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À vrai dire. L'eco va-t-il enterrer le franc CFA ?

Publié Mis à jour
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Article rédigé par TV5MONDE - Antoine Fonteneau
France Télévisions

15 nations d'Afrique de l'Ouest ambitionnent d'adopter une monnaie commune. Elles ont choisi son nom : l'eco. Dans huit de ces pays, cette nouvelle devise remplacerait le contesté franc CFA. Pourtant, de récentes déclarations sèment le doute sur cet objectif.

L'idée remonte à 1983. 15 pays d'Afrique rêvent de faire monnaie commune : ceux de la CEDEAO, la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest. Ces derniers mois, le projet reprend de la vigueur. Le serpent de mer pourrait peut-être voir le jour dès l'an prochain.

Qui veut adopter l'eco ?


Ces 15 pays de la CEDEAO se sont réunis fin juin 2019 à Abuja et ils ont choisi le nom de cette future devise : oublié "afri" ou "kola", comme proposé, ce sera finalement "eco".

Parmi ces 15 pays, huit utilisent déjà une monnaie commune, le franc CFA, en circulation pour 90 millions d'habitants. Ces nations sont réunies dans l'UEMOA, l'Union économique et monétaire ouest-africaine : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo.  

Le week-en dernier, à Abidjan, ces huit nations de l'UEMOA ont annoncé leur intention de se lancer en premier vers l'eco : dès l'année prochaine, en 2020. En théorie donc, elles devraient abandonner le franc CFA, cette monnaie souvent critiquée, accusée d'être une monnaie coloniale par ses détracteurs.

Les pays de l'UEMOA seront-ils prêts en 2020 ?


Pour savoir si un pays est prêt à adopter la nouvelle monnaie unique, des critères précis ont été établis.

Ces critères dits "de convergence" incluent un déficit inférieur à 3% du PIB, une dette publique en dessous de 70% du PIB et une inflation de moins de 10%.

Problème : aujourd'hui, aucun des 15 pays de la CEDEAO ne répond à tous les critères. Difficile donc d'imaginer que des billets ou des pièces en eco pourront circuler dès l'année prochaine.

Et même si les huit pays de l'UEMOA font un peu mieux que les autres, certains économistes sont sceptiques. 

Pour Ndongo Samba Sylla, économiste à la Fondation Rosa Luxemburg à Dakar, "ces pays sont effectivement plus proches des critères de convergence que les sept autres, parce qu'ils sont déjà dans une zone monétaire."

Mais seront-ils prêts dès 2020 ? "On a des raisons d'en douter, analyse-t-il, parce que des pays comme la Guinée-Bissau et le Niger présentent des déficit publics. C'est-à-dire que sans l'aide étrangère, ces pays ne peuvent pas respecter les critères de convergence."

L'eco sera-t-il une simple copie du franc CFA ?


L'adoption de l'eco se ferait donc de manière progressive. L'idée originelle étant de créer une monnaie indépendante, à taux de change flexible basé sur un panier de différentes devises : l'euro, mais aussi le dollar ou le yuan.

Sauf que les espoirs des opposants au franc CFA ont été douchés, précisement lors du sommet de l'UEMOA, le 12 juillet. Alassane Ouattara a alors plaidé pour le maintien d'un taux de change fixe avec l'euro, exactement comme le franc CFA aujourd'hui.

Pour Ndongo Samba Sylla, "si on veut véritablement tourner la page du franc CFA, il faut d'abord que les pays CFA coupent le lien avec le Trésor français. C'est-à-dire que la France ne garantisse plus la parité CFA/euro, que le taux de change devienne flexible, que les réserves des pays africains ne soient plus logés dans les comptes du Trésor français mais ailleurs dans des endroits que les Africains auraient choisis eux-mêmes."

A noter, par ailleurs, que les six pays d'Afrique Centrale qui utilisent aussi le franc CFA -réunis au sein de la CEMAC- ne sont pas concernés par l'adoption de l'eco.

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