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Elections législatives en Pologne : l'exonération fiscale totale pour tous les jeunes, une mesure qui fait polémique

Les Polonais sont appelés aux urnes dimanche. L'une des mesures proposées par le parti au pouvoir est clairement destinée à attirer les jeunes.

Article rédigé par franceinfo - Marie-Pierre Vérot, édité par Noémie Bonnin
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Des Polonais votent pour les élections législatives à Maruszyna, dans le sud du pays, le 13 octobre 2019. (GRZEGORZ MOMOT / PAP)

"C'est intéressant, car jusqu'à présent, il n'y a jamais eu de réforme qui concerne spécialement les jeunes", confie Dominika, une jeune informaticienne. Elle apprécie la mesure proposée par le parti au pouvoir en Pologne, le PiS ("Droit et Justice") pour les élections législatives organisées dimanche 13 octobre : l'exonération fiscale totale pour tous les jeunes de moins de 26 ans.

Le parti conservateur de Jaroslaw Kaczynski caracole en tête dans les sondages, qui lui promettent au moins 40% des voix. Il a multiplié les cadeaux durant cette campagne, sans oublier aucune catégorie.

Cette exonération fiscale (qui pourrait coûter deux milliards et demi de zlotys, soit plus de 500 millions d'euros), la Pologne peut se le permettre : l'économie fait preuve d'une insolente santé, la croissance flirte avec les 5%, l'endettement est contenu, le chômage également... Une ombre au tableau toutefois : les jeunes Polonais continuent de s'expatrier. Et la main d'œuvre manque. C'est pour les inciter à rester au pays que le PiS les exonère d'impôt sur le revenu, jusqu'à leurs 26 ans. "Moi, cela me fait gagner 300 zlotys de plus chaque mois, c'est environ 80 euros", poursuit Dominika, la jeune informaticienne. Ce n'est pas négligeable. Mais pas assez pour convaincre quiconque de rester."

Une mesure politique à l'efficacité économique mise en doute

C'est ce que relèvent tous les économistes : l'effet sur le marché du travail devrait être limité. C'est ce qu'explique Maciej Witucki, de la confédération patronale Lewiatan : "Je ne pense pas que l'exonération de ces jeunes va arrêter l'émigration vers l'Europe occidentale. Les salaires à Londres sont quatre ou cinq fois plus élevés qu'à Varsovie. Les médecins continuent à apprendre la langue suédoise en parallèle de leurs études de médecine."

C'est plus une mesure politique pour un électorat jeune pour les attirer vers les partis au pouvoir, mais l'impact économique ne sera pas énorme.

Maciej Witucki

à franceinfo

De son côté, l'opposition dénonce une guerre déclarée aux grandes villes qu'elle dirige. L'objectif du gouvernement serait de les étrangler financièrement. Car la moitié de l'impôt sur le revenu abonde directement les caisses des collectivités locales. L'exonération fiscale des jeunes constitue donc un manque à gagner non négligeable qui va peser sur les investissements. Le gouvernement promet certes de compenser par des dotations, mais les opposants ont peu d'espoir d'en voir la couleur.

Pour Varsovie par exemple, c'est 115 millions de zlotys en moins, l'équivalent de son budget social. Comment continuer à investir dans les transports, la lutte contre la pollution, les écoles, se demande le maire de Varsovie, Rafał Trzaskowski : "Ce sera vraiment très difficile de réaliser toutes les promesses qu'on a faites pendant la campagne électorale. C'est exactement le but du gouvernement, de dire 'on réalise nos promesses électorales, mais le gouvernement local est complètement inefficace'."

Si le parti au pouvoir rafle la mise lors des législatives, ajoute-t-on dans les rangs de l'opposition, plus rien ne l'empêchera d'intensifier ses réformes controversées de la justice et de poursuivre la mise au pas des collectivités locales. Une mise sous tutelle progressive mais inexorable, dont le PiS espère engranger les fruits lors des prochaines municipales en 2023.

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