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A court de dollars, le Zimbabwe s'offre «des billets d'obligation»
Dépendant des devises étrangères depuis 2009, le Zimbabwe va recourir à des «billets d'obligation» dont la valeur sera alignée sur le cours de dollar. Pour la banque centrale, ce n'est pas «le signal de la réindroduction» du dollar zimbabwéen à laquelle Harare a dû renoncer pour cause d'hyperinflation.
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Le Zimbabwe, qui ne dispose plus de monnaie nationale depuis 2009, va imprimer des billets dont la valeur sera indéxée sur le dollar américain pour faire face au manque de liquidités que connaît le pays.
Ces «billets d'obligation», rapporte l’AFP, «pourront être utilisés pour les achats au Zimbabwe (et) se présenteront sous forme de coupures de 2, 5, 10 et 20». L’annonce a été faite mercredi 4 mai 2016 par le gouverneur de la Banque centrale John Mangudya qui a également indiqué que les retraits seraient désormais plafonnés à 1000 dollars, 1000 euros ou 20.000 rands sud-africains par jour et par établissement bancaire. Ces plafonds valent aussi pour les sorties de devises.
231.000.000 % d'inflation
Les coupures seront financées à hauteur de 200 millions de dollars par la banque panafricaine Afreximbank (Africa Export-Import Bank). Elles devraient être «probablement» disponibles «dans les deux prochains mois», rapporte le quotidien zimbabwéen The Herald.
Le gouverneur John Mangudya a par ailleurs précisé qu’il ne fallait pas voir dans cette mesure «le signal de la réintroduction» de la monnaie zimbabwéenne. «Les fondamentaux ne sont pas réunis pour son retour. C'est juste une mesure pour juguler les flux illicites qui quittent le pays». Pourtant, selon John Robertson, économiste indépendant interrogé par l’AFP, «cette mesure "très dangereuse" s'apparente à un retour du dollar zimbabwéen».
Le pays a dû renoncer à sa monnaie à cause d'une hyperinflation record. «Le taux d’inflation était de 1042,9 % en mai 2006, et de plus de 100. 000 % en janvier 2008. Le taux d'inflation annuel (entre juillet 2007 et juillet 2008) avait atteint environ 231.000.000 %», indique l’agence Ecofin.
L'économiste John Robertson prédit «une autre histoire d'inflation». En outre, confie-t-il à l'AFP, «les gens vont refuser d'avoir leurs salaires payés en billets d'obligations, poursuit-il. Les magasins et les stations service ne les accepteront pas puisqu'ils ne pourront pas les utiliser pour se réapprovisionner».
Dépendance monétaire
Depuis des semaines, peut-on lire dans les colonnes du Herald, les banques zimbabwéennes ont été obligées de limiter les retraits d’espèces de leurs clients. «Les banques commerciales opérant au Zimbabwe manquent désormais de dollars américains pour alimenter les distributeurs automatiques de billets dont plusieurs ont été fermés», explique l'agence Ecofin. «En raison d'un déficit global de liquidités dans le système monétaire de ce pays d'Afrique australe, des milliers de personnes font désormais la queue devant les banques, pour avoir un peu d'argent et faire face à leurs dépenses»
Le «dysfonctionnement» d'un système monétaire qui s'appuie sur plusieurs devises étrangères et majoritairement sur le dollar américain, serait l’une des raisons principales de cette situation, analyse The Herald. Avant 2009 où ce système a été mis en place, poursuit le journal zimbabwéen, «49% des transactions se faisaient en rand (sud-africain)». Ainsi «parmi les autres mesures prises, selon l'agence Ecofin, la banque centrale a décidé de diversifier les devises en circulation au sein de l'économie. 40% des paiements reçus en dollar américain seront ainsi convertis en rand et 10% seront convertis en monnaie européenne».
Depuis le 29 janvier 2014, rappelle l'agence, «le Zimbabwe (a autorisé) l’usage de quatre nouvelles devises pour les transactions commerciales qui se faisaient jusqu’ici essentiellement en dollar américain». Le yuan chinois, le yen japonais, la roupie indienne et le dollar australien rejoignent l’euro, le pula du Botswana, le rand sud-africain et la livre sterling qui étaient déjà légalement en circulation dans le pays.
Des «pièces d'obligations», note l’AFP, «qui ressemblent à des pièces ordinaires avec leur valeur indiquée sur une face, ont déjà été introduites en 2014 pour les petits échanges au Zimbabwe».
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