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Quel avenir pour le Brexit ? Voici cinq scénarios possibles pour le Royaume-Uni avec le nouveau vote des députés

La Chambre des communes doit voter sur les amendements au "plan B" de Theresa May, mardi. Ce scrutin, très incertain, pourrait largement changer la donne à deux mois du Brexit.

Article rédigé par franceinfo
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Une manifestation anti-Brexit devant le Parlement britannique, à Londres, le 27 janvier 2019. (DANIEL LEAL-OLIVAS / AFP)

Une course contre la montre s'est engagée. Londres n'a plus que deux mois pour sortir de l'impasse, après le rejet massif du projet d'accord sur le Brexit, mi-janvier. Les députés britanniques doivent se prononcer, mardi 29 janvier, sur sept amendements déposés après que Theresa May n'a finalement pas présenté de "plan B" aux parlementaires. L'objectif : trouver une solution pour éviter un divorce brutal entre le Royaume-Uni et l'Union européenne, le Brexit étant pour l'instant programmé pour le 29 mars, à minuit (heure de Bruxelles). Le résultat du scrutin est toutefois incertain, car les élus sont divisés. Voici cinq issues possibles à cette session cruciale au Parlement britannique.

1La Chambre rejette l'idée d'un "no deal" (même s'il reste possible)

Un amendement transpartisan a été déposé par la conservatrice Caroline Spelman et le travailliste Jack Dromey. Il prévoit tout simplement d'exclure la possibilité d'un Brexit sans accord. Selon le Telegraph (en anglais), ce texte est "le plus populaire" de la dizaine déposée. Il a le soutien de nombreux députés, assure le quotidien britannique.

Problème : cet amendement n'aurait absolument aucun pouvoir juridique car la date du 29 mars est fixée par l'article 50 du traité de Lisbonne, qui établit les conditions de sortie d'un Etat de l'UE, rappelle la BBC (en anglais). Pour contourner cette échéance, le Royaume-Uni peut uniquement demander un délai supplémentaire à l'UE (une extension doit être approuvée à l'unanimité par les 27) ou annuler le Brexit. S'il est approuvé, l'amendement de Caroline Spelman servirait donc seulement à accentuer la pression sur Theresa May dans l'espoir qu'elle change de stratégie, par exemple en demandant un report de la sortie de l'UE.

2Le Royaume-Uni demande un report du Brexit

Trois amendements vont en ce sens. Le premier, déposé par la travailliste Yvette Cooper, permettrait au Parlement de "reprendre partiellement la main sur l'agenda parlementaire" à partir du 5 février, explique Le Figaro. En clair, les députés pourraient voter une loi leur permettant de reprendre le contrôle sur le processus du Brexit. Theresa May aurait alors jusqu'au 26 février pour faire trouver un accord sur le Brexit. En cas d'échec, la Chambre des communes contraindrait le gouvernement à demander une extension de l'article 50 jusqu'au 31 décembre.

L'amendement pourrait être soutenu par les travaillistes mais aussi par des Tories rebelles ou encore des centristes du parti LibDem, estime le Telegraph. L'issue du vote est toutefois incertaine. D'autant plus que le leader du Labour, Jeremy Corbyn, n'avait pas toujours pas donné de consigne claire sur cet amendement lundi soir, indique le Guardian (en anglais).

Le deuxième amendement, déposé par Rachel Reeves, prévoit de demander une extension de deux ans de l'article 50 si aucun accord n'est trouvé d'ici le 26 février. Il est soutenu par des députés europhiles issus de plusieurs partis, précise le quotidien britannique (en anglais). Enfin, un troisième texte soumis par les partis nationalistes gallois et écossais appelle à la fois à un report du Brexit, sans préciser de délai, et au rejet d'un éventuel "no deal".

