Inaction climatique : la Cour européenne des droits de l'homme doit se prononcer mardi sur la responsabilité des États
La Cour européenne des droits de l'homme doit prononcer pour la première fois mardi matin trois décisions très attendues en matière de justice climatique, rapportent France Culture et France Inter. Ces trois décisions portent sur trois affaires distinctes, avec des requérents différents, mais ils reprochent tous à des États leur inaction climatique ou le manque d'ambition de leurs politiques en la matière.
La première affaire est portée par des femmes, retraitées, de nationalité suisse, avec l'association Aînées pour la protection du climat, qui dénoncent les manquements de l'État suisse. La seconde est à l'initiative de l'ancien maire écologiste de Grande-Synthe dans le Nord, Damien Carême, qui attaque l'État français pour inaction climatique.
"À un moment, quand on a affaire à un mur qui ne veut pas reconnaître les choses, il faut tout tenter."
Damien Carême, ex-maire de Grande-Synthe à France Cultureà France Culture
"Quand on a affaire à un État qui refuse ses obligations, la justice doit parler, tranche l'écologiste. Plus on avance dans le temps, plus il y a de l'inaction, plus ça devient dramatique. Et ce qui m'inquiète dans le langage politique, c'est qu'on entend plus parler de lutte contre le changement climatique, mais d'adaptation au changement climatique."
"Ils disent que nos inquiétudes relèvent du fantasme"
L'affaire la plus importante, par son ampleur, est portée par six jeunes portugais qui reprochent à 32 États européens leur inaction climatique. "Ils disent que nous ne sommes pas vraiment affectés par les vagues de chaleur et que nos inquiétudes pour l'avenir relèvent du fantasme", déplore l'une des jeunes, Sofia, 19 ans, interrogée par France Inter. L'origine de leur plainte remonte à 2017, après des incendies violents au Portugal. Ces méga-feux ont fait 120 victimes et ont eu des effets durables sur la santé, avec allergies, troubles du sommeil, ou encore anxiété. Interrogée par France Culture, Katharina, 23 ans, qui dit avoir souffert de troubles respiratoires liés aux fumées de ces incendies, a beaucoup d'espoir : "Je crois que nous avons déjà réalisé une grande partie de ce qui était personnellement mon principal objectif : que 32 gouvernements expliquent leur politique climatique devant la Cour européenne des droits de l'homme. La réalité, c'est qu'ils n'ont aucune défense". "Nous savons que le réchauffement climatique pourrait atteindre près de quatre degrés au cours de notre vie. C'est un futur terrifiant, d'autant que nous assistons déjà à des impacts extrêmes au Portugal, avec seulement un degré de plus. Les gouvernements européens ont le pouvoir de faire bien plus pour réduire leurs émissions", ajoute-t-elle.
Si la CEDH donne raison aux requérants, les États seront invités à modifier leur législation pour se conformer aux engagements des Accords de Paris. Des décisions à la "portée symbolique", qui ne s'accompagneront "pas de mesures coercitives", mais pourront toutefois servir de "fondement à d'éventuelles autres actions de plaignants devant des juridictions nationales", explique à France Culture Vincent Brenot, avocat spécialisé en droit de l'environnement. "On le voit dans tous les dossiers climatiques, les tribunaux interprètent les décisions de la Cour européenne des droits de l'Homme. Ils auraient un jugement venant de Strasbourg sur le climat. Cela renforcerait la position de ceux qui portent ces affaires en justice", précise à France Inter Gerry Liston de l'ONG Global Legal Action Network.
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