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Exode des civils en Irak : "C'est la conversion, l'exil ou la mort"

En Irak, des dizaines de milliers de chrétiens et de Yazidis sont poussés à fuir face à l'avancée des extrémistes sunnites. Dossier spécial sur France Info : retrouvez nos invités, témoignages, reportages.
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  (Des Yazidi poussés à fuir à Sinjar à l'ouest de Mossoul © REUTERS / Ari Jalal)

9h15 - "60 enfants morts de soif depuis dimanche"

►  Ephrem Azar , dominicain irakien exilé à Paris depuis 15 ans : "Ce chaos a été créé par les Américains ". "J'ai honte pour les musulmans français laïques qui ne réagissent pas, j'aimerais que tous les politiciens français réagissent, il s'agit là des droits de l'homme qui sont bafoués, ce n'est pas une question de foi chrétienne ".

Ephrem Azar est venu dans les studios de France Info avec une branche d'olivier qu'il a planté en 2003 en Irak au moment de l'intervention américaine, l'arbre est maintenant grand, "j'ai toujours espoir qu'il soit porteur de paix " dit-il : 

Faraj Benoît Camurat , président de "Fraternité en Irak" : "La communauté internationale réagit trop tard, il faut d'urgence une résolution de l'Onu, un mandat pour une intervention militaire dans la région autonome du Kurdistan afin de protéger les civils et les minorités ". Il lance un appel "solennel" à François Hollande : "c'est le rôle de la France d'envoyer des forces spéciales françaises pour épauler les forces irakiennes ". Concernant les réfugiés, "depuis dimanche, l'Unicef explique que 60 enfants sont morts de soif " dans les montagnes, assure-t-il.

Frédéric Pichon est diplômé d'arabe et docteur en Histoire contemporaine, il est spécialiste des minorités, de la Syrie et du Moyen-Orient. Il interroge sur France Info le rôle de la communauté internationale : "Les conséquences géopolitiques de l'invasion américaine en Irak ont été totalement sous-estimées par les Etats-Unis, qui ont été là-bas avec une grande naïveté, notamment dans leur appréhension de la mosaïque confessionnelle que représentait l'Irak ". Il pointe également le rôle de la Turquie qui a laissé circuler des dizaines de milliers de combattants étrangers à travers ses frontières : "On peut se poser la question du rôle très ambigu de la Turquie, il va falloir qu'elle se positionne clairement et je crois que les Etats-Unis ont déjà commencé à lui faire comprendre ".

9h10 - Reportage avec des exilés au Liban 

Au Liban, des dizaines de familles irakiennes chrétiennes viennent chercher de l'aide chaque jour au patriarcat chaldéen de Beyrouth. Originaires de différentes régions en Irak, elles fuient l'invasion des djihadistes de l'Etat islamique qui veulent anéantir les chrétiens et leurs rites. Une conférence réunissant les évêques d'Orient a eu lieu jeudi au Liban. 

Reportage d'Hélène Bourgon au Liban : des dizaines de familles irakiennes chrétiennes viennent chercher de l'aide au patriarcat chaldéen de Beyrouth

9h - Le piège se referme sur le Kurdistan

Les djihadistes sont maintenant à une trentaine de kilomètres d'Erbil la capitale du Kurdistan irakien, et le piège se referme pour les dizaines de milliers de réfugiés, analyse Hervé Toutain du service International de France Info. En poussant ainsi à l'exode des populations entières, les djihadistes visent à neutraliser les défenses kurdes. Organisés et bien entraînés, les pechmergas sont peu nombreux et manquent d'équipements lourds. En outre, la décision du président Barzani de positionner ses troupes hors des frontières du Kurdistan vers le sud a considérablement affaibli les lignes de résistance. La menace est telle que les Kurdes ont appelé pour la première fois à une sorte de mobilisation générale. Des renforts sont attendus de Syrie et de Turquie.

8h15 -  "C'est la conversion, l'exil ou la mort"

►  Ephrem Azar , dominicain irakien exilé à Paris depuis 15 ans, vient de joindre son frère en Irak, il était prêt à payer la taxe voulue par les islamistes pour pouvoir rester dans sa maison, mais la situation a changé : "Ils leur ont dit qu'ils ne voulaient plus de cette taxe, ils leur ont dit : vous devenez musulmans et on vous laisse libres ". "C'est la conversion, l'exil ou la mort ", dit-il sur France Info.

►Qui sont ces chrétiens d'Orient ? Réponse avec Joseph Yacoub ,  professeur honoraire de sciences politiques à l’université catholique de Lyon, spécialiste des minorités et des Chrétiens d’Orient. "Une chrétienté autochtone et historique ", "on oublie souvent de dire que ces chrétiens d'Irak victimes de la persécution remontent à 2000 ans, au premier siècle du message chrétien ", "ils étaient sur place bien avant l'islam ". "Les persécutions ont commencé avec les Romains ", explique-t-il également.

Ephrem Azar, Joseph Yacoub et Faraj Benoît Camurat avec Mathilde Munos

8h - La route d'Erbil est coupée

Plus aucun réfugié ne peut arriver vers Erbil actuellement, car la route vers Erbil a été fermée par les autorités kurdes, raconte le père Anis sur France Info, il fait partie des réfugiés. Le premier check-point a été pris par les combattants de l'Etat islamique où ils ont élevé leur drapeau noir.

