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Pollution : la controversée zone à très faible émission du Grand Londres concerne désormais 700 000 automobilistes et neuf millions d'habitants

L'Ultra Low Emission Zone (ULEZ) créée en 2019 est étendue à partir de mardi au Grand Londres. Les conducteurs des véhicules les plus polluants doivent payer 14,60 euros par jour pour y circuler.
Article rédigé par franceinfo
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Des véhicules passent devant un panneau indiquant la zone à très faibles émissions (ULEZ) près de Hanger Lane, dans l'ouest de Londres, le 22 juillet 2023. (JUSTIN TALLIS / AFP)

La zone à très faibles émissions ou "ULEZ" (Ultra Low Emission Zone) de Londres est étendue à partir de mardi 29 août à son agglomération. Jusqu'à présent, 35 000 automobilistes devaient payer les 14,60 euros quotidiens pour accéder à cette zone du centre de Londres, à moins d'opter pour un véhicule moins polluant. Avec l'extension de la zone au Grand Londres, ils seront désormais près de 700 000. Une décision qui fait polémique alors qu'une étude indique que sur les six premiers mois, l'effet global de cette politique aurait réduit la pollution de moins de 3% à Londres.

Benjamin, ingénieur français à Londres, a été prévoyant. Lorsqu'il a acheté sa voiture d'occasion, il s'est assuré qu'elle serait compatible aux restrictions ULEZ. "Je pense que c'est nécessaire d'étendre cette zone, déclare-t-il, et on a quand même eu un certain temps pour se préparer à ça. Pour moi, c'est complètement évident que c'est quelque chose qui doit avoir lieu et je pense que c'est vraiment des bassesses politiques que de jouer sur ce sujet-là".

Créée en 2019, l'ULEZ avait été étendue une première fois en 2021. Elle s'ajoute à la "congestion charge", un péage urbain de 15 livres par jour qui s'applique dans l'ultra-centre à tous les véhicules, afin de réduire le trafic. Cette nouvelle extension de l'ULEZ au Grand Londres concerne les propriétaires de véhicules datant d’avant janvier 2006 pour les voitures sans plomb (norme Euro 4) ou septembre 2015 pour les diesels (norme Euro 6). Au total, cette zone couvrira un territoire regroupant 9 millions de personnes. Pour certains Londoniens comme Jane, heureuse propriétaire d’une Nissan Figaro de 1991, cette politique a un coût : jusqu'à 170 euros par mois. "Je dois payer et ça me dérange vraiment", confie-t-elle.

"J'essaye de faire attention et d'éviter les routes où se trouvent les caméras et quand je ne me fais pas attraper, je suis vraiment heureuse !"

Jane, une Londonienne

à franceinfo


Mais Jane ne pourra plus échapper aux amendes (180 livres, près de 210 euros) très longtemps. Comme tous les Londoniens concernés, elle peut faire une demande d’aide publique pour changer de véhicule. Jusqu’à 2 300 euros pourront être donnés par la municipalité.

"Taxe supplémentaire inutile"

La zone à très faibles émissions a été au cœur des débats politiques de l'été, jugée trop coûteuse par certains pour les classes moyennes en pleine crise du coût de la vie. Du côté des conservateurs comme des travaillistes, le sujet est sensible à un an des élections. Le Premier ministre lui-même s’est prononcé contre cette mesure. Rishi Sunak parle d’une "taxe supplémentaire inutile". Il parle du maire travailliste comme étant "déconnecté des préoccupations des travailleurs acharnés". Les élections générales ont lieu l’année prochaine et le parti au pouvoir, largement devancé dans les sondages, trouve là un moyen de se relancer. D’ailleurs, cet été, il a conservé de peu un siège de député grâce à ce positionnement. La circonscription d’Uxbridge se trouve dans le Grand Londres et les automobilistes mécontents se sont fait entendre dans les urnes.

Si le maire est resté inflexible sur cette mesure, il a dû renoncer à un autre projet : dans l’hyper centre de la capitale, Sadiq Khan ne voulait plus que des véhicules à zéro émission de carbone. Aujourd’hui, il renonce. Car dans son propre camp, cette politique punitive crée des dissensions. Jusqu’au leader travailliste, inquiet des conséquences politiques. Keir Starmer se voit déjà Premier ministre l’année prochaine, il ne veut pas donner de munitions à ses adversaires.

Malgré les critiques, Sadiq Khan campe sur ses positions. Il accusait lundi le Premier ministre Rishi Sunak d’être vu comme celui qui aurait pu sauver des vies, mais qui a refusé. Khan dénonce notamment le manque de financement du gouvernement alors que d’autres villes comme Bristol ou Birmingham bénéficient d’aides de l’Etat pour des initiatives similaires. 

Les effets de la mise en place de l'ULEZ sur la pollution fait elle aussi débat. Si l’on s’en tient à la pollution de l’air, selon un rapport de la mairie de Londres réalisé par l’Imperial College de Londres, les niveaux de dioxyde d’azote, un gaz très nocif pour l’homme, auraient baissé de 21% dans le grand Londres et 46% dans le centre. En ce qui concerne les émissions de CO2, les chiffres sont moins significatifs : 3% de réduction depuis la mise en place de cette zone. Mais la mairie de Londres est accusée d’avoir influencé cette étude : plus de 900 000 euros de financement ont été versés à l’Imperial College par la mairie et des mails entre le bureau de Sadiq Khan et l’un des chercheurs ont révélé des pressions exercées sur les scientifiques pour mieux mettre en avant les effets de l'ULEZ. La mairie met en avant l’argument de la santé publique pour justifier cette nouvelle extension. Selon l’Imperial College, en 2019, 4 000 personnes sont mortes prématurément à cause de la pollution de l’air à Londres.

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