Deux candidates africaines en lice pour prendre la direction de l'Organisation mondiale du commerce
L’OMC cherche un nouveau directeur général pour remplacer le Brésilien Roberto Azevêdo qui a annoncé sa démission. Parmi les candidatures africaines, deux femmes tiennent la corde, l’ex-ministre kényane du Commerce Amina Mohamed et l’ancienne ministre des Finances du Nigeria Ngozi Okonjo-Iweala.
L'heure des Africains est-elle venue à l’OMC ? Pour succéder au Brésilien Roberto Azevêdo, fin août 2020, de nombreuses personnalités africaines ont manifesté leur intérêt. Notamment l'ambassadeur du Bénin à l'OMC Eloi Laourou, l'Egyptien Abderl Hamid Mamdouh ou encore le Nigérian Yonov Frederick Agah, directeur général adjoint de l'organisation depuis 2013. Mais la surprise pourrait venir de deux femmes : Amina Mohamed, ex-ministre kényane du Commerce puis des Affaires étrangères, et Ngozi Okonjo-Iweala, ex-ministre des Finances du Nigeria, présentée aujourd’hui comme la favorite africaine. Selon la presse nigériane, le président Buhari aurait retiré son soutien à Yonov Frederick Agah pourtant bien placé, afin de l'accorder à Ngozi Okonjo-Iweala.
Une candidate nigériane pour l'Afrique ?
Connue pour ses combats dans la lutte contre la corruption et pour réduire la dette publique en tant que ministre des Finances du Nigeria au début des années 2000, Mme Ngozi Okonjo-Iweala a également été directrice générale de la Banque mondiale.
Elle fait partie des rares femmes à avoir exercé d’importantes responsabilités politiques dans le pays le plus peuplé d’Afrique, première économie du continent. Cette Igbo (de religion chrétienne) libérale est perçue dans les milieux populaires de son pays "comme une technocrate au service du capitalisme financier et de la Banque mondiale, une institution particulièrement détestée au Nigeria, depuis les programmes d’ajustements structurels qui accompagnèrent la récession des années 1980 et la mise à pied de dizaines de milliers de fonctionnaires", affirmait dans Jeune Afrique le spécialiste du Nigeria et chercheur à l'Institut de recherche pour le développement (IRD), Marc-Antoine Pérouse de Montclos.
Ngozi Okonjo-Iweala a également servi de caution internationale à l’un des gouvernements les plus corrompus du Nigeria, celui du président Goodluck Jonathan (2010-2015). Dans l’administration, elle a certes essayé de créer un compte unique pour mieux identifier le circuit des dépenses du gouvernement et réduire les possibilités de prévarication. Mais c’est le président Muhammadu Buhari qui a mis en œuvre ce dispositif après son élection en 2015.
Femme d'influence depuis plusieurs années, elle siège au sein de plusieurs conseils d'administration influents et préside notamment celui du GAVI, organisation internationale de la Fondation Bill et Melinda Gates pour favoriser l'accès à la vaccination en Afrique. En juillet 2018, elle est également devenue la première personnalité africaine membre du conseil d'administration de Twitter.
L'autre atout africain : la Kényane Amina Mohamed
L’autre candidature sur laquelle l'Afrique peut s'appuyer, c’est celle de la Kényane Amina Mohamed. Née en octobre 1961, elle a été nommée directrice exécutive adjointe du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) en 2011. Amina Mohamed a eu une longue carrière de diplomate avant de devenir ministre des Affaires étrangères de son pays, de mai 2013 à février 2018.
Il est important d’être inclusif et de montrer que les membres savent que chaque partie du globe peut apporter une contribution positive au fonctionnement de l’OMC
Amina Mohamed, candidate Kényane à la direction de l'OMCà la Tribune Afrique
Ce n'est pas la première fois que le Kenya soutient Amina Mohamed pour le poste à l'OMC. Elle faisait déjà partie des candidats qui ont perdu contre le Brésilien Azevêdo en 2013. En 2017, l'administration Kenyatta l'a également proposée à la présidence de l'Union africaine pour remplacer la Sud-Africaine Nkosazana Dlamini Zuma. Elle a perdu contre Moussa Faki Mahamat du Tchad.
En campagne depuis plusieurs semaines, elle a affirmé dans le Financial Times : "Nous avons besoin de quelqu’un ayant la bonne expérience, quelqu’un qui est attaché au système multilatéral… mais qui a également la stature politique pour être un facilitateur efficace et un constructeur de consensus", a indiqué Amina Mohamed. "S’il se trouve que cette personne est africaine ou que c’est une femme, je pense que ce sera tellement mieux".
L'OMC à la croisée des chemins
Amina Mohamed possède déjà une vaste expérience de l'OMC. Elle a été la première femme à présider les trois organes les plus importants de l'organisation, une expérience qui pourrait lui donner un avantage sur les autres candidats.
L'OMC se trouve actuellement dans la tourmente, le président américain Donald Trump bloquant la nomination des juges, alors qu'il est en pleine guerre commerciale avec la Chine. La position des Etats-Unis sur l'OMC, couplée à la pandémie, a paralysé l'organisation, alors que les pressions protectionnistes se répandaient.
Mais les doutes sur la mondialisation (suscités par la pandémie) compliquent le choix du successeur d'Azevêdo. La négociation mondiale se révèle particulièrement difficile.
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