Des équipements militaires français repérés au Soudan, "en violation" de l'embargo sur les armes, dénonce Amnesty International

L'ONG affirme qu'un système de défense d'origine française est utilisé sur certains véhicules de forces paramilitaires au Soudan, alors qu'un conflit meurtrier ravage le pays.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Des soldats des Forces armées soudanaises, à Khartoum, en novembre 2024. (AMAURY FALT-BROWN / AFP)

C'est une première au Soudan, en proie à un violent conflit depuis avril 2023. Des équipements militaires fabriqués par les groupes KNDS-France et Lacroix ont été repérés par Amnesty International au Soudan, sur des véhicules blindés fournis par les Emirats arabes unis. "Nos recherches montrent que des systèmes d'armement conçus et fabriqués en France sont utilisés sur le champ de bataille au Soudan", affirme dans un communiqué la secrétaire générale de l'ONG Agnès Callamard. Il s'agit d'une "violation" de l'embargo de l'Union européenne sur les armes, estime l'ONG.

Selon l'analyse de l'organisation, des véhicules de transport de troupes Nimr Ajban, fabriqués aux Emirats arabes unis par le groupe national Edge, sont utilisés par les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo au Soudan, notamment au DarfourCes blindés sont équipés du système d'autoprotection Galix, conçus par KNDS-France et Lacroix. Doté de capteurs, il permet de détecter une menace et est équipé de plusieurs tubes lanceurs de fumigènes ou de munitions (de désencerclement ou de "neutralisation du personnel" situé à proximité du véhicule), détaille Lacroix sur son site internet.

Trois photos de véhicules équipés de systèmes Galix

En appui de son analyse, Amnesty International publie trois photos de véhicules équipés de ces systèmes Galix. Vérifiées par franceinfo, celles-ci datent de juin 2019, avril 2023 et novembre 2023. Il est difficile de savoir dans quelle mesure ce matériel, présent au Soudan depuis 2017, est utilisé depuis le début du conflit, en avril 2023.

"Le système Galix est déployé par les FSR dans ce conflit, et toute utilisation au Darfour constituerait une infraction évidente à l'embargo sur les armes de l'ONU. Le gouvernement français doit veiller à ce que Lacroix Défense et KNDS-France cessent immédiatement de fournir ce système aux Emirats arabes unis", dénonce Agnès Callamard.

Sollicité par l'AFP, le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), chargé du contrôle des exportations de matériel de guerre, n'a pas pris connaissance du rapport et n'a pas fait de commentaire, tout comme KNDS-France et Lacroix. Contactés par franceinfo, les ministères des Affaires étrangères et des Armées n'avaient pas non plus répondu.

Des dizaines de milliers de morts

Le Soudan fait l'objet d'un embargo de l'UE sur les ventes d'armes, tandis que l'ONU en impose un depuis 2004 pour la seule région du Darfour. L'ONG appelle à son extension à l'ensemble du territoire soudanais. "Si la France ne peut pas garantir par des contrôles à l'exportation, y compris la certification de l'utilisateur final, que les armes ne seront pas réexportées vers le Soudan, elle ne devrait pas autoriser ces transferts", plaide Amnesty.

La guerre au Soudan, qui a fait des dizaines de milliers de morts et des millions de déplacés, oppose depuis avril 2023 l'armée, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane, aux paramilitaires des FSR de son ex-adjoint, le général Mohamed Hamdane Daglo. Les deux camps ont été accusés de crimes de guerre, notamment de bombardements aveugles de zones habitées, d'avoir visé délibérément des civils et bloqué l'aide humanitaire.

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