, «quand la glace fond dans le Groenland (l’une des deux principales calottes glaciaires qui comptent pour près de 75% des réserves mondiales d’eau douce), de l’eau douce est produite et elle se déverse dans l’Atlantique Nord. Cet afflux d’eau va ralentir le Gulf Stream qui apporte dans cet océan de l’eau chaude en provenance des Caraïbes (golfe du Mexique). Le courant ne peut plus alors faire son office, à savoir réchauffer l’Atlantique Nord». Par conséquent, l'excès de chaleur se retrouve dans l’hémisphère Sud, notamment dans le golfe de Guinée, au lieu de se diriger vers l’hémisphère Nord.

«Cette mauvaise redistribution de la chaleur par le Gulf Stream va provoquer le refroidissement de l’hémisphère Nord, ressenti jusqu’au Sahara, poursuit le chercheur français. Et un Sahara froid rime avec hausse de la pression atmosphérique et un golfe de Guinée chaud, avec une baisse de la pression. Résultat: une intensification des vents du Nord vers le Sud va empêcher la Mousson de remonter plus au Nord. Le Sahel sera alors privé de pluies.» 


Le marché couvert de Dori, au Burkina Faso (Sahel)  (PHILIPPE ROY / Aurimages)

Tangible
La démonstration des chercheurs français vise à sonner davantage l'alarme sur une zone, le Sahel, qui souffre déjà des effets du réchauffement climatique. Si leurs assertions étaient confirmées, elles rendraient les populations de cette région encore plus vulnérables. 

«Nous nous sommes mis dans le scénario le plus pessimiste du GIEC, précise Dimitri Defrance, à savoir celui qui provoque la plus forte augmentation de chaleur, soit + 4 degrés au niveau mondial d'ici 2100. Sauf que dans le scénario du GIEC, l’effet de l’apport d’eau douce lié à la fonte des calottes est sous-estimé. Les prévisions du GIEC s’appuient surtout sur la dilatation thermique des océans et la fonte des glaciers tempérés (Himalaya, Alpes etc…). C'est la raison pour laquelle nous avons imaginé des scénarios extrêmes, mais plausibles, liés à la fonte des calottes.»

Des phénomènes plausibles car ils commencent à se dessiner. «Selon une récente étude, note Dimitri Defrance, le Groenland contribue à hauteur de 25% à l’augmentation du niveau marin depuis 2010. En d’autres termes, la fonte des glaciers prend de plus en plus d’ampleur dans la montée du niveau marin». Et le Sahel semble être, quelles que soient les prévisions, une région sur laquelle pèse désormais une épée de Damoclès climatique. 
 

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