Cancers de la prostate liés au chlordécone reconnus comme maladie professionnelle : "Le temps de réponse est trop long", estime un ancien député
"On est 30 ans après l'interdiction française" du chlordécone, souligne Jean-Yves Le Déaut, co-auteur du rapport sur l'emploi des pesticides aux Antilles.
"Le temps de réponse est trop long", estime mercredi 22 décembre sur franceinfo Jean-Yves Le Déaut, ancien député de Meurthe-et-Moselle et co-auteur du rapport Les pesticides aux Antilles, 10 ans de perspective d’évolution (2009), alors qu'un décret publié mercredi reconnaît comme maladie professionnelle les cancers de la prostate liés au chlordécone, un insecticide utilisé dans les bananeraies.
franceinfo : Le chlordécone a été interdit en France en 1990 alors que les États-Unis l'avaient déjà banni en 1976, pourquoi ça a été si long ?
Jean-Yves Le Déaut : Parce qu'on est dans un pays dans lequel l'administration est lente et souvent formée sur le même moule. Le temps de réponse est trop long. Aujourd'hui, on est 30 ans après l'interdiction française et on reconnaît les cancers de la prostate liés à son exposition comme maladie professionnnelle : il faut s'en féliciter mais le temps de traitement des dossiers en France est trop long.
On parle de 90 % des adultes en Guadeloupe et en Martinique contaminés au chlordécone, on sait combien de personnes cela représente ?
Tous ne sont pas contaminés. On utilisait le chlordécone pour lutter contre un insecte dans les bananeraies, le charançon. Quand on a changé de culture, les légumes-racines, très sensibles au chlordécone, ont effectivement été consommés par beaucoup d'adultes pendant une période assez longue. Mais les valeurs sanguines montrent que, dans la plupart des cas, on est en dessous des limites de référence.
"On a un désastre environnemental mais le risque sanitaire lui, est limité aux professionnels qui ont travaillé longtemps dans les bananeraies."
Jean-Yves Le Déaut, ancien député et co-auteur d'un rapport sur les pesticides aux Antillesà franceinfo
Les professionnels doivent d'ailleurs avoir été au contact de ce produit pendant plus de 10 ans pour prétendre à une indemnisation, comment explique-t-on que des cancers de la prostate aient été développés ?
Avec Catherine Procaccia, [co-rapporteur du rapport] nous avions traité ce composé de "monstre chimique". C'est un composé qui peut rester 300 ou 400 ans dans le sol et dans les eaux littorales, donc dans le poisson, avant que la moitié de la molécule ne disparaisse. C'est une molécule qui est persistante et c'est aussi pour cela qu'en parallèle du traitement des risques sanitaires, il faut trouver des moyens de remédiation des sols parce qu'autrement on aura le problème en continu.
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