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Violences sexuelles en RDC : le docteur Denis Mukwege dénonce l'inaction des autorités congolaises contre ce fléau

Denis Mukwege a reçu le 11 janvier 2022 à Paris le titre de membre Honoris Causa de l'Académie de médecine de France.

Article rédigé par franceinfo Afrique avec AFP
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Le médecin congolais Denis Mukwege dans une image extraite du documentaire "L'Homme qui répare les femmes". (THIERRY MICHEL / AFP)

Honoré par l'Académie de médecine de France, le docteur congolais Denis Mukwege a dénoncé lors de son passage à Paris les "criminels" en poste dans l'appareil d'Etat de son pays qui "étouffent la vérité". L'homme, qui a consacré sa vie à soigner les femmes victimes de violences en République démocratique du Congo (RDC), a demandé l’aide de la France.

120 milices armées dans l'est du Congo

Le gynécologue et chirurgien, fondateur de l'hôpital de Panzi au Sud-Kivu, dans l'est de la RDC, a reçu en 2018 le prix Nobel de la paix pour son action en faveur des femmes victimes de viols utilisés comme armes de guerre. Les Kivu, en proie aux violences armées depuis plus de 25 ans, restent l'épicentre des violences sexuelles contre lesquelles Denis Mukwege, 66 ans, tente inlassablement de mobiliser malgré les menaces, estimant à "120 le nombre de groupes armés dans l'est du Congo".

Devant l'Académie de médecine, le docteur Mukwege a rappelé que ces viols étaient souvent perpétrés par les hommes en armes contre des femmes devant leurs maris, enfants et communauté pour jeter encore plus l'opprobre sur elles. Qualifiant le viol comme arme de guerre de "crime absolu" qui vise à la "destruction de la femme, de la famille et de toute une communauté".

"Crise de notre humanité" 

Il précise avoir eu à soigner des femmes ayant subi ces atrocités plusieurs fois dans leur vie. "Nous ne sommes plus confrontés à une simple crise humanitaire, mais à une véritable crise de notre humanité", a-t-il lancé lors de sa conférence. Interrogé par l'AFP pour savoir s'il estimait que les autorités congolaises actuelles en faisaient assez pour mettre en place une justice transitionnelle, le Prix Nobel a répondu "Non".

"Il y a eu tellement de crimes, et malheureusement les criminels sont aux postes de commandement dans l'armée, dans la police, ils occupent aussi des postes politiques. Et le fait qu'ils occupent ces postes, vous comprendrez qu'ils font tout pour étouffer la vérité, ça veut dire aussi que tous les criminels continuent à commettre des crimes (...) en toute impunité."

Docteur Denis Mukwege

à l'AFP

Concernant la situation sécuritaire récente au Nord-Kivu – qui est depuis début mai sous état de siège, une mesure exceptionnelle qui a donné les pleins pouvoirs aux militaires –, M. Mukwege a estimé que cela "n'a pas amené la paix, au contraire".

Dans cette province, les armées congolaise et ougandaise mènent depuis le 30 novembre 2021 des opérations militaires conjointes contre des positions des rebelles du groupe Forces démocratiques alliées (ADF). Groupe le plus meurtrier en RDC, les ADF sont accusées par l'Ouganda d'être responsables d'attentats sur son sol. La RDC entretient des relations en dents de scie avec ses voisins du Rwanda et de l'Ouganda.

La France peut nous aider

"Inviter l'Ouganda dans le conflit actuel pour essayer de le résoudre, je parle de 'pompier pyromane'. (...) Je ne vois pas comment les pays qui soutiennent les groupes armés, qui sont très actifs dans l'exploitation illégale des ressources de la RDC, on peut les appeler pour sécuriser la RDC... Pour moi, c'est une aberration", a-t-il conclu.

Le docteur Mukwege a exhorté la France à "s'impliquer" dans la quête de justice. Nous pensons que l'implication de la France peut faire une grande différence. "La France connaît mieux le Congo que tous les autres pays, à part la Belgique, qui n'est pas au Conseil de sécurité", a affirmé Denis Mukwege. "Le Congo, c'est le plus grand pays francophone. (...) La France a une histoire commune avec le Congo, de la langue, de la connaissance de la question congolaise".

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