Au Bangladesh, des heurts de plus en plus violents qui traduisent "un vif mécontentement contre le parti au pouvoir"
Au Bangladesh, les affrontements deviennent de plus en plus meurtriers. Les heurts entre les forces de l'ordre et les étudiants, qui ont démarré au début du mois de juillet, ont fait 39 morts en 48 heures, dont 32 pour la seule journée de jeudi 18 juillet. Au moins 700 personnes ont été blessées au cours de ces heurts, dont 104 policiers et 30 journalistes.
Les universités et les écoles sont fermées depuis le début de la semaine, tandis que le siège de la télévision d'État et plusieurs bâtiments gouvernementaux ont été incendiés jeudi. Internet est aussi coupé dans quasiment tout le pays. C'est une réforme du système de quotas d'embauche dans la fonction publique qui a déclenché la contestation étudiante.
Cette décision du gouvernement a mis le feu aux poudres. En juin, il a voulu réintroduire un système de quotas pour accéder aux postes de fonctionnaires, et réserver un tiers des emplois aux descendants de ceux qui ont combattu pour l'indépendance du pays en 1971. Une mesure injuste pour une partie des étudiants bangladais. "Dans chaque école, dans chaque université, il y a des blocages, et les images sont vraiment violentes, explique Tihami, professeur à l'Alliance française dans la capitale, Dacca. Pour les étudiants, il faut enlever ces quotas, il faut donner une chance égalitaire à tout le monde." La mesure est d'autant plus mal vécue qu'au Bangladesh, près d'un jeune sur deux est au chômage.
Un mécontentement généralisé à l'égard du régime
Mais la colère va au-delà, pour Philippe Benoît, chercheur à l'Inalco, l'Institut national des langues et civilisations orientales. Les étudiants manifestent aussi contre le caractère répressif de l'État : "Il y a aussi, je crois, un vif mécontentement contre les violences de ce parti au pouvoir, contre les violences policières. C'est un parti qui en est à son quatrième mandat de cinq ans, donc il est sans discontinuer au pouvoir depuis 2008, à la suite d'élections qui sont considérées comme n'ayant pas été des élections libres."
Amnesty International assure que des vidéos des affrontements de la semaine montraient que les forces de sécurité bangladaises ont eu recours à une force illégitime. Quant à l'ONU, elle appelle toutes les parties à la retenue. "Nous exhortons le gouvernement à garantir un environnement propice au dialogue. Et nous encourageons les manifestants à engager le dialogue pour sortir de l'impasse", dit son porte-parole Stéphane Dujarric, en ajoutant : "La violence n'est jamais une solution". En 2018, des manifestations étudiantes avaient déjà conduit à suspendre le système des quotas dans le pays.
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