: Vidéo Quand les mobilisés russes interpellent Vladimir Poutine pour se plaindre d’être "envoyés au massacre"
Depuis le début du mois de février, des vidéos apparaissent sur les réseaux sociaux russes. Elles témoignent tant de la violence des combats sur le front ukrainien, que du moral et de la duplicité qui peuvent régner dans les rangs de l'armée russe.
Toutes mettent en scène des soldats mobilisés qui se plaignent d'être envoyés au combat dans des conditions d'impréparation et de désorganisation telles qu'elles ne leur laissent que peu de chances de survie.
"Envoyés à l'assaut sans aucun soutien"
Un autre élément commun à ces vidéos, dont franceinfo a visionné une dizaine, est que ces soldats dénoncent le fait qu'ils ont été versés dans les rangs des forces séparatistes des Républiques de Lougansk et de Donetsk, tels ces soldats originaires d'Irkoutsk, Novossibirsk et Krasnoïarsk, qui ont enregistré un message adressé directement à Vladimir Poutine diffusé le 7 mars sur une chaîne Telegram sibérienne. "Nous avons été transférés à la première brigade slave de la République populaire de Donetsk et envoyés à l'assaut de zones fortifiées sans aucun soutien d'artillerie ni équipement lourd. En bref, nous sommes envoyés au massacre sous les tirs de mortier, d'artillerie et de mitrailleuses lourdes", explique l'un des hommes cagoulés apparaissant sur la vidéo tournée dans ce qui ressemble à un sous-sol.
Dans une autre vidéo très similaire, publiée quelques jours plus tôt, des mobilisés originaires de Kaliningrad, Mourmansk et Arkhangelsk se plaignaient également d'être "envoyés à l'assaut sans contacts avec les commandants des unités, sans appui-feu, ni […] soutien d'artillerie et reconnaissance aérienne". Surtout, ces soldats demandent au Président russe d'intervenir "de toute urgence, car des mesures punitives sont en préparation contre [eux]". Le porte-parole des soldats affirme que ses supérieurs promettent de les "enfermer dans des caves, de mener des interrogatoires individuels et de trouver les rebelles". De nombreux cas d'arrestations arbitraires de soldats russes enfermés dans des caves ont déjà été documentés par la chaîne Telegram Astra qui a publié des vidéos en attestant.
"Vous êtes sacrifiables et vous allez mourir"
D'après ce groupe de mobilisés du nord de la Russie, six d'entre eux sont morts dans une tranchée dès le premier assaut. Comme les soldats originaires de Sibérie, ils expliquent que les officiers des forces séparatistes les ont déclarés "sacrifiables" et leur ont "annoncé qu'ils allaient mourir". Ils demandent donc à être réintégrés dans l'armée régulière russe en qui ils semblent avoir plus confiance. D'après un expert militaire, cité par le média russe 7X7, les forces séparatistes, qui manquent d'hommes sur place, sont effectivement susceptibles de maltraiter ces soldats issus de régions lointaines.
Un autre point commun à la plupart de ces vidéos est la stratégie du mensonge de l'encadrement de l'armée russe dont semblent avoir été victimes ces hommes. La plupart d'entre eux affirme qu'on leur a expliqué qu'ils seraient cantonnés à des tâches de deuxième voire troisième ligne, comme ces soldats sibériens qui pensaient qu'ils allaient "surveiller les installations et assurer la défense du territoire" et qui se retrouvent utilisés "en sections d'assaut sans entraînement ni préparation". "Certains de ces hommes sont en surpoids, âgés de plus de 50 ans et absolument incapables d'assumer de telles missions", expliquait la femme de l'un d'entre eux récemment sur une autre chaîne Telegram.
Les autorités locales réagissent
Face aux plaintes des mobilisés et de leurs familles, les autorités régionales sont parfois dans l'embarras quand les proches viennent leur réclamer des explications, tant ces témoignages tranchent avec les promesses rassurantes qui leur avaient été faites initialement. Les élus locaux se sentent donc obligés de répondre aux plaintes. Le gouverneur de Belgorod a ainsi annoncé qu'il allait contacter le ministère de la Défense. Le chef de la région d'Orenbourg a saisi le procureur militaire. Le gouverneur d'Irkoutsk a même envoyé une "commission spéciale", composée de vétérans, dans la région de Donetsk, afin d'examiner la situation des mobilisés. On en ignore les conclusions pour l'instant. Dans les mois précédents, des initiatives similaires n'ont pas semblé changer fondamentalement la situation des soldats russes sur le front. Quant à Vladimir Poutine, il n'a jamais répondu directement à ces interpellations.
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