La Bulgarie, autre porte d’entrée pour le djihad en Syrie
Jusqu’à présent, les candidats djihadistes se contentaient de prendre un vol pour la Turquie. Mais le renforcement de la surveillance des aéroports euroépens commes turcs les a conduits à emprunter la voie terrestre. «Il est toujours aussi facile d'entrer en Turquie par la mer et par la route», assurait récemment un diplomate européen en poste à Ankara.
Une carte d’identité suffit pour traverser l’Europe par la route, parfois sans sortir de la zone Schengen, jusqu’à la Bulgarie, qui dispose d’une frontière de 275 kilomètres avec son voisin turc. Certains de ces voyageurs discrets arrivent en Bulgarie après avoir pris en Autriche un premier bus pour la Hongrie, et de là un autre pour Sofia, une manière d'effacer leurs traces à chaque étape, selon Tsvetan Tsetanov, un ex-ministre bulgare de l'Intérieur.
La France avait alerté la Bulgarie sur le cas de Fritz-Joly Joachin, un Français de 28 ans, soupçonné de liens avec Chérif Kouachi, l'un des auteurs de l'attentat du 7 janvier contre Charlie Hebdo.
Joachim avait été arrêté le 1er janvier 2015 par la douane bulgare, alors qu'il tentait de franchir la frontière turque à bord d'un bus, soupçonné par son épouse d'avoir enlevé leur fils de 3 ans pour l'emmener dans les zones tenues par les djihadistes en Syrie.
Un autre Français, Flavien Moreau, converti à l’islam, avait été lui aussi été interpellé en janvier 2013 dans un village frontalier en compagnie d'un passeur. Ce jeune Nantais avait pris successivement des vols Francfort - Vienne et Vienne - Sofia pour tenter de brouiller les pistes afin de regagner en vain la Syrie où il avait déjà séjourné.
«Contrôles systématiques»
Gilles de Kerchove, le coordinateur de la lutte antiterroriste de l'UE, a recommandé la mise en place de «contrôles systématiques», après une visite discrète le 9 janvier 2015 à Sofia.
Les pièces d'identité de chaque passager sont déjà systématiquement comparées aux bases de données du système d'information Schengen. Mais la police bulgare demande à être alertée par les pays d'origine afin de pouvoir arrêter les suspects. Sur ce point notamment, le ministre bulgare Voutchkov, réclame «un échange d'information plus sérieux».
A Istanbul aussi, une source gouvernementale met en garde les Européens sur «les graves problèmes de partage de renseignements entre les pays européens». Le repérage des candidats au jihad est mieux à même d'être traité «par les pays d'origine que par les pays de transit», souligne cette source.
Ce sujet sensible a donné lieu à des discussions dans la capitale bulgare auxquelles ont participé John Kerry, le chef de la diplomatie américaine, mais aussi son homologue britannique Philip Hammond, et le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg.
Depuis plusieurs mois, les cars reliant la capitale bulgare à Istanbul par la route, en huit heures, «sont passés au scanner» au principal poste-frontière de Kapitan-Andréevo, a affirmé une responsable de la société Metro, principal opérateur de la ligne.
Un membre français des services antiterroristes reconnaît une coopération «parfaite» avec la Bulgarie, «aujourd'hui aux standards de l'UE». Le 17 décembre 2014, l'agence d'Etat pour la sécurité nationale bulgare (SANS) avait annonçé l’arrestation de trois candidats au djihad: deux Marocains et un Brésilien. Tous trois cherchaient à se rendre en Syrie.
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