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Le journaliste marocain Ali Anouzla dans le collimateur du pouvoir

Le journaliste marocain Ali Anouzla, directeur de la version arabophone du site indépendant Lakome, aura passé un mois dans les geôles de Salé, près de Rabat. Accusé d’«aide au terrorisme» pour avoir relayé dans un article une vidéo attribuée à Al-Qaïda, il vient d'être remis en liberté provisoire. Son incarcération avait suscité de vives protestations au Maroc et de la part d’ONG internationales.
Article rédigé par Dominique Cettour-Rose
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Ali Anouzla, directeur du site Lakome est accueilli, le 25 octobre 2013, par des partisans à sa sortie de la prison de Salé (Maroc). (Jalal Morchidi / ANADOLU AGENCY)

Ali Anouzla, 49 ans, est connu pour ses prises de positions critiques envers le régime. Libéré sous caution, le 25 octobre 2013, le directeur du site d'information en ligne Lakome reste inculpé pour «assistance matérielle», «apologie» et «incitation à l’exécution d’actes terroristes».

Il risque jusqu'à 20 ans de prison, aux termes de la loi antiterroriste votée en 2003 après une vague d'attentats à Casablanca, selon Amnesty International. 

RSF demande l'abandon des charges
Après sa libération, Reporters sans frontières (RSF) a exprimé son «soulagement» mais demandé «l'abandon des charges qui pèsent toujours contre» Ali Anouzla. Amnesty international et Human Rights Watch (HRW) ont condamné, pour leur part, l’inculpation d’«un prisonnier de conscience, détenu uniquement pour avoir exercé sa profession de journaliste».

M. Anouzla avait été arrêté, le 17 septembre 2013, pour avoir posté un article sur une vidéo d'Al-Qaïda fustigeant la monarchie marocaine et appelant au jihad. Un lien renvoyait sur le site du journal espagnol El Pais où une vidéo d'al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), d’une quarantaine de minutes, était disponible. La vidéo, intitulée «Maroc: le royaume de la corruption et du despotisme», avait été diffusée en septembre 2013 sur différents support numériques, dont Youtube qui l'a supprimée pour «contenu violent».

Une vidéo de «propagande»
Le parquet de Rabat l'accuse d'avoir lancé «un appel clair et une incitation directe à commettre des actes terroristes dans le Royaume du Maroc». Les détracteurs de M. Anouzla lui reprochent d'avoir offert une tribune à Aqmi. Ses soutiens font valoir, eux, que Lakome avait prévenu qu'il s'agissait d'une vidéo de «propagande». Les versions arabophone et francophone de Lakome ont récemment été bloquées au Maroc.


 
Après plusieurs jours de garde-à-vue dans les locaux de la police judiciaire, Ali Anouzla avait été incarcéré à la prison de Salé où sont détenues les personnes impliquées dans des affaires de terrorisme. Son arrestation avait entraîné plusieurs manifestations au Maroc pour demander sa libération. Les Etats-Unis avaient également exprimé leur «inquiétude» à propos de cette affaire.

Plusieurs affaires sensibles
M. Anouzla a déjà révélé plusieurs affaires sensibles au Maroc. On lui doit notamment celle, en août 2013, de la grâce, par le roi Mohamed VI, du pédophile espagnol Daniel Galvan. Un scandale qui avait jeté le trouble tant en Espagne qu'au Maroc. 

Alors qu'il dirigeait le quotidien Al-Jarida Al-Oula, Ali Anouzla avait fait l'objet de poursuites, en 2009, pour un article jugé calomnieux sur la santé de Mohammed VI. Après l'arrêt de la parution du journal, il a cofondé en 2010 le site Lakome.com, dont il dirige la version arabophone. D'après le dernier rapport de RSF sur la liberté de la presse, le Maroc occupe la 136e place, sur 179 pays.

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