L'explosion de deux bombes a tué vendredi au moins 80 personnes dans le nord-ouest du Pakistan
Les talibans alliés à Al Qaïda, qui mènent une vague d'attentats depuis 4 ans, revendiquent là leur "première action" pour venger Ben Laden. La plupart des victimes sont des cadets d'une unité paramilitaire de la police.
L'attaque survient 11 jours après que le cerveau du 11-Septembre a été tué par un commando des forces spéciales US au Pakistan.
Les talibans pakistanais avaient immédiatement juré de le venger en intensifiant leurs attentats contre le gouvernement pakistanais et ses forces de sécurité, qu'ils jugent complices de Washington dans le raid, ainsi que contre les intérêts américains.
Les Etats-Unis ont condamné vendredi l'"attentat odieux" qui a fait au moins 80 morts dans le nord-ouest du Pakistan et ont souligné l'importance d'une poursuite de la collaboration entre les deux pays pour "démanteler Al Qaïda et ses affiliés".
Un attentat contre la police des frontières
Vendredi à l'aube, à Shabqadar, une bourgade du district de Charsadda dans le nord-ouest, un homme à moto a fait exploser la bombe qu'il portait sur lui au moment où les cadets, qui avaient revêtu leurs habits civils, s'apprêtaient à monter dans les bus qui les ramenaient chez eux pour 10 jours de permission, a expliqué à l'AFP Nisar Khan Marwat, le chef de la police de Charsadda.
L'attentat visait un centre d'entraînement de la Frontier Constabulary, une unité paramilitaire de la police chargée de surveiller les frontières. Puis une seconde bombe, dissimulée, a secoué les autobus et minibus qui attendaient les jeunes recrues."Soixante-dix personnes ont péri, dont 65 de la Frontier Constabulary, et cinq civils", a indiqué M. Marwat.
"J'étais assis dans un minibus et j'attendais mes collègues", a raconté à l'AFP Ahmad Ali, un cadet blessé contacté à l'hôpital par téléphone. "On était content d'aller voir nos familles et j'ai entendu quelqu'un crier 'Allah Akbar' (Dieu est le plus grand) avant une puissante explosion", se souvient-il. "J'ai été touché par quelque chose au dos et puis j'ai entendu une deuxième explosion, alors j'ai sauté du bus, j'étais en sang", se rappelle encore Ahmad Ali. Il s'agit de l'attentat le plus meurtrier de cette année au Pakistan.
"Une première action pour venger le martyre d'Oussama"
"C'est une première action pour venger le martyre d'Oussama", a déclaré par téléphone à l'AFP Ehsanullah Ehsan, porte-parole du Mouvement des Talibans du Pakistan (TTP), depuis un lieu inconnu. "Attendez-vous à des attaques plus massives au Pakistan et en Afghanistan", a-t-il menacé.
Le TTP, qui a fait allégeance à Al Qaïda en 2007, est le principal responsable de la vague de plus de 450 attentats, suicide pour la plupart, qui ont fait plus de 4.300 morts dans tout le pays en près de quatre ans. A l'été 2007, juste après Ben Laden en personne, le TTP avait décrété le jihad, la "guerre sainte" à Islamabad pour son soutien à Washington dans sa "guerre contre le terrorisme".
Charsadda, théâtre de très fréquents attentats, est située aux portes des zones tribales du nord-ouest frontalières avec l'Afghanistan, qui sont le bastion des talibans pakistanais ayant fait allégeance à Al Qaïda et le principal sanctuaire dans le monde du réseau de feu Ben Laden. Elles sont aussi la base arrière des talibans afghans, notamment le réseau Haqqani, bête noire des soldats américains qui composent les deux tiers des forces internationales en Afghanistan.
Leurs camps d'entraînement dans les zones tribales sont également utilisés par Al Qaïda, qui y a entraîné de nombreux kamikazes ayant ensuite perpétré des attentats ou tenté d'en commettre aux Etats-Unis ou en Europe, de ceux du 11 Septembre 2001, à ceux de Londres en 2005, en passant Madrid en 2004 et Times Square à New York en 2010.
C'est d'ailleurs dans ces régions frontalières montagneuses que les experts s'attendaient depuis dix ans à trouver Ben Laden et non dans la ville-garnison coquette d'Abbottabad, à deux heures de route au nord d'Islamabad. C'est là qu'un raid-éclair de 79 soldats d'élite américains l'a déniché et tué dans la nuit du 1er au 2 mai, sans que les autorités soient averties selon Islamabad et Washington, provoquant la protestation du gouvernement et de l'armée pakistanaises, sous la pression d'une population très majoritairement anti-américaine.
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