Guinée : le colonel Mamady Doumbouya écarte 42 généraux, mis à la retraite d’office
Le nouvel homme fort de la Guinée consolide son pouvoir, cinq semaines après avoir renversé le président Alpha Condé.
"Nous entrerons dans la carrière quand nos aînés n'y seront plus." Les jeunes militaires au pouvoir en Guinée ont décidé d’écarter une quarantaine de généraux appartenant aux différents corps d’armée (terre, air, mer, gendarmerie). Cette mise à l'écart des hauts gradés intervient quelques semaines après le coup d’Etat qui a renversé le président Alpha Condé le 5 septembre 2021.
La vieille garde mise à la retraite
Un décret signé du nouvel homme fort du pays, Mamady Doumbouya, annonce que "42 généraux et deux amiraux de l'armée guinéenne sont appelés à faire valoir leurs droits à la retraite", sans plus d’explications. Le ménage se fait pour certains avec une certaine élégance, puisque 25 de ces ex-dignitaires sont nommés membres du Conseil supérieur de la défense, une institution consultative sur les problèmes de sécurité nationale, selon un autre décret lu mardi 12 octobre au soir à la télévision publique.
Parmi les généraux mis à la retraite figure le général Sékouba Konaté, ancien président de la transition de 2010 ayant conduit à l'élection d'Alpha Condé la même année. Cette purge politique intervient une semaine après la nomination d’un nouveau Premier ministre de la transition en la personne du haut fonctionnaire international Mohamed Béavogui, 68 ans.
Un Premier ministre consensuel
En nommant un Premier ministre sans expérience gouvernementale et resté longtemps à l’extérieur du pays, le colonel Doumbouya a choisi une personnalité éloignée des querelles politiques des dernières années. Diplômé d'ingénierie en Russie, expert du financement du développement agricole et de la gestion des risques, il a occupé plusieurs postes à responsabilités dans le secteur privé ou dans des institutions internationales, notamment dans le système onusien.
Le colonel Doumbouya, commandant des forces spéciales qui ont renversé le président Alpha Condé le 5 septembre dernier, tient ainsi sa promesse de nommer un Premier ministre civil. Le colonel autoproclamé "président de transition" a promis de rassembler les Guinéens, au-delà des appartenances politiques ou ethniques. Avec, pour le moment, un certain succès, puisque sa prise de pouvoir n’a soulevé que peu de réactions défavorables à l’intérieur et même à l’extérieur du pays, si ce n’est une molle condamnation des pays de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao).
Vers une nouvelle Constitution
La junte a affirmé qu'elle rendrait le pouvoir aux civils après des élections à la fin d'une période de transition. Durant cette période transitoire, elle dit vouloir procéder à une "refondation de l'Etat", rédiger une nouvelle Constitution, lutter contre la corruption, réformer le système électoral.
Le nouveau Premier ministre devra proposer des ministres au colonel Doumbouya, et "dans un délai n'excédant pas 30 jours" après leur nomination, lui soumettre "le plan d'actions" du gouvernement, selon les préconisations de la "charte", sorte d'acte fondamental de la transition publiée le 27 septembre. Le gouvernement et son chef répondent entièrement au colonel Doumbouya qui approuve les noms proposés comme ministres et peut les révoquer, tout comme le chef du gouvernement. Le gouvernement "exécute et conduit la politique de la Nation définie par le président de la transition", dit la charte.
Par ailleurs, aucun membre des institutions de transition ne pourra se présenter "ni aux élections nationales, ni aux élections locales qui seront organisées pour marquer la fin de la transition". C'est-à-dire qu'ils ne pourront bénéficier pour eux-mêmes de la réforme du système électoral. De belles intentions rarement tenues dans le passé sur le continent.
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