Décarbonation de l'industrie : deux ONG demandent à l’État de conditionner les aides publiques à la baisse réelle des émissions de CO2

Réseau action climat et France nature environnement publient la deuxième édition de leur rapport annuel sur la décarbonation de notre industrie en pointant les 50 sites les plus émetteurs de France.
Article rédigé par franceinfo
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ArcelorMittal est l'industriel premier émetteur de gaz à effet en France notament avec son site à Fos-sur-Mer, souligne le rapport des deux ONG. (CLEMENT MAHOUDEAU / AFP)

Le Réseau action climat et France nature environnement demandent mardi 16 juillet à l'Etat de conditionner les aides publiques consenties à l'industrie française à la baisse réelle des émissions de CO2.  Alors que l'industrie française dans son ensemble est responsable de 17,5% des émissions nationales, les 50 sites industriels les plus polluants en France sont responsables à eux seuls de 7,3% des émissions nationales de gaz à effet de serre en 2023.

L'impact environnemental de ces 50 sites ne se limite pas au seul climat, soulignent les auteurs du rapport. Ils sont aussi responsables de pollutions de l'air, de l'eau et des sols pouvant avoir des conséquences graves sur la biodiversité et la santé humaine. ArcelorMittal, leader de l'acier en France, est l'industriel premier émetteur de gaz à effet en France, souligne le rapport. Ses deux sites à Fos-sur-Mer et Dunkerque représentent 16% des émissions de l'industrie française. Derrière, figurent Naphtachimie dans les Bouches-du-Rhône, Total Energies, à Gonfreville (Seine-Maritime), et la Compagnie Pétrochimique de Berre (Bouches-du-Rhône).

"L'industrie doit encore prouver que sa décarbonation est engagée et pérenne"

En 2023, les industries ont réduit leurs émissions de gaz à effet de serre de 7,8% par rapport à 2022. Et les 50 sites pointés par les deux ONG ont diminué leurs émissions de 11% en un an. Une bonne nouvelle, selon le Réseau action climat. Mais cette réduction repose pour moitié sur la baisse de la production de produits tels que le ciment et l'acier. "Ainsi, l'industrie doit encore prouver que sa décarbonation est engagée et pérenne", écrivent les ONG. Mais quelques-uns des 50 sites ont plus émis en 2023 qu'en 2022, comme Saint-Gobain, Lafarge ou encore Yara France, un fabricant d'engrais chimiques.

Le Réseau action climat et France nature environnement rappellent que ces industriels ont signé des contrats avec l'Etat pour recevoir des aides et pouvoir investir dans leur décarbonation. L'actuel gouvernement a prévu une enveloppe de 10 milliards d'euros jusqu'en 2027. Mais "ce soutien public ne doit pas être de l'argent gratuit", préviennent les deux ONG. Elles dénoncent notamment le pari fait par des entreprises sur le captage du carbone en sortie d'usine. Plus d'un tiers des industriels misent sur cette technologie pourtant très couteuse et pas encore éprouvée. Parmi eux, Aluminium Dunkerque, les chimistes de Yara France au Havre ou encore Naphtachimie dans les Bouches-du-Rhône. Les ONG appellent l'Etat à flécher les aides publiques en priorité vers les solutions plus efficaces et moins chères.

Le rapport des ONG pointe particulièrement ArcelorMittal. Selon elles, l'industriel multiplie les infractions environnementales : pollution de l'air, des sols, de l'eau. "Les agissements de l'industriel entraînent des conséquences sur l'environnement et la santé des salariés et riverains de l'usine. Pourtant, il demeure un gros bénéficiaire de financements publics et privés." Ainsi, en janvier 2024, le gouvernement a confirmé une aide d'Etat d'un montant exceptionnel de 850 millions d'euros destinée à la décarbonation du site de Dunkerque. Mais le géant de l'acier dépasse régulièrement les seuils de rejet de particules fines à Dunkerque et Fos-sur-Mer.

Le Réseau action climat et France nature environnement soulignent donc la nécessité de conditionner l'enveloppe de 850 millions à un engagement de l'aciériste à réellement opérer la transformation du site de Dunkerque pour y établir toute la chaîne de production de l'acier vert. "L'effort à venir pour respecter les objectifs climat pour 2030 et 2050 va requérir une mutation de ce secteur digne d'une révolution industrielle, conclut le rapport. À court-terme, l'industrie française va devoir réduire ses émissions annuelles de 37 millions de tonnes de CO2, par rapport au niveau de 2019."

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