Présidentielle : l'enjeu climatique "devrait irriguer tous les débats" déplore Oxfam, qui interpelle les candidats
Tous les candidats seront invités à débattre en mars par le collectif "L'Affaire du siècle", qui leur lance un message : "Réveillez-vous !", explique sur franceinfo Cécile Duflot, présidente d'Oxfam France.
"L'enjeu climatique devrait irriguer tous les débats", estime jeudi 17 février sur franceinfo la directrice générale d'Oxfam France, Cécile Duflot. Le collectif L'Affaire du siècle dont fait partie Oxfam organise le 13 mars un débat entre candidats à l'élection présidentielle sur la chaîne Twitch de Jean Massiet, faute d'avoir pu convaincre un média de l'organiser. Oxfam fait partie de la centaine d'organisations à avoir signé une tribune dans Le Monde pour appeler à replacer les enjeux environnementaux au cœur de la campagne.
franceinfo : Vous vouliez faire une émission débat sur le climat entre les candidats à l'élection présidentielle : que vous a-t-on répondu ?
Cécile Duflot : On voulait surtout qu'on parle de l'enjeu climatique dans cette campagne. C'est un enjeu qui devrait irriguer tous les débats. Ce n'est pas un sujet à part. On ne peut pas parler aujourd'hui d'économie sans parler des impacts et de la nécessité de transformer l'économie pour répondre à l'enjeu climatique. On ne peut pas parler des migrations, on ne peut parler d'aucun sujet sans les irriguer par cette vision là et les interrogations qu'elle pose. C'est ce qu'on a essayé de faire passer comme message aux chaînes qui organisent traditionnellement des débats, et elles nous ont répondu que ce n'était pas une priorité. On l'a vu d'ailleurs dans les débats et interviews organisées, ce sont des questions en fin d'émission, ça n'a pas été au centre des débats des primaires, à l'exception de celle des écologistes. Autre chose plus importante : "l'Affaire du siècle" a obtenu la condamnation de l'Etat [pour inaction climatique], avec un rendez-vous le 31 décembre 2022. Quelque soit la personne élue le 24 avril, elle sera sous le coup de cette condamnation et on a besoin de savoir ce qu'elle voudra faire et c'est ce qu'on demandera le 13 mars.
Vous faîtes ces critiques à tous les médias ?
On a fait cette analyse avec l'Institut Kantar, qui a analysé le bruit médiatique dans la campagne. Le climat, c'est 2,7% du volume rédactionnel sur 120 médias de différentes origines. Il ne s'agit pas de tel ou tel média, mais globalement, chez franceinfo inclus, le bruit médiatique autour de cette question est très faible. Il est très faible parce que les questions sont souvent peu posées, et parce qu'elles sont mises dans une thématique un peu à part.
"En 2022, si on ne met pas cette question de la transformation de l'économie sous le prisme du climat, on passe à côté de l'histoire."
Cécile Duflot, directrice générale d'Oxfam Franceà franceinfo
On montre à Oxfam à quel point la question des inégalités et la question de la crise climatique sont liées. Ceux qui, en proportion de leurs revenus, payent moins de taxe carbone, ce sont les plus riches. Quand on aborde la question du pouvoir d'achat, les 10% les plus pauvres, ils payent plus de taxe carbone en proportion de leurs revenus. Si on ne lie pas ces deux dimensions, en fait, on fait un faux débat. On passe à côté des sujets qui devraient irriguer les propositions des candidats à la présidentielle.
Le problème du climat, c'est que ce n'est pas palpable ?
On parle du nucléaire, des éoliennes, de souffrance animale, mais ça n'épuise absolument pas le débat. La question de l'énergie ou des sources de production d'énergie, c'est une petite partie du chantier qu'il faut faire pour lutter contre le dérèglement climatique. La condamnation de l'Etat dans le cadre de l'Affaire du siècle montre que les questions agricoles, les questions de transport sont des sujets fondamentaux. On voit bien que ces questions là, par exemple, ne sont pas prises en considération. Ce n'est pas seulement la question de choisir si on veut des éoliennes ou du nucléaire. Un scénario qui respecte l'accord de Paris, il doit s'attacher à tous les secteurs. Quand on parle de ces autres secteurs, quand on parle de pouvoir d'achat, comme vous dites, on ne parle pas de climat. On n'attend pas la fin de la campagne pour faire le bilan. On applique un principe de précaution pour dire : réveillez-vous. C'est un message envoyé aux médias. C'est un message envoyé aux candidats parce qu'il y a un certain nombre de candidats qui mettent pas du tout ces questions là dans campagne. Et c'est aussi pour ça qu'on organise un débat qui aura lieu le 13 mars, où les candidats seront dans un cadre très calme, spécifiquement interrogés sur : qu'est-ce qu'ils vont faire de la condamnation de l'Etat pour l'inaction climatique ? Quelles vont être les mesures qu'ils vont mettre en œuvre en matière agricole, en matière de transports, en matière de transformation du secteur du bâtiment pour répondre à la condamnation ?
Tous les candidats sont invités à votre débat le 13 mars ?
Tous sauf l'extrême droite, car on estime qu'on ne va pas pouvoir imaginer engager une transformation écologique. Si un candidat d'extrême droite devient président de la République, on sera des opposants et non dans le dialogue pour savoir comment on lutte contre le recul du trait de côte, pendant que l'on violente une partie de la population française.
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