Avant Cologne, la police suédoise avait caché une vague d'agressions sexuelles
Au total, 38 agressions sexuelles ont fait l'objet de plaintes lors des deux dernières éditions d'un festival de musique organisé à Stockholm. A l'époque, la police n'en avait pas dit un mot.
La révélation fait grand bruit en Suède, quelques jours seulement après les violences commises à Cologne (Allemagne) durant la nuit du Nouvel an. La police suédoise a reconnu, lundi 11 janvier, avoir gardé pour elle des informations sur des dizaines d'agressions sexuelles qui auraient impliqué des étrangers lors d'un festival de musique en 2014 et en 2015.
"Ils ont commencé à nous tripoter, ils nous encerclaient"
Au total, 38 agressions sexuelles, dont deux viols, ont fait l'objet de plaintes lors des deux dernières éditions de We Are Sthlm, un festival qui se déroule à Stockholm, la capitale, en août et se présente comme l'un des plus grands d'Europe. Selon les documents consultés par Reuters, 20 plaintes pour des agressions sexuelles ont ainsi été recensées en 2015, dont 14 concernaient des jeunes filles de moins de 15 ans.
"Quand on est entré dans la foule, ils ont immédiatement commencé à nous tripoter, raconte l'une des victimes, Anna, citée par Libération. Ils nous encerclaient, une de mes copines est tombée par terre et ils se sont jetés sur elle. Ils se moquaient qu’on dise non ou qu’on ait un petit ami."
Pas un mot de la police à l'époque
Dans un premier temps, un porte-parole de la police, interrogé par l'AFP, a évoqué près de 100 arrestations en lien avec ces agressions, avant d'affirmer plus tard que leur nombre exact n'avait pas été établi. Pourtant, à l'époque, la police avait affirmé qu'il y avait eu "relativement peu de délits et de personnes interpellées comparé au nombre des participants".
Nous aurions certainement dû révéler cette information, ça ne fait pas de doute. Pourquoi ça ne s'est pas fait, nous ne le savons tout simplement pas.
Dagens Nyheter (en suédois), le quotidien par lequel le scandale a été rendu public, a affirmé que les agresseurs présumés étaient en majorité des demandeurs d'asile mineurs non accompagnés. Selon un rapport de police, cité par le journal, les soupçons lors d'une des deux éditions du festival s'étaient portés sur un groupe d'une cinquantaine d'adolescents afghans.
"C'était un mode opératoire que nous n'avions jamais vu auparavant, explique Roger Ticoalu, responsable des événements à la ville de Stockholm, cité par le Guardian (en anglais). Dans les cas où nous avons pu appréhender des suspects, ils étaient d'origine étrangère, des réfugiés de 17 à 20 ans, arrivés récemment en Suède sans leurs familles."
L'extrême droite s'empare de l'affaire
Ces révélations interviennent dans un contexte politique particulier, alors que 163 000 demandeurs d'asile sont arrivé l'année passée en Suède. Le pays, qui fait face à la montée de l'extrême droite, a depuis renforcé ses contrôles aux frontières avec le Danemark. Le fait que la police n'ait pas informé le grand public est "un problème de démocratie" pour la Suède, a affirmé le Premier ministre Stefan Löfven
Parfois nous n'osons pas dire les choses parce que nous pensons que cela ferait le jeu des Démocrates de Suède [le parti d'extrême droite].
"Si nous faisons un signalement, par exemple, nous ne pouvons pas présenter une description qui, de la moindre manière, risque d’être comprise comme si nous ciblions un groupe particulier, assure ce responsable policier. Cela prend beaucoup trop de temps et d’énergie de nous défendre contre des accusations de racisme et de fascisme." De manière générale, la police "essaye d'éviter d'évoquer l'appartenance ethnique" des suspects, confirme le directeur de la police nationale, Dan Eliasson.
Une "enquête interne" ouverte
Le leader des Démocrates de Suède, la principale formation d'extrême droite, Jimmy Åkesson, a réclamé depuis la tête de Dan Eliasson, explique Libération. Il s'insurge qu’il puisse y avoir "un problème au sein de la police, qui consiste à cacher un certain type de criminalité, pour ne pas profiter à un parti politique".
Lors d'une conférence de presse, Dan Eliasson, a assuré que l'affaire ferait l'objet d'une "enquête interne" susceptible de déboucher sur des sanctions. Le directeur de la police nationale n'a cependant rien révélé sur l'état d'avancement de l'enquête, estimant qu'il n'était "pas facile d'enquêter" sur des faits de cette nature, commis au milieu d'une foule dense.
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