"Des effets sur le foie et des malformations sur les fœtus" : l’ONG Pesticide Action Network alerte sur la forte présence du "polluant éternel" TFA dans l'eau potable en Europe

Plusieurs associations, qui ont analysé une trentaine d'échantillons d'eau provenant de dix pays de l'UE, alertent sur la présence de l'acide trifluoroacétique (TFA) en Europe. Or, ce dernier est, pour le moment, non pris en compte par la réglementation europenne.
Article rédigé par franceinfo
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Illustration eau du robinet. (MAGALI COHEN / HANS LUCAS via AFP)

Salomé Roynel, chargée de plaidoyer et de campagne pour l’ONG Pesticide Action Network Europe (PAN) demande ce mercredi sur franceinfo que le TFA, substance chimique, soit pris en compte par la réglementation européenne, alors que les eaux européennes sont massivement contaminées par un produit chimique très persistant, l'acide trifluoroacétique (TFA). Le PAN et ses membres, dont Générations Futures en France, a analysé 23 échantillons d'eau de surface et six échantillons d'eau souterraine provenant de dix pays de l'UE, à la recherche de ce produit.

Salomé Roynel alerte sur "des effets sur le foie et des malformations sur les fœtus" provoqués par les TFA qui peuvent être issus de la dégradation de pesticides PFAS. La chargée de plaidoyer et de campagne du PAN Europe plaide pour "soutenir" des alternatives "qui sont notamment appliquées par le secteur du bio".


franceinfo : Quelle est la dangerosité de l'acide trifluoroacétique (TFA) ?

Salomé Roynel : Sa dangerosité pour la santé humaine n'a été que très récemment investiguée. Et ce qu'on constate, ce sont des effets sur le foie et des malformations sur les fœtus, à des niveaux relativement élevés, mais sur la base de données relativement limitée. On parle de niveaux relativement variés selon les échantillons auxquels on s'intéresse, mais qui sont à une moyenne de 74 nanogrammes par litre, mais qui est largement dépassée par notre échantillon parisien qui s'élevait à plus de 2 000 nanogrammes par litre. C'est très peu parce que, si on se fie au contexte actuel, ça représente 110 gouttes diffusées dans une piscine olympique. Et en même temps, pour ce type de substances, on a régulièrement des alertes scientifiques sur leurs effets à doses très minimes. Donc ce sont des informations qu'il faut prendre avec beaucoup de précautions et de vigilance. 

Votre étude montre que cette substance, le TFA, se trouve plus à Paris qu'à Salzbourg en Autriche ou Potsdam en Allemagne. Comment est-ce qu'on explique la présence de ces produits ? 

Il y a différents facteurs qui entrent en ligne de compte. Principalement, quand on s'intéresse aux eaux potables, ça dépend du réseau de distribution et donc de la provenance des eaux. En ce qui concerne Paris, notre échantillon provenait à la fois d'un mélange d'eau de la Marne, de la Seine et de la Vanne. Donc ce qu'on peut présumer, c'est que ce sont ces cours d'eau qui sont eux aussi très contaminés. En ce qui concerne la Seine, on le savait déjà d'une étude préalable. En ce qui concerne Salzbourg, il est possible que les échantillons proviennent de puits plus profonds. 

Les taux paraissent très faibles. Mais derrière, il y a l'effet cocktail. Est-ce que ce n'est pas quasiment impossible à mesurer ?

Ce qu'on constate dans le cadre de notre étude, c'est que la présence du TFA est à mettre en perspective avec celle d'autres polluants éternels et avec d'autres substances chimiques, d'autres résidus de pesticides. Et ce sont des effets qui, ensemble, peuvent potentiellement créer des effets décuplés ou nouveaux par rapport à ce qui a été anticipé par les régulateurs. Donc effectivement, ce sont des choses à prendre relativement au sérieux. 

Les TFA ne sont pas surveillés par les autorités. L'Europe a changé sa réglementation et à partir de 2026, vingt PFAS seront contrôlés. Est-ce que vous appelez l'Europe à prendre en compte ces fameux TFA ?

Effectivement, pour l'instant, le TFA ne fait pas partie des substances qui sont particulièrement surveillées. Mais c'est une de nos grandes demandes que cela change et que progressivement les autorités puissent disposer de données à partir desquelles elles pourront se saisir du problème et fixer des limites. Ce qu'on demande, c'est que le TFA soit coupé à sa source. Et l'une de ses principales sources, ce sont les pesticides PFAS. Il existe des alternatives aujourd'hui, entre autres des alternatives qui sont notamment appliquées par le secteur du bio. Ce sont des secteurs à soutenir pour permettre cette transition et garder une eau potable sûre pour les prochaines générations. 

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