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Gambie : qu’est devenu le pays un an après la chute du dictateur Yahya Jammeh?
Le 21 janvier 2017, le dictateur Yahya Jammeh quittait le pouvoir. Après un an de pouvoir de son successeur, Adama Barrow, le climat politique a changé dans le pays. Mais les difficultés économiques demeurent. Premier bilan.
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Ancien militaire parvenu au pouvoir par un putsch sans effusion de sang en 1994, Yahya Jammeh s'était fait largement élire et réélire sans interruption jusqu'à sa défaite en décembre 2016 face au candidat de l'opposition, Adama Barrow. Son départ en exil pour la Guinée Equatoriale fut l’épilogue d'une crise à rebondissements provoquée par son refus de céder le pouvoir. Un départ qui a suscité d'immenses espoirs dans cette ex-colonie britannique enclavée dans le Sénégal, à l'exception d'une étroite façade côtière prisée des touristes.
«Il y a la démocratie, tout le monde se sent libre. Les disparitions sans laisser de trace, c'est fini dans ce pays», assure Kalipha Dampha, un enseignant. «Il n'y a plus de NIA ni de "Junglers"», reconnaît Ismaila Ceesay, professeur de science politique à l'université. Une référence à la redoutée Agence nationale du renseignement (NIA), rebaptisée et remaniée par Adama Barrow, et aux «Junglers» («Broussards»), considérés comme les escadrons de la mort du régime Jammeh.
«Mais autrement, tout est pareil», estime l’universitaire. «Les prix alimentaires sont les mêmes, les salaires n'ont pas augmenté, le secteur de la santé est en ruines, l'éducation est une plaisanterie», ajoute Ismaila Ceesay.
Dans son discours de Nouvel an, le président Barrow a invoqué le bilan de son prédécesseur. Il a affirmé avoir trouvé à son arrivée «une dette de plus d'un milliard de dollars, soit un taux astronomique de 120% du PIB.» Le pays est néanmoins passé «en réserves de changes de moins d'un mois de couverture d'importations à plus de quatre mois à la fin de l'année» 2017, a-t-il indiqué.
Sous Yahya Jammeh, «les infrastructures d'Etat ont été négligées», a-t-il ajouté. Adama Barrow a ainsi cité le secteur de l'électricité, une des principales sources de mécontentement de la population. «Pendant la saison froide, on peut toujours se retrouver sans eau ni électricité», indique Mati Gomez, une commerçante.
«Avancées capitales»
Les critiques s'expriment bien plus librement que sous Yahya Jammeh. Mais le chemin est encore long, notamment pour les journalistes, longtemps réduits à l'autocensure ou à l'anonymat. Le Syndicat de la presse gambienne milite pour «la révision des lois sur les médias afin de les mettre en conformité avec les normes internationales», a déclaré à l'AFP son secrétaire général, Saikou Jammeh.
«La première année de la présidence d'Adama Barrow s'est traduite par des avancées capitales concernant le respect et la protection des droits fondamentaux, mais il reste énormément à faire pour rompre de manière décisive avec le passé violent de la Gambie», résume Alioune Tine, directeur régional d'Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale.
Les autorités ont suspendu jusqu'à nouvel ordre toute manifestation politique à la suite de heurts entre partisans d'Adama Barrow et de Yahya Jammeh. Et une dizaine de militaires actuellement jugés en cour martiale pour mutinerie ont été détenus pendant plusieurs mois sans charge et certains d'entre eux ont affirmé avoir signé des aveux sous la torture.
Un an après le départ de Yahya Jammeh à la suite d'une intervention militaire de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao) et d'une ultime médiation guinéo-mauritanienne, la stabilité de la Gambie reste menacée, estime le commandant de la force de la Cedeao, le colonel sénégalais Magatte Ndiaye. Selon lui, des déserteurs de l'armée gambienne se mêlent de plus en plus aux trafiquants et bandits à la frontière avec le Sénégal. «Nous avons des rapports montrant leur implication dans le trafic de bois ou de marijuana», a indiqué le colonel Ndiaye, mentionnant aussi des braquages.
Prolongé à plusieurs reprises, le mandat de la force de la Cedeao court jusqu'en mai 2018.
Une autre incertitude concerne d'éventuelles poursuites contre l’ex-dictateur, accusé de nombreux crimes et d'avoir détourné plus de 50 millions de dollars (environ 44 millions d'euros). Interrogé par RFI et France 24 sur la possibilité d'une extradition de Yahya Jammeh, le président équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema a répondu qu'il examinerait une telle demande, si elle lui était présentée. Mais il y a paru défavorable.
«Poursuivre une personne qui a pris la décision de laisser le pouvoir serait peut-être une mauvaise conception politique», a-t-il dit au cours de l’interview.
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