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Tanzanie : des mesures d’austérité à tous les étages
Ses compatriotes l’ont surnommé «bulldozer» pour sa capacité de travail. Aussitôt investi en octobre 2015, le nouveau président tanzanien John Magufuli s’est attaché à combattre la corruption et le gaspillage des deniers publics. Fini les dépenses de prestige et gare aux fonctionnaires qui désertent leurs bureaux.
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Il a multiplié les initiatives d’austérité, en accord avec ses promesses et avec une ardeur louée par nombre de ses concitoyens. Le président John Magufuli a ainsi décidé l’annulation des festivités annuelles de l’indépendance d’habitude célébrée en grande pompe en décembre. L’argent économisé sera consacré à une campagne de nettoyage pour lutter contre le choléra. «Il est simplement honteux que nous dépensions tant d’argent pour célébrer 54 ans d’indépendance quand notre peuple meurt de choléra», a déclaré John Magufuli, cité par l’AFP.
Fini les billets d’avion en classe affaire
Les billets d’avion en classe affaire sont désormais interdits pour les ministres, de même que les voyages non impératifs à l’étranger. Ainsi, une délégation officielle tanzanienne forte de 50 personnes qui s’apprêtait à visiter les pays du Commonwealth a été réduite à quatre personnes.
Le président a également ordonné la suppression de 90% du budget alloué au dîner qui marque, chaque année, le début des travaux du parlement tanzanien.
L’argent ainsi économisé doit être consacré notamment à l’achat de lits d’hôpitaux.
Des mesures symboliques qui rappellent un certain Thomas Sankara
De quoi rappeler les débuts de l’ancien leader charismatique burkinabè Thomas Sankara. Dès son arrivée au pouvoir en août 1983, il a commencé par prendre quelques mesures spectaculaires. Il a ordonné la vente des voitures de luxe des membres du gouvernement et choisi lui-même une Renault R5 pour ses déplacements. Il faisait de l’auto-stop pour se rendre en visite à l’étranger.
S’adressant aux parlementaires tanzaniens, John Magufuli s’est engagé à «mettre fin aux vices qui freinent la nation et qui l’empêchent de sortir des millions de citoyens d’une pauvreté abjecte».
Gare aux fonctionnaires qui désertent leurs bureaux
Les fonctionnaires tanzaniens ont reçu un sévère avertissement. Le nouveau président a fait le tour des ministères à l’improviste pour constater que certains fonctionnaires avaient déserté leurs bureaux. Des sanctions n’ont pas tardé à tomber, annonce l’AFP. Ainsi, le directeur de l’administration fiscale a été suspendu de ses fonctions après une inspection surprise dans ses services. Il doit répondre de la disparition inexpliquée de plusieurs conteneurs en provenance de l’étranger.
Un tweet d'une télévision kenyane montre le président Magufuli donnant une leçon d'austérité
#WhatWouldMagufuliDo? Tanzania's president dishing out lessons in austerity. Details on #NTVWeekendEdition pic.twitter.com/zjdeGggU2e
— NTV Kenya (@ntvkenya) December 6, 2015
Des décisions populaires en Tanzanie et au-delà
Un hashtag «WhatWouldMagufulido» (Que ferait Magufuli) a vu le jour sur twitter. Les utilisateurs peuvent partager leurs idées, souvent pleines d’humour pour faire des économies.
«Pour résumer, il a fait ce que nombre de personnes pensaient impossible de la part d’un dirigeant africain», écrit le quotidien tanzanien The Citizen.
Pour le rédacteur en chef du journal sud-africain Mail and Guardian, le président Magufuli se révèle «être un dirigeant absolument pas africain» sur un continent où, en général, «la corruption et le détournement de fonds publics sont une manière de vivre», relève The Citizen.
Les initiatives d’austérité du président John Magufuli ont été saluées au-delà de la Tanzanie. Chez les voisins kenyans, notamment, où le quotidien Daily Nation a établi une comparaison entre le nouveau président tanzanien et son homologue kenyan Uhuru Kenyatta, peu favorable à ce dernier: «Avant même d’avoir été dans les murs de la présidence assez longtemps pour avoir besoin de changer les draps, M.Magufuli a fait plus de travail concret qu’Uhuru», en poste depuis 2013.
Reste à savoir combien de temps va durer cet état de grâce dans lequel baigne le nouveau président, élu pour un mandat de cinq ans.
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