Guerre en Ukraine : "Qui va s'occuper des réacteurs ?", s'inquiètent les salariés de la centrale nucléaire de Zaporijia, sous contrôle russe
Selon les salariés ukrainiens de la centrale occupée par les Russes que nous avons rencontrés, le risque d’accident ne peut pas être écarté.
Il y a encore deux jours, Dmytro était responsable des installations électriques de la centrale nucléaire de Zaporijia, dans le sud de l'Ukraine, avant de s'enfuir. Sur ce site – le plus grand d'Europe – contrôlé par les forces russes depuis trois mois, il décrit une atmosphère de surveillance généralisée, de paranoïa avec des arrestations et des disparitions de salariés qui menacent la sécurité de la structure. Il en a répertorié près de 500 : "Si la pression continue et si les gens disparaissent ou sont obligés de partir, qui va s'occuper des réacteurs ?"
"Les militaires, ils ne savent pas comment faire. Et les ingénieurs qui restent sont obligés de penser à leur survie."
Dmytro, responsable des installations électriquesà franceinfo
"Quand l'administration de la centrale demande des comptes au sujet d'un ingénieur enlevé, les Russes répondent : 'Vous avez des questions à lui poser ? Non ? Parce que nous, nous en avons'. À mon avis, c'est très, très dangereux."
L'Ukraine, par la voix d'Energoatom, l'opérateur ukrainien des centrales nucléaires, a annoncé mardi 7 juin qu'elle s'opposerait à ce que l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) vienne inspecter le site de Zaporijia tant qu'il serait occupé par l'armée russe. Le gouvernement craint que l'AIEA, dont la direction est composée pour un quart de Russes, ne légitime l'occupation du site. Ce qui ne faciliterait pas la collecte d'informations
Inquiets pour la sécurité de la centrale, les salariés sont aussi, depuis le début de la guerre, confrontés à un manque de matériel. Les pièces ne sont pas toujours renouvelées et les contrôles aléatoires. Olena était responsable de la logistique. Elle a quitté il y a quinze jours ce qu'elle appelle désormais "les territoires occupés" : "Un exemple simple : les ampoules. Nous n'en avons pas. On ne sait pas où les acheter. Les livraisons du fournisseur se sont arrêtées. C'est la même situation pour le reste du matériel."
"Si on ne fait pas attention à l'entretien et au contrôle de la structure, si quelque chose est en panne et si la réparation n'est pas faite, évidemment, c'est compliqué."
Olena, responsable de la logistique de Zaporijiaà franceinfo
Dmytro et Olena pointent un troisième dysfonctionnement. Rosatom, le géant russe du nucléaire, et Energoatom en Ukraine n'ont pas les mêmes méthodes. Il y a, selon les deux salariés, un risque à changer un savoir-faire éprouvé depuis plus de 30 ans.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.