Etudiante, chômeur, prêtre... Six visages du "non" au référendum grec
Vendredi soir, une marée humaine s'est réunie place Syntagma à Athènes pour soutenir le "non" avant le vote de dimanche.
C'est un peu le rassemblement de la dernière chance. A deux jours du référendum de dimanche qui doit déterminer si les Grecs acceptent les réformes réclamées par les créanciers de la Grèce en échange d'une aide financière, près de 25 000 partisans du "non" se sont rassemblés, vendredi 3 juillet, sur la place Syntagma, au centre d'Athènes.
Alors qu'à moins d'un kilomètre de là, plus de 20 000 personnes militaient pour le "oui", ils ont scandé, chanté, sifflé, et acclamé leur premier ministre Alexis Tsipras, venu leur délivrer un dernier discours. Francetv info a interrogé six manifestants rencontrés dans le cortège.
Ana-Maria, 18 ans, la révolutionnaire
Les yeux cernés de khôl et le visage grave, Ana-Maria porte le "non" sur chaque centimètre de ses vêtements. Étudiante à l'école de médecine d'Athènes, cette jeune Grecque tout juste sortie du lycée a les idées bien fixes, et des idéaux plein la tête : "Si je suis là ce soir, c'est avant tout pour la dignité de mon pays", confie-t-elle en agitant son drapeau. "Le vote de dimanche n'est pas qu'une question de mesures économiques, de TVA, de retraite ou de remboursement. C'est pour nous le choix de la liberté, de la dignité. Moi je dis aux Grecs : 'soyez fiers de vous, de votre pays, et exigez la démocratie !'"
Elais, 28 ans, la voix des ouvriers
Arrivé bien avant tout le monde place Syntagma, Elais est venu vendre l'Epanastri, le journal de l'aile communiste de Syriza, à un euro l'exemplaire. Il dit vouloir faire entendre une autre voix de la gauche.
"Je suis là pour représenter les ouvriers, tout ceux qui sont trop isolés et qui ont du mal à se sentir impliqués par ce qui se passe en ce moment dans le pays. Aujourd'hui, seule la vraie gauche les écoute", lâche-t-il en regardant au loin. Convaincu que ce qui se joue dimanche sera un vrai "duel", Elais souhaite avant tout que la Grèce puisse librement choisir sa fiscalité, et qu'Alexis Tsipras puisse taxer les revenus les plus élevés sans être bloqué par les créancies de la Grèce. "Ce qu'on vit est un moment historique. Notre pays n'a pas du tout l'habitude de s'exprimer directement dans les urnes, mais quand l'enjeu est ultime, nous savons nous unir pour le faire", conclut-il.
Panagiotis et Antonis, la jeunesse "étouffée par la crise"
Panigiotis et Antonis, 32 ans, sont deux ingénieurs informaticiens qui se sont rencontrés à l'université il y a une dizaine d'années. L'un est au chômage, et l'autre gagne 850 euros par mois pour onze heures de travail par jour, sans compter les heures supplémentaires non payées.
"On n'en peut plus de vivre dans la précarité alors qu'on a fait des études et qu'on est diplômés", racontent les deux hommes. "On veut que le 'non' gagne pour mettre fin à l'austérité, dire stop à toutes ces mesures qui ne sont jamais bénéfiques pour notre pays." Et de porter un regard sévère sur les effets des plans d'austérité qu'a connus la Grèce depuis 2010 : "à cause de cela, on travaille dix fois plus, beaucoup plus dur, mais juste pour rembourser les intérêts des prêts faits par l'Europe. Rien n'est jamais redistribué ! C'est un cercle vicieux." Persuadés qu'une réorientation de l'Europe pourrait être la solution, Panigiotis et Antonis avouent quand même vouloir quitter la Grèce en cas de victoire du "oui". " Après cinq ans de cette vie, on est juste étouffés et exténués."
Teologos et Pablos, la religion pour solidarité
Teologos et Pablos se repèrent aisément dans la foule. Vêtus de longues soutanes bleu clair, chaines dorées et posture droite, ces deux prêtres orthodoxes sont venus soutenir le "non", au nom de la solidarité envers ceux qui souffrent. "En tant que prêtres orthodoxes, la liberté, la solidarité sont des valeurs dans lesquelles nous croyons fortement, nous nous devions d'être là ce soir", assurent-ils d'une voix douce.
Après avoir écouté de nombreux témoignanges de croyants en souffrance ces dernières années, Teologas souhaite "un monde meilleur pour les Grecs." "Même si tout le monde ne croit pas en Dieu sans doute ce soir, nous voulons montrer que l'Eglise aussi les entend, et qu'elle s'unit avec eux."
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