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Mémoire de l’esclavage : «ne pas oublier la Mauritanie où se perpétue le fléau»

Ne pas oublier la Mauritanie. C’est le message que le Collectif des Mauritaniens de France lance à l’occasion de la journée commémorative du souvenir de l’esclavage et de son abolition. Malgré l’interdiction de la traite, il existe de nouvelles formes d’esclavage dans le pays, dénonce le coordinateur du Collectif. Souleymane Niang s’est confié à Géopolis.
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
Plusieurs milliers de descendants d'esclaves manifestent contre l'esclavage le 29 avril 2015 dans la capitale mauritanienne. (Photo/AFP)

Le Collectif des Mauritaniens de France annonce une manifestation le 13 mai à Paris. Il s’agit d’interpeller l’opinion française et internationale sur la situation dramatique que vivent les Haratines, ces anciens esclaves et descendants d’esclaves maintenus en marge de la société avec la complicité du pouvoir, affirme Souleymane Niang.
 
«L’esclavage sévit toujours. C'est-à-dire qu’on fait travailler les victimes sans les payer. Toutes les tâches pénibles en Mauritanie sont confiées aux Haratines. Des domestiques ont été envoyés en Arabie Saoudite où ils ont été abandonnés à leur sort. Les victimes sont dépossédées de leurs terres. Ils travaillent pour les maîtres sans être payés. Et l’Etat fait tout pour ne pas éduquer ces populations qui vivent à la marge, abandonnées à elles mêmes dans les périphéries», accuse-t-il.
 

Sileymane Niang est Coordinateur du Collectif des Mauritaniens de France. Il appelle la communauté internationale à faire pression sur le pouvoir de Nouakchott. (Photo/CMAFng)

L’esclavage aboli? «Il n’en est rien»
Officiellement, l’esclavage a été aboli en Mauritanie en 1980. Depuis août 2015, il est considéré comme un crime contre l’humanité. Mais tous les anti-esclavagistes mauritaniens affirment qu’il n’en est rien. 
 
En novembre 2016, le président du mouvement anti-esclavagiste mauritanien (IRA), Biram Dah Abeid, avait décrit à Géopolis, un système particulièrement rodé qui continue d’asservir des centaines de milliers de Mauritaniens : esclaves, anciens esclaves, leurs descendants et toute la communauté noire du pays.
 
«Chez nous, les esclaves représentent 20% de la population. Ce sont des personnes qui naissent propriété d’autres personnes. Elles n’ont pas de papiers d’état civil. Elles n’ont pas le droit à l’éducation. Elles travaillent sans repos, sans salaire, sans soins et subissent des châtiments corporels. Le maître a le droit de castrer son esclave quand il est beau et qu’on peut craindre une aventure sexuelle entre lui et les filles ou les femmes du maître».
 
«Le phénomène fait des ravages dans les quartiers reculés»
Le président du Collectif des Mauritaniens de France a été surpris par les propos tenus à Nouakchott par la rapporteuse spéciale des Nations Unies chargée des formes modernes d’esclavage. En visite en Mauritanie fin avril 2017, Madame Urmila Bhoola avait salué les grands progrès accomplis dans le domaine de la lutte contre l’esclavage et l’éradication de ses causes.
 
«Je ne vois pas comment on peut parler d’amélioration alors que les mouvements anti-esclavagistes sont réprimés chaque jour et leurs leaders emprisonnés. Je pense que cette personne a pu rencontrer des membres du gouvernement et des organisations inféodées au pouvoir et qu’elle s’est limitée à leur appréciation. En fait, il faut aller à l’intérieur pour observer le phénomène. Dans des quartiers périphériques et les coins les plus reculés du pays. C’est là où le problème subsiste», précise-t-il.
 
«Des réparations et une politique de discrimination positive»
Souleymane Niang appelle la communauté internationale à faire pression sur le pouvoir mauritanien pour l’amener à respecter les droits politiques, économiques et sociaux des Haratines, et à cultiver la citoyenneté et l’égalité entre tous les Mauritaniens.
 
 Il explique à Géopolis comment des dignitaires mauritaniens et des notables très influents détiennent aujourd’hui des esclaves qu’ils utilisent dans leurs exploitations agricoles sans les payer comme il se doit. Non seulement il faut y mettre un terme, dit-il, mais il faut aussi réparer cette injustice qu’ils subissent depuis plusieurs générations
 
«Les réparations d’ordre économique s’imposent. Il faudrait voter une nouvelle loi foncière pour aider les Haratines à obtenir des terres pour pouvoir survivre. Sans quoi, ils seront toujours à la merci de leurs maîtres. Il faudrait vraiment une politique de discrimination positive aux niveaux éducatif, économique et politique pour que ces populations recouvrent leurs droits».
 
Le Collectif des Mauritaniens de France estime qu’il est plus que nécessaire de créer en Mauritanie un musée et un mémorial de l’esclavage. Et consacrer une journée nationale annuelle dédiée à la mémoire de l’esclavage. Il faut débarrasser le pays de ce fléau qui fait des ravages et qui risque, selon Souleymane Niang, de faire éclater le pays.
 
 
 
 
 
 
 

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