Ephrem Azar, Joseph Yacoub et Faraj Benoît Camurat avec Mathilde Munos

7h30 - Pillages et exécutions à Qaraqosh

Les chrétiens qui ont fuit à Erbil dorment à même le sol, sur les trottoirs ou dans les parcs de la ville, en attendant de pouvoir partir ailleurs, certains pensent en Turquie. Ils ont du quitter leur terre souvent sans rien emporter. Alice Serrano a joint des habitants d'Erbil. Des pillages de maisons ou des magasins, ou même des exécutions auraient lieu dans la ville de Qaraqosh prise par les islamistes jeudi, selon des témoins.

Témoignages de la situation sur place recueillis par Alice Serrano

7h20   - "La fuite, une grande panique"

Ephrem Azar , dominicain irakien exilé à Paris depuis 15 ans, raconte sur France Info :  "J'ai appelé les miens, certains sont partis à Kirkouk chez mon cousin, d'autres à Erbil ". Il remercie chaleureusement France Info et notre reporter Alice Serrano pour son travail effectué jeudi, prenant contact avec de nombreux Irakiens en exil ► reportage à lire et écouter ici et ici.

Il explique aussi que "l'armée kurde n'est pas équipée, alors que les djiadistes sont équipés d'une manière considérable".

Selon lui, "ce qu’il faut dans l’immédiat c’est assurer la survie des gens qui se trouvent dans ces rues de Kirkouk et Erbil. Deuxièmement il ne faut pas un départ à l’étranger, ça ne va pas régler le problème, ce serait un appauvrissement du pays ", explique-t-il. 

Faraj Benoît Camurat , président de "Fraternité en Irak",  jeune ONG qui agit pour aider les minorités religieuses d’Irak, estime qu'il y a actuellement "environ 100.000 personnes" sur les routes en Irak, notamment depuis la prise de la plus grande ville chrétienne jeudi. "On a assisté à des scènes d'exode terribles, des vieillards portés, des enfants pleurants, une grande panique et des personnes qui ont parfois mis plus de 12h -au lieu d'1h ou 1h30- pour aller de Qaraqosh à Erbil, sous des températures de plus de 50° ".

Ephrem Azar et Faraj Benoît Camurat sont les invités de France Info, ils répondent à Mathilde Munos

7h15 - "Une génération suivante à Al-Qaïda"

Gilles Kepel , professeur à Siences Po, auteur de "Passions arabes / Journal 2011-2013" éditions Gallimard : "Ceux qui sont derrière l'Etat islamique souhaitent affaiblir l'Iran et le pôle chiite de la région ". Le spécialiste décrit ce qu'est  L'Etat islamique en Irak et au Levant  : "il  se finance en grande partie en trafiquant le pétrole ", "C'est une génération suivante à Al-Qaïda, c'est un mode plus post-moderne de fonctionnement, avec des gens fanatisés, entraînés au maniement d'arme ".

Gilles Kepel, professeur à Sciences Po, avec Mathilde Munos sur France Info

7h05 - "Rester ici ou partir en Turquie"

Après la prise de Qaraqosh, la plus grande ville chrétienne du pays, une grande partie des chrétiens se sont réfugiés à Erbil, la capitale du kurdistan irakien. Partis sans rien, ils ont, pour la plupart, passé une deuxième nuit dehors ou sous une tente installée à même le trottoir. Le père Anis fait parti de ces milliers de réfugiés : "la plupart des gens réflechissent à quitter le territoire de leurs ancêtres ", raconte-t-il sur France Info.

"Tous les gens paniqués et en train de réfléchir à ce qu'ils vont faire demain : rester ici ou partir en Turquie" - Le père Anis sur France Info

7h

Début de notre dossier spécial à écouter en direct sur France Info de 7h à 9h. Invités, reportages, témoignages, France info bouscule son antenne.

6h55

Dans la nuit, un porte-parole de la force kurde des peshmergas a affirmé que des avions de chasse américains avaient bombardé jeudi des cibles de l'Etat islamique dans deux zones du nord de l'Irak. A Washington, le Pentagone a catégoriquement démenti les informations sur ces frappes. "Aucune action de ce type n'a eu lieu ", a déclaré sur Twitter le

porte-parole du ministère américain de la Défense, l'Amiral John Kirby :

 

6h30 - "Une opération de détournement pour cacher leur objectif"

Pour Khattar Abou Diab, politologuie spécialiste du Moyen Orient, Erbil et le Kurdistan ne sont pas la vraie cible des combattants djihadistes. Ils visent en fait Bagdad, la capitale iranienne, siège du gouvernement chiite irakien.

"Leur véritable objectif c'est Bagdad, le Kurdistan c'est pour cacher leur objectif" - Khattar Abou Diab

LES FAITS 

► L'offensive des djihadistes se poursuit en Irak, ils avancent vers Erbil, la capitale de la région autonome du Kurdistan. Jeudi ils ont pris Qaraqosh, la plus grande ville chrétienne du pays, poussant des dizaines de milliers de chétiens et de Yazidis à fuir.

► Dans la nuit de jeudi à vendredi, le président des Etats-Unis Barack Obama a annoncé qu'il avait autorisé des parachutages humanitaires en Irak et, si nécessaire, des frappes aériennes ciblées contre les jihadistes pour éviter un "génocide" des minorités.

► Jeudi soir,  le Conseil de sécurité de l'Onu s'est dit "scandalisé" par l'avancée des jihadistes, lors d'une réunion convoquée en urgence jeudi soir à New York.

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  (Qaraqosh, la plus grande ville chrétienne d'Irak, a été prise par les djihadistes © Idé)

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