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Italie : un 31 décembre dans les thermes de Saturnia

Découverts par les Etrusques, exploités par les Romains au IIIe siècle avant notre ère, les thermes de Saturnia attirent aujourd'hui encore de nombreux Italiens. Un lieu surprenant où la chaleur de l'eau contraste avec l'air glacial.
Article rédigé par Anaïs Feuga
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
  (Les thermes de Saturnia offre un cadre surprenant, au milieu de la végétation, des roseaux et des arbres. © Anaïs Feuga / Radio France)

En Italie, certains s’apprêtent à fêter la fin de l’année, ou le début de la nouvelle année, les pieds dans l’eau. En Toscane, près du petit village de Saturnia, des thermes à ciel ouvert, en pleine nature, accueillent des milliers de baigneurs toute l’année, et donc y compris en plein hiver et en ce jour si particulier du 31 décembre. La source d’eau brûlante existe depuis des siècles, et cet endroit est connu depuis les Romains. Aujourd’hui encore, les Italiens goûtent le plaisir de se plonger dans l’eau chaude et sulfurée, alors que l’air est glacial.

C’est un lieu vraiment surprenant. Nous sommes ici en pleine nature, au milieu de la végétation, des roseaux, des arbres, et ce torrent d’eau chaude qui court à travers la prairie. Des nuages de condensation s’élèvent dans l’air. Le torrent se transforme en cascade et l’eau s’étage dans de grandes vasques de pierre qui forment comme une multitude de petites piscines naturelles.

Et à travers les nuages de vapeur, des têtes sortent de l’eau bleue turquoise. Dehors, l’air est glacé. Stefania vient de se rhabiller en grelottant. Elle vient exprès de Rome. "C’est unique au monde… C’est une splendeur, une merveille de la nature. Elle fait renaître. Ça fait du bien à cause de la réaction, avec l’eau bouillante, elle est très chaude. Et puis il y a ce massage naturel avec les cascades. C’est un hydromassage naturel ", explique-t-elle.

Les Romains venaient s'y soigner après les batailles

Ces thermes étaient déjà connus des Etrusques, qui prêtaient des vertus miraculeuses à cette source. Vers 280 avant Jésus Christ, les Romains commencent à l’exploiter. D’où la légende des thermes de Saturnia, Saturne, comme le raconte Azelio Aluigi, hôtelier et président de l’association touristique l’Altra Maremma : "*Ça raconte que Saturne dans un moment de colère, a lancé un éclair sur cette zone, et de là est sortie cette eau thermale. Apparemment, les Romains, après leurs batailles, venaient se soigner dans cette zone thermale".

"Car c’est aussi une eau curative. Elle soulage rapidement les blessures. Et puis les paysans d’ici, nos grands parents, nos aïeux, quand ils faisaient paître les bêtes, s’ils avaient un animal blessé, ils venaient le soigner dans cette eau* ", poursuit-il.

  (© Anaïs Feuga / Radio France)

Sorcières et diable dans les sources chaudes

Au Moyen-Age, la vapeur, la chaleur et l’odeur de souffre qui s’échappent de la source font courir d’autres légendes. On raconte que c’est par là qu’apparaît le diable quand il sort de l’enfer. On dit aussi que les sorcières s’y donnent rendez-vous. Rien de tout cela évidemment, mais une particularité géologique, dans cette ancienne région volcanique.

"Il n’y a qu’une seule source. C’est un cratère situé sous la piscine centrale de l’hôtel ' Thermes de Saturnia'. Il en sort plus de 500 litres d’eau à la seconde. Les études du centre national de la recherche disent que l’eau, avant de surgir, effectue un parcours de 40 ans sous terre, avant de sortir et de donner cette eau sulfureuse à 37°C ", raconte Azelio Aluigi.

Plus de sorcières ni de diable aujourd’hui, même si le passage de l’eau chaude à l’air froid fait trembler. Mara, une retraitée du nord de l’Italie, bonnet de bain rouge sur la tête, vient d’endosser un peignoir bariolé. "L’important, c’est d’être bien équipé, avec le peignoir toujours sec, faire vite pour s’habiller en sortant. On a le chauffage dans le camping car, et on se sèche ", explique-t-elle.

Un endroit pour les amoureux

Ici se retrouvent aussi des familles avec de jeunes enfants, des couples d’amoureux, des jeunes, des motards. Comme la bande de Riccardo qui n’hésitent pas à faire 400 km aller-retour à moto dans le froid, pour une demi heure de trempette : "J’aime comme ça laisse la peau, ça tonifie. Ça rend joyeux. Ça purifie ! "

Quant au bain de minuit, un 31 décembre, au clair de lune, "c’est un truc super romantique ", sourit Ale, une jeune femme venue de Rome . "Tu prends ton bain de nuit avec ton amoureux, sous les étoiles ." "C’est vraiment excitant, fantastique. C’est encore plus beau de nuit. Ici, pour Nouvel an, c’est la fête. Regarde, là bas, il y a un projecteur qui illumine. Bon, quand il fait sombre, tu dois rapporter une lampe de poche, mais c’est vraiment chouette, c’est fantastique ", renchérit cet homme.

La région regorge de richesses, du village médiéval de Montemerano, aux nécropoles étrusques. Mais même en temps de crise, les baigneurs sont présents, explique encore Ale. "Il y a plein d’endroits beaux comme ça en Italie. Il ne faut pas se faire avoir par la dépression. Actuellement, c’est une mauvaise période pour nous. Et donc, je pense qu’en ce moment, avec la crise, les lieux naturels vont redevenir à la mode ! "

Mais ce bijou offert par la nature, entièrement gratuit, est en péril. Les dernières pluies ont fragilisé une des vasques, qui s’est effondrée.

Reportage dans les thermes de Saturnia, Anaïs Feuga
 

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