"Nous ne sommes plus un pays neutre" : comment les Finlandais ont basculé en faveur de l'Otan
Le président finlandais vient d'annoncer son souhait d'adhérer à l'Organisation du traité de l'Atlantique nord. Le contexte de la guerre en Ukraine a renforcé l'idée dans le pays que la Russie est une réelle menace. Même si quelques voix opposées s'élèvent.
Souvent désignée comme le pays le plus heureux du monde, la Finlande se fait du souci pour sa sécurité. Depuis le début de la guerre en Ukraine, elle a le regard tournée vers son voisin russe. Les deux États ont près de 1 300 km de frontière commune et les sondages traduisent une inquiétude grandissante. Pendant des années, les Finlandais favorables à une adhésion à l'Otan étaient minoritaires – 20 à 30% – mais depuis plusieurs semaines, c'est tout l'inverse. Les partisans d'une adhésion représentent maintenant trois quart de la population. C'est donc avec le soutien de son peuple que le président finlandais a annoncé, jeudi 12 mai, son désir d'adhérer "sans délai".
"La priorité c'est la sécurité de la Finlande"
Ioanna, 47 ans, assistante sociale, fait partie de celles et ceux qui ont récemment changé d'avis. Elle estime que la Finlande est un pays trop petit pour se défendre lui-même : "La neutralité de la Finlande nous convenait bien avant, mais là, la Russie est hors de contrôle et la Finlande n'a pas d'autre choix que de rejoindre l'Otan." "La priorité c'est la sécurité de la Finlande", abonde Atte Harjanne, député vert finlandais qui défend depuis longtemps l'entrée de son pays dans l’Organisation du traité de l’Atlantique nord.
L’élu écologiste était l'un des rares à prendre cette position dans sa famille politique. Mais tout a changé, dans son parti comme dans la société. Un basculement, raconte ce membre de la commission de Défense du Parlement : "Nous avons longtemps pensé que nous pouvions maintenir une relation constructive avec la Russie, mais après ce qui s'est passé en Ukraine, je pense qu'une majorité de Finlandais a perdu toute confiance en la Russie. Et nous avons vu le soutien à une adhésion à l'Otan monter en flèche. Nous ne sommes plus un pays neutre, nous faisons partie de l'Union européenne. Nous avons soutenu l'Ukraine en lui livrant des armes."
"Nous sommes un État souverain, nous avons le droit de choisir nos partenaires. Mais je tiens à souligner que rejoindre l'Otan est un acte purement défensif. Nous ne menaçons personne".
Atte Harjanne, député écologiste finlandaisà franceinfo
Véronika Honkasalo, députée de l'Alliance de gauche finlandaise, n'est pas du tout prorusse, elle tient à le souligner. Elle dénonce le régime autoritaire de Vladimir Poutine mais fait partie des élus opposés à l'idée de voir la Finlande rejoindre l'Otan : "L’adhésion à l'Otan va accélérer la militarisation, va exacerber les tensions dans la région de la mer Baltique et je crains que le parapluie nucléaire de l'Otan légitime la doctrine des armes nucléaires."
L'élue de gauche poursuit : "Même ceux qui défendent une adhésion à l'Otan soulignent le fait que cela pourrait être perçu comme une provocation et que nous devons être préparés à tous types de menaces, notamment à la frontière Est. Nous avons une tradition de non-alignement depuis si longtemps et soudainement, trop rapidement, nous réalisons un changement fondamental."
"Quel genre de membre de l'Otan serons-nous ? Allons-nous permettre à des troupes de stationner sur notre territoire ? Ou des armes nucléaires ? J'ai peur que cette adhésion accroisse les tensions."
Véronika Honkasalo, députée de l'Alliance de gauche finlandaiseà franceinfo
Pas de signe d'escalade militaire à la frontière russo-finlandaise pour l'instant. Mais, selon le ministère de la Défense finlandais, la semaine dernière un hélicoptère russe a violé l'espace aérien finlandais, deuxième incursion de ce genre en un mois.
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