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La 193 Gallery expose à Paris la photographe kényane Thandiwe Muriu

Article rédigé par Laurent Filippi
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 1min

Après l’avoir présentée lors de l’exposition "Colors of Africa", la 193 Gallery offre à Thandiwe Muriu sa première exposition personnelle en France.

Thandiwe Muriu, jeune photographe kényane de 31 ans, a réussi avec ses clichés colorés, psychédéliques et résolument joyeux à imposer un regard nouveau sur la femme noire d’aujourd’hui. Et aussi à s’imposer dans un métier dominé par les hommes. Malgré la pandémie de coronavirus, elle a rencontré en 2020 un succès international. La 193 Gallery, qui la représente en France, lui consacre jusqu’au 31 juillet un "solo show" dans son nouvel espace.

Passionnée par la mode et la photographie, la Kényane Thandiwe Muriu réalise des portraits dès l’âge de 14 ans. "Je ne savais pas vraiment dessiner ou peindre, mais dès ma première interaction avec l’appareil photo, j’ai su qu’il y avait une connexion entre moi et la photographie", déclare-t-elle au journal "Le Monde". Très vite remarquée sur les réseaux sociaux, elle réalise ses premiers shootings professionnels à 17 ans, et à 23 ans signe un contrat pour une campagne internationale dans la mode. Formée auprès de photographes comme Emmanuel Jambo, Osborne Macharia et Mutua Matheka, elle décide de franchir le pas en 2015 et s’affirme définitivement en tant qu’artiste. Sa série intitulée "Camo" est une étape décisive dans sa carrière. En 2020, elle obtient le People Choice Award de la Photographe émergente de l’année à PhotoLondon. A 31 ans, Thandiwe Muriu est aujourd’hui l’une des photographes les plus en vue de sa génération.      (THANDIWE MURIU)
C’est sur les conseils d’une amie qu’elle réalise en 2015 la série "Camo". Pour cela, elle s’inspire des photos de mode des magazines de luxe occidentaux, notamment de "Vogue". Mais cette fois, les modèles sont de jeunes femmes noires. "J'adore la photographie de mode, je pourrais en faire toute la journée, mais j'ai réalisé qu'il fallait que la photographie de mode soit le reflet de ce que je suis et de mes origines", explique-t-elle sur la BBC. Si le travail de Thandiwe Muriu peut au premier regard paraître simplement ludique, une autre dimension se dévoile derrière l’apparente frivolité de ses modèles. Car avec ce travail, elle entame une véritable réflexion sur le fait d’être une femme aujourd’hui, une femme noire, une femme noire artiste. "Je suis petite, j'ai l'air très jeune et, souvent, les gens me rejetaient. J'arrivais sur le plateau et les gens parlaient à mon assistant, qui était un homme, en pensant qu'il était le photographe plutôt que moi. J'ai dû apprendre à être courageuse et audacieuse et à dire : ‘Bonjour, c'est moi qui commande.’"  (THANDIWE MURIU)
Tout son travail est une exploration de la beauté africaine, dirigé vers la revalorisation de la femme noire dont les standards de beauté sont souvent écartés, rejetés à l’intérieur parfois de son propre pays. Beaucoup de jeunes femmes se défrisent les cheveux, se blanchissent la peau pour se rapprocher des canons de la mode véhiculés par les magazines occidentaux. Mais Thandiwe Muriu refuse ce diktat. Elle souhaite montrer des femmes fières, joyeuses, affirmées, et encourager les jeunes filles à célébrer leur peau noire. Je veux "que les petites filles se voient dans mon travail, qu'elles reconnaissent la beauté de leur peau, de leurs lèvres et de leurs hanches", explique-t-elle sur le site de l’Unesco.  (THANDIWE MURIU)
Qu’ils soient crépus ou tressés, courts, architecturés ou perlés, les cheveux aux coupes résolument afro tiennent une place primordiale dans son travail. Après avoir fait de nombreuses recherches sur les coiffures anciennes, elle s’interroge : "Quels sont les symboles de beauté que nous avons perdus ?" Elle dit sur compte Instagram vouloir réinventer "les coiffures africaines traditionnelles comme autant des couronnes de beauté". Et d’expliquer à la BBC : "Le défi de toute une vie serait d'essayer de les cataloguer tous et de devenir les premières archives modernes de nos cheveux."    (THANDIWE MURIU)
L’autre élément primordial dans la construction de ses photos est le tissu qu’elle recherche pendant des heures dans les innombrables piles entreposées dans les magasins de Nairobi. Le tissu tient ici plusieurs rôles car le même imprimé va servir à la fois de vêtement et de décor, et créer ainsi une esthétique particulière que l’on pourrait rapprocher de l’art optique des années 1960. Je recherche "quelque chose de très fort, avec une qualité presque psychédélique, comme si les tissus étaient vivants, en mouvement et déroutaient l'œil. (…) Nous sommes dans cette nouvelle Afrique, cette nouvelle génération où nous aimons nos imprimés, mais nous n'allons pas les porter de manière traditionnelle", précise-t-elle à la BBC.      (THANDIWE MURIU)
Thandiwe Muriu utilise aussi de nombreux objets de récupération (canettes de boissons, passoires à thé, presse-agrumes, pinces à linge…) et en fait des accessoires de mode. Ces objets du quotidien transformés en bijoux, couvre-chefs ou lunettes ajoutent une véritable touche d’humour.      (THANDIWE MURIU)
Thandiwe Muriu se rend régulièrement dans les écoles et organise des ateliers techniques, car elle souhaite faire passer aux jeunes filles le message que l’art n’est pas réservé aux hommes. En tant que femmes et noires, elles peuvent devenir elles aussi des photographes, des artistes.  Le pari semble réussi puisque les petites filles qui viennent voir l'expo s'enthousiasment régulièrement : "Ma mère aussi a la peau noire comme la dame. (…) Elle porte le même tissu que tata", raconte son agente artistique française, Mary-Lou Ngwe-Secke, sur le site de "Causette".    (THANDIWE MURIU)

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