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La démographie égyptienne met en danger l’avenir du pays

La population égyptienne vient de franchir le cap des 95 millions d’habitants, a annoncé le service des statistiques. C’est ce qu’il ressort du 14e recensement de la population mené en 2017. La démographie est repartie à la hausse depuis 2005 dans le pays. L’indice de fécondité est désormais de 3,5 enfants par femme. Une bombe à retardement dans un pays ou la zone habitable est très réduite.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3min
Manifestation sur la place Tahrir au Caire en Egypte. (Asmaa Gamal / NurPhoto)

Jusqu’en 2005, la démographie de l’Egypte suivait cahin-caha l’évolution à la baisse, des pays d’Afrique du Nord, Maroc et Tunisie en particulier. Cette année-là, la démographie a atteint un point bas de 3 enfants par femme. Depuis, la progression est quasi permanente. Le taux de natalité est passé de 25,5 pour 1000 habitants à 31,5 pour 1000 habitants en dix ans. Aujourd’hui, selon Arte, le nombre de naissances équivaut à celui de l’Italie, de la France, du Royaume-Uni et de l’Espagne réunis. Soit deux millions chaque année.

Un pays désertique
Avec 100 millions d’habitants dans un avenir très proche, la crise humanitaire est pour bientôt. «Le taux actuel de croissance démographique en Egypte constitue une menace pour le pays et limite le progrès de la nation», a déclaré le président al-Sissi en juillet 2017. Pour la simple et bonne raison que l’espace est limité. Le pays est immense mais n’est qu’un désert. Aussi, la quasi-totalité de la population vit le long du Nil, soit sur 7% du territoire. Les Egyptiens s’entassent sur un territoire grand comme quatre fois le Liban (10.000 km²).

Et il ne suffit pas de nourrir le peuple. Il faut aussi le loger, le former, etc. Le Caire et Gizeh forment une mégapole de 16 millions d’habitants, la taille de Tokyo, mais sans les moyens! L’économie défaillante ne peut pas, à l’heure actuelle, amortir le choc démographique.

Dans le Guardian (lien en anglais), en 2014 déjà, Magued Osman, directeur d’un institut de statistiques faisait ce constat sans appel. «Entre 2006 et 2012, le nombre de naissances s’est accru de 40%. Ca veut dire qu’il vous faut 91.000 salles de classe nouvelles juste pour maintenir le même nombre d’élèves devant un enseignant. Or, ce nombre est déjà très élevé. En moyenne 40 élèves et parfois même 60.»
 
Comment en est-on arrivé là ?
C’est donc à l’année 2005 que remonte le désintérêt progressif du pays pour le contrôle des naissances. Le renversement de la tendance est antérieur à la politique de Mohamed Morsi, ouvertement pro-nataliste. Là-dessus, il est du reste en phase avec les islamistes. Leurs députés, élus en 2012, avaient en moyenne 5 à 6 enfants, et ne se battaient pas pour la contraception.

En fait, les observateurs s’intéressent d’avantage à la situation socio-économique du pays. L’insécurité économique pousserait les couples à faire plus d’enfants, afin d’être aidés lors de leurs vieux jours. Mais surtout, les  femmes sont maintenues à la maison. Une femme sur quatre seulement travaille. Qui plus est, dans des emplois peu qualifiés, à 46% dans l’agriculture. Marqué par la récession, le taux d’activité des femmes instruites recule. De 22 à 17% pour celles qui ont fréquenté le secondaire, de 56 à 41% si elles sont allées en fac.

Conséquence: le taux de fécondité augmente chez les femmes instruites passant de 3 à 3,5 (contre 3,8 pour les femmes sans instruction).

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