"La couche d'ozone pourrait être reconstituée d'ici à 2040"
Le 16 septembre se tient la journée de la protection de la couche d'ozone. Pour francetv info, Geir Braathen, de l'Organisation météorologique mondiale, dresse un bilan de santé de cette partie de la stratosphère qui nous protège des rayons ultraviolets.
Pour une fois, les nouvelles du ciel sont bonnes. Alors que se tient, mardi 16 septembre, la journée internationale de protection de la couche d'ozone, un rapport publié le 10 septembre indique que celle-ci montre des signes de reconstitution.
La couche d'ozone, située entre 20 et 50 km d'altitude, protège la Terre des rayons ultraviolets du Soleil. Son affaiblissement nous expose davantage au risque de cancers de la peau, de cataractes et d'atteintes au système immunitaire. Même si la faiblesse de la couche d'ozone n'explique pas à elle seule l'augmentation de ces pathologies durant ces dernières années.
La couche d'ozone devrait, dans nos régions de latitude moyenne, retrouver son niveau de 1980 vers 2050. Francetv info a interrogé le Norvégien Geir Braathen, responsable scientifique au sein de l'Organisation météorologique mondiale (OMM), qui a participé à la remise du rapport d'expertise.
Francetv info : Les experts constatent-ils une réduction du trou de la couche d'ozone ou bien simplement la stabilisation de la situation ?
Geir Braathen : Il faut tout d'abord faire la distinction entre le niveau d'ozone en moyenne latitude – celle de l'Europe et des Etats-Unis notamment [ainsi que de la Chine], où l'on trouve la plus grande part de la population terrestre – et le niveau d'ozone en Antarctique.
Le trou de la couche d'ozone visible en Antarctique n'a pour l'instant pas évolué. Il se forme de la même manière chaque année à la mi-août et jusqu'au mois de novembre environ. Le phénomène est variable d'une année sur l'autre en fonction des conditions météorologiques. Plus il fait froid dans la stratosphère, plus le trou est important.
En moyenne latitude, on constate les premiers signes d'une amélioration. Comme la quantité d'ozone varie d'une zone géographique à une autre, on a réalisé une moyenne schématisée par une courbe. On note désormais que la dégradation s'est arrêtée. Depuis les années 1980 jusqu'à aujourd'hui, nous avions en effet noté un appauvrissement de la quantité d'ozone de l'ordre de 3 à 4%. Aujourd'hui, la reconstitution de l'ozone débute en haute altitude, à 40 km de la surface de la Terre, dans le haut de la stratosphère.
On se souvient des importantes mesures prises à la fin des années 1980. Ont-elles été efficacement appliquées sur l'ensemble de la planète ?
Depuis son adoption en 1987, 196 pays ont signé le protocole de Montréal (Canada). C'est le premier protocole environnemental à atteindre la ratification universelle. Il est respecté par la grande majorité des pays du monde.
Entré en vigueur en 1989, il a interdit certains composés chimiques, notamment les CFC (chlorofluorocarbures) qui appauvrissent la couche d'ozone. Depuis les années 1930, on les utilisait dans de nombreux produits et équipements : les frigos, les aérosols, les extincteurs, la mousse d'isolation, mais aussi pour les nettoyages à sec et en tant que solvant dans les industries de l'électronique. Ces gaz avaient des propriétés très utiles puisqu'ils n'étaient ni inflammables ni toxiques, n'avaient pas de couleur et pas d'odeur. Mais ils avaient des conséquences sur la couche d'ozone.
Après la signature de l'accord de Montréal, ils ont été interdits partout. L'industrie a alors inventé deux sortes de composés pour remplacer le CFC : le HCFC (hydrochlorofluorocarbure) et le HFC (hydrofluorocarbure). Le premier, contrairement au second, a toujours un impact négatif sur l'ozone, bien qu'il reste quand même moins fort que le CFC.
Le HCFC est interdit dans les pays occidentaux, mais reste autorisé dans les pays en développement jusqu'en 2040. Il n'est pas facile de se débarrasser du jour au lendemain de ces composés. Un Fonds multilatéral alimenté par les pays riches permet d'aider ces pays à faire évoluer leur technologie afin de se débarrasser du HCFC.
Par ailleurs, ces deux gaz (HCFC et HFC) ont un gros inconvénient : ils renforcent l'effet de serre et pourraient causer des problèmes climatiques si leur production continue à augmenter (+7% par an actuellement).
Quel bilan tirez-vous du protocole de Montréal ?
C'est un grand succès. Le processus s'est étalé sur plusieurs années. Le premier accord signé en 1987 n'était pas suffisant pour sauver la couche d'ozone, mais il a été renforcé à huit reprises, notamment en 1990 à Londres, en 1992 à Copenhague, en 1999 à Pékin et en 2007 à nouveau à Montréal. Chaque année se tient une réunion des parties qui rassemble l'ensemble des signataires et permet de réfléchir aux mesures supplémentaires à adopter.
Le protocole de Montréal a permis, pour l'heure, de réduire les émissions de substances appauvrissant la couche d'ozone de plus de 90%. Mais au-delà des résultats, cela montre que si on travaille ensemble, si les scientifiques apportent les bases de réflexion, les politiques peuvent ensuite agir de manière efficace. On espère que cela servira d'exemple à la prise en charge d'un défi encore plus grand : celui du changement climatique.
Est-il possible de prévoir la reconstitution totale de la couche d'ozone ?
En se basant sur le protocole de Montréal tel qu'il est appliqué aujourd'hui, on estime que l'ozone présent en latitude moyenne sera reconstituée entre 2040 et 2050. Si on parvient à arrêter la production de HCFC et d'autres substances dans les pays en voie de développement, on pourrait accélérer d'une dizaine d'années la reconstitution de la couche d'ozone. On estime même que l'on retrouvera un niveau d'ozone supérieur à celui de 1980.
Dans l'Antarctique, où le pire a été atteint en 2006, on table plutôt sur 2060 ou 2070. Mais les premiers signes d'amélioration permettant d'indiquer que le trou est en train de se résorber devraient apparaître vers 2025.
En revanche, dans les zones tropicales, on devrait noter un appauvrissement de la couche d'ozone. C'est dans la stratosphère de ces régions chaudes que se forme l'ozone avant de circuler sur le reste de la surface terrestre. On estime qu'à cause du changement climatique, cette circulation va s'accélérer, entraînant un appauvrissement de la couche.
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