3Theresa May doit renégocier le "backstop"

Le conservateur Graham Brady a présenté un amendement proposant que le Parlement adopte l'accord sur le Brexit de Theresa May (largement rejeté le 15 janvier dernier), à condition que la Première ministre renégocie la clause sur le "backstop" ("filet de sécurité", en anglais). Cette mesure garantit qu'il n'y aura pas de retour à une frontière physique entre l'Irlande du Nord et la République d'Irlande. Elle irrite toutefois les Brexiters convaincus et les députés unionistes nord-irlandais, qui redoutent qu'elle ne conduise à un arrimage permanent du Royaume-Uni à l'Union européenne.

S'il est adopté, l'amendement permettrait à la Première ministre de retourner à Bruxelles avec l'assurance de pouvoir faire accepter un accord par son Parlement, à condition que les 27 reviennent sur le "backstop". Theresa May aurait donc, en théorie, plus de poids dans les négociations. Tout projet d'accord doit toutefois être validé par l'Union européenne, note le HuffPost. Or l'UE a réaffirmé, lundi 28 janvier, qu'elle n'accepterait pas de rouvrir les discussions sur le texte.

Theresa May a annoncé lundi que l'amendement de Graham Brady avait le soutien du gouvernement, rapporte le Guardian (en anglais). Elle a donc demandé aux députés conservateurs d'approuver le texte, mais un écueil persiste. Les membres du Groupe européen de recherche (des conservateurs eurosceptiques) ont déjà annoncé qu'ils voteraient contre et le parti unioniste nord-irlandais (allié des Tories et dont le vote est essentiel pour obtenir la majorité) hésite toujours, selon la BBC (en anglais).

4 Les parlementaires font de nouvelles propositions sur le Brexit

Le conservateur Dominic Grieve propose lui aussi que le Parlement prenne la main sur l'agenda parlementaire, mais seulement un jour par semaine d'ici le 26 mars. Cela permettrait aux parlementaires d'inscrire à l'ordre du jour et de débattre de nouveaux amendements sur le Brexit, précise la BBC (en anglais). Ces propositions ne seraient pas contraignantes mais elles maintiendraient la pression sur Downing Street, dans l'espoir que l'exécutif les intègre à son "plan B".

Selon le Telegraph, le gouvernement ne devrait pas soutenir ce texte, pour ne pas perdre le contrôle du processus du Brexit. Mais l'amendement a déjà le soutien de certains membres des partis travailliste, LibDem, SNP (nationalistes écossais), Plaid Cymru (nationalistes gallois) et de Tories opposés au Brexit. En théorie, il a donc des chances d'être approuvé.

Le chef de file des travaillistes, Jeremy Corbyn, a par ailleurs déposé un amendement qui permettrait au Parlement d'étudier les différentes options empêchant un "no deal". Parmi les idées suggérées : négocier une union douanière permanente avec l'UE (une proposition défendue par le Labour) ou organiser un second référendum sur le Brexit, détaille le Telegraph. Les députés seraient appelés à voter sur ces propositions.

L'amendement de Jeremy Corbyn, uniquement soutenu par les travaillistes, a peu de chance de passer. Le parti nationaliste écossais SNP et les LibDem, opposés au Brexit, ne devraient pas le soutenir, analyse le Telegraph. Pas plus que les Tories, qui refusent de soutenir une initiative du principal opposant à Theresa May. 

5Le Royaume-Uni reste dans l'impasse

Le HuffPost envisage une dernière issue au vote prévu mardi : aucun amendement n'est approuvé. A très exactement deux mois de la date prévue du Brexit, le Royaume-Uni serait donc de retour à la case départ et verrait le risque de "no deal" se renforcer.

Dans ce cas de figure, les scénarios sont nombreux et semblent tous plus incertains les uns que les autres. Theresa May changerait-elle radicalement de stratégie ? La Chambre des communes obtiendrait-elle un report du Brexit ? L'UE accepterait-elle de revenir sur le "backstop" par peur du "no deal" ? Les députés approuveront-ils le projet d'accord de Theresa May tel qu'il a été proposé à l'origine ?

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