Vague de chaleur en décembre : "C'est la marque du réchauffement climatique", estime une climatologue de l'Institut de recherche pour le développement
Le temps s'annonce particulièrement doux samedi 31 décembre avec des températures maximales allant de 6 à 10 degrés de plus que les normales de saison et 2022 est déjà l'année la plus chaude jamais mesurée en France. Pour Françoise Vimeux, climatologue à l'Institut de recherche pour le développement (IRD), ces températures de décembre sont "la marque du réchauffement climatique".
franceinfo : Pourquoi les températures de cette fin d'année 2022 sont-elles si douces ?
Françoise Vimeux : La vague de douceur de cette semaine est due à un phénomène météorologique classique que nous connaissons bien. On a un flux de chaleur qui vient des régions subtropicales, qui rentre par le sud-ouest du territoire métropolitain. Ce phénomène est associé à une entrée d'air humide depuis l'océan Atlantique sur le nord de la France. En fait, ce qui crée cette douceur exceptionnelle, c'est que ce flux de chaleur qui nous arrive du sud est beaucoup plus chaud qu'il y a 20, 30 ou 50 ans. C'est cela donc, la marque du réchauffement climatique. Il y a une augmentation du nombre et de l'intensité des phénomènes météorologiques extrêmes qui est quasiment proportionnelle au réchauffement climatique, et ce partout dans le monde (vagues de chaleur, inondations et vagues de sécheresse).
On remarque donc des températures qui augmentent chaque année ?
Ce qui est assez incroyable, c'est que si on regarde la dernière semaine de 2021, on avait déjà battu un record, celui de la fin d'année la plus chaude jamais observée. Et on se demande, avec les douceurs attendues pour le 31 décembre 2022, si l'on ne va pas de nouveau battre ce record cette année. On est vraiment surpris de voir ces records qui tombent quasiment année après année. Là on parle de la période hivernale, mais c'est la même chose pour l'été : 2022 est l'année la plus chaude jamais enregistrée depuis qu'on a des stations météorologiques. Et on a aussi battu des records cet été 2022 avec 33 jours de vague de chaleur.
L'objectif de limiter la hausse des températures à 1,5 degré d'ici la fin du siècle sera-t-il faisable selon vous ou est-ce déjà trop tard ?
Cet objectif, on peut encore le tenir théoriquement. On sait qu'il faut diminuer les émissions de gaz à effet de serre de 45% d'ici 2030 par rapport à leur niveau de 2019. Mais dans la réalité, on n’est pas du tout sur ces trajectoires. Les émissions de gaz à effet de serre continuent à augmenter au niveau mondial, de l'ordre de 1% par an. Certes, elles augmentent moins vite qu'il y a une décennie, mais elles continuent à augmenter. On n'est pas sur des trajectoires qui nous amèneraient à se maintenir à 1,5 degré à la fin du siècle, mais plutôt aux alentours de 3 degrés. Il faut absolument diminuer drastiquement nos émissions de gaz à effet de serre, et que cet effort soit maintenu dans le temps. Tant qu’on n'aura pas atteint l'objectif de "zéro émission nette", on n’arrivera pas à stabiliser la température de notre atmosphère et celle-ci continuera à augmenter. Et même si on arrête d'émettre tout gaz à effet de serre demain, la température se stabilisera en 20 à 30 ans, donc elle continuera quand même à augmenter. Le réchauffement est aujourd'hui de 1,1 degré par rapport au début du XXe siècle, donc il faut absolument mener de front à la fois l'adaptation et l'atténuation de nos émissions.
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