Guerre au Proche-Orient : comment l'armée israélienne cible depuis plusieurs jours les Casques bleus de la Finul au Liban
L'histoire se répète et la patience de la communauté internationale est mise à rude épreuve. Deux soldats sri-lankais de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) ont été blessés à Naqoura, dans le sud du Liban, vendredi 11 octobre, a appris franceinfo auprès du ministère de la Défense du Sri Lanka. L'un d'eux a été hospitalisé dans un état sérieux, après avoir reçu des éclats au niveau du cou. Le militaire a été opéré dans un établissement de la Finul, et il est désormais hors de danger, tandis que son camarade souffre de blessures mineures. Le contingent sri-lankais est fort d'environ 125 soldats, sur les 10 400 Casques bleus de la force de maintien de la paix, qui contrôle la "ligne bleue", une zone de démarcation de 120 km de long tracée en 2000 entre Israël et le Liban, quand l'armée israélienne a opéré son retrait du Sud-Liban.
"Ce matin, le quartier général de la Finul à Naqoura a été touché par des explosions", a confirmé plus tard la force de l'ONU, dans un communiqué. "Deux Casques bleus ont été blessés après que deux explosions se sont produites près d'une tour d'observation. Un Casque bleu blessé a été transporté dans un hôpital de Tyr, tandis que le deuxième est soigné à Naqoura."
La Finul a ajouté que "plusieurs murs en T [des structures défensives de béton] de notre position 1-31 de l'ONU, près de la 'ligne bleue' à Labbouneh, sont tombés lorsqu'un engin Caterpillar de l'armée israélienne a frappé le périmètre et que des chars de Tsahal se sont déplacés à proximité de la position de l'ONU." Toujours selon ce communiqué, les Casques bleus ont maintenu la position et une "force de réaction rapide de la Finul a été dépêchée pour aider et renforcer la position". Celle-ci a été envoyée pour participer à la sécurisation des structures endommagées, a précisé la Finul à franceinfo.
En fin d'après-midi, l'armée israélienne, qui mène une opération d'ampleur depuis plusieurs semaines contre le Hezbollah, a reconnu un tir "sur un poste de la Finul, situé à environ 50 mètres de la source d'une menace" identifiée par des soldats. Tsahal a dit mener "un examen approfondi au plus haut niveau du commandement". Le ministère des Affaires étrangères libanais, pour sa part, a dénoncé des "tentatives israéliennes répétées et continues de saper la mission de la Finul". "Ces actes posent un très grand risque pour les Casques bleus", a affirmé la force des Nations unies.
Des tirs sur les mêmes bases, 24 heures plus tôt
Jeudi déjà, la force internationale a condamné des attaques répétées de l'armée israélienne sur ses infrastructures et ses soldats. "Deux Casques bleus ont été blessés après qu'un char Merkava de l'armée israélienne a tiré sur une tour d'observation du QG de la Finul à Ras al-Naqoura, la touchant directement et provoquant la chute" de deux soldats, a détaillé le communiqué.
De nationalité indonésienne, selon une porte-parole de la Finul, ces militaires sont "encore à l'hôpital" mais "leurs blessures ne sont pas graves". L'armée israélienne, de son côté, a assuré que "l'organisation terroriste Hezbollah opér[ait] à l'intérieur et à proximité des zones civiles du sud du Liban, y compris les zones proches des postes de la Finul". Tsahal a déclaré avoir ordonné aux forces de l'ONU présentes dans la zone de rester dans les espaces protégés, après quoi les forces ont ouvert le feu dans la zone.
Mais "les soldats israéliens ont également tiré sur une position de l'ONU à Labbouneh", ajoutait la Finul, citant un village frontalier situé près de la "ligne bleue" entre Israël et le Liban, dont le contrôle est assuré par la mission de maintien de la paix. "L'entrée du bunker où les Casques bleus avaient trouvé abri" a été touchée, et "des véhicules", ainsi que "des systèmes de communication", ont été endommagés.
Mercredi enfin, déjà à Naqoura, des soldats israéliens "ont délibérément tiré sur les caméras de la position 1-32A, les mettant hors d'usage, et ont également tiré délibérément sur une position où des réunions tripartites se tenaient régulièrement avant que ce conflit n'éclate", a dénoncé la Finul.
La Finul n'est pas une force opérationnelle et sa vocation est de déconflictualiser la zone, avec des troupes interposées. Mais elle a toutefois le droit de recourir à la force dans les cas de légitime défense. Pourquoi n'a-t-elle pas engagé de riposte, si elle jugeait que la manœuvre israélienne était délibérée ? Contactée par franceinfo, la Finul n'a pas répondu. Quoi qu'il en soit, "les armes légères des soldats de la paix n'auraient pas pu faire grand-chose face au char qui a tiré sur une tour d'observation", a glissé à franceinfo une source proche du dossier.
De nombreuses chancelleries ont exprimé leurs protestations après ces épisodes. "Ces attaques constituent des violations graves du droit international et doivent cesser immédiatement", a ainsi réagi vendredi le ministère français des Affaires étrangères dans un communiqué, tout en annonçant la convocation de l'ambassadeur d'Israël à Paris. "Nous avons été consternés d'entendre ces informations. Il est essentiel que les Casques bleus et les civils soient protégés", a commenté une porte-parole du Premier ministre britannique, Keir Starmer. "Cela représente une intensification très grave de l'hostilité de l'armée israélienne à l'égard des forces de l'ONU", a condamné le ministre des Affaires étrangères irlandais, Micheal Martin, dont le pays fournit 347 soldats à la Finul. "C'est absolument inacceptable", a-t-il dénoncé. L'Italie, par l'intermédiaire de son ministre de la Défense, a parlé dès jeudi de "très graves violations des normes du droit international humanitaire" et de possibles "crimes de guerre".
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