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Piratage et système D, tous les moyens sont bons pour regarder la Coupe du monde

Faux décodeurs, branchements sauvages: tout est bon pour ne rien manquer de la Coupe du monde de football. Nombre d’Ouest-Africains regardent les matchs sur BeIN Sports alors que la chaîne qatarie n'a aucun droit de diffusion en Afrique subsaharienne francophone. Pour Canal+ qui a un monopole sur cette région, la concurrence illégale représente une perte de l’ordre de 20% de son chiffre d’affaires
Article rédigé par Michel Lachkar
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3min
A Mogadiscio, une famille réunie autour d'un match de la Coupe du monde de football. (Mohamed ABDIWAHAB / AFP)

Dans quatre pays africains où les équipes nationales se sont qualifiées pour la Coupe du monde de football, Sénégal, Nigeria, Maroc, Tunisie, les chaînes publiques ont acheté les droits de diffusion, mais uniquement pour les matchs de leur équipe. Pour le reste, la débrouille est de mise et tous les moyens sont bons pour regarder le Mondial 2018, dont les droits de diffusions sont trop élevés pour les télévisions africaines.

Branchements sauvages
Dans les rues de Dakar, Abidjan ou Yaoundé, les fous du ballon rond tirent des câbles, des branchements sauvages sur des antennes de Canal+. C'est ce qu'on appelle le «piratage araignée».
En Afrique de l’Ouest, des sociétés privées qui ont pignon sur rue ont piraté le signal de BeIN Sports et le revendent à des téléspectateurs qui regardent les matchs illégalement.

«Canal+ a un quasi-monopole des droits de diffusion sportifs sur toute l'Afrique francophone subsaharienne, mais des entreprises font du piratage industriel. Pour eux, c'est gratuit, alors que nous, on a payé les droits!», affirme Mamadou Mbengue, directeur du groupe pour le Gabon. «Cela nous inquiète car ça impacte notre business. Il y a un risque que ça se passe comme au Maghreb: qu'à terme, on doive partir.»

En Algérie et au Maroc, les chaînes sont piratées à la source par des téléspectateurs achetant dans le commerce des «démodulateurs» qui cassent le système de cryptage des diffuseurs. Sur les marchés d’Alger ou de Casablanca, ce matériel piraté se vend partout, pour une centaine d'euros. Canal+ n'a pas résisté.

Coûts trop élevés
Au Sénégal, la télévision publique RTS a revendiqué les droits exclusifs de diffusion gratuite de 32 matchs, mais une chaîne concurrente, TFM, du chanteur Youssou N'Dour, affirmait avoir également signé un contrat pour leur diffusion. Une solution à l'amiable a finalement été trouvée, permettant aux deux télévisions de diffuser les matchs.

«Les coûts des droits de retransmission des évènements sportifs sont parfois trop élevés pour nos structures, cela explique en partie le piratage», estime Grégoire Ndjaka, directeur de l'Union africaine de radiodiffusion, pour expliquer le large piratage sur le continent.

«Et il y a même des télévisions publiques qui, par manque de moyens, s'adonnent au piratage», affirme à l'AFP Béatrice Damiba, ancienne présidente du Conseil de la communication du Burkina Faso et présidente de l'ONG panafricaine Convergence, qui lutte contre ces pratiques. «Il n'y a pas que le foot qui est piraté, il y a aussi la musique, le cinéma... et ça, ça concerne toute l'Afrique.»

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