Israël-Palestine : pourquoi Tsahal a retiré ses troupes de Gaza
Au 29e jour de guerre, l'armée israélienne a annoncé le retrait de la bande de Gaza de toutes ses troupes au sol, avant l'entrée en vigueur d'une trêve de 72 heures.
Il est trop tôt pour évoquer la fin de l'opération "Bordure protectrice" menée par Israël contre le Hamas depuis le 8 juillet. Mais avec la décision de l'armée israélienne de se retirer de la bande de Gaza, mardi 5 août, le conflit entre manifestement dans une nouvelle phase. Au 29e jour de guerre, francetv info vous résume les raisons de ce tournant.
Parce que le principal objectif d'Israël a été atteint
D'abord, l'armée israélienne estime avoir rempli son principal objectif : détruire tous les passages souterrains du Hamas qui relient la bande de Gaza et Israël. Ces "tunnels de la terreur", pour reprendre l'expression du Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, permettaient à des combattants du Hamas de pénétrer en territoire hébreu, en vue de perpétrer des attaques terroristes.
Ces passages souterrains – une trentaine au total – constituaient à ce titre la cible prioritaire de Tsahal, dans le cadre de l'opération terrestre entamée le 17 juillet. Or, "tous les tunnels qui avaient été repérés ont été détruits", a annoncé lundi soir le porte-parole de l'armée israélienne.
Parce que 64 soldats de Tsahal ont déjà été tués
Si Tsahal a décidé de faire un pas en arrière, c'est aussi parce qu'elle a enregistré des pertes humaines importantes. En un mois, 64 de ses soldats, ainsi que trois civils israéliens, ont trouvé la mort. Face au spectre d'une guerre d'usure, coûteuse d'un point de vue humain comme sur le plan financier, Benyamin Nétanyahou a lui-même annoncé que Tsahal allait se redéployer aux marges de la bande de Gaza, "en vue de réduire les frictions" avec les combattants palestiniens.
Après tout, "quel gain stratégique y a-t-il à attendre, pour Israël, de l'opération 'Bordure protectrice' contre Gaza ? On n'en voit aujourd'hui aucun", résume Renaud Girard, grand reporter au Figaro, dans une analyse publiée sur le site du quotidien. Dès lors, "ce retrait constitue la moins mauvaise des solutions" pour Benyamin Nétanyahou, estime également la journaliste Hélène Sallon, dans une analyse parue dans Le Monde (article payant).
Parce que le Hamas risque de sortir renforcé
Plusieurs spécialistes du Proche-Orient soulignent également que l'opération israélienne en territoire palestinien pourrait s'avérer contre-productive, dans la mesure où le Hamas risque d'en sortir renforcé. "Sans le vouloir, l'Etat juif a relancé le Hamas, mouvement qui était en perte de vitesse au sein de la population palestinienne", juge Renaud Girard dans Le Figaro.
"La guerre a remis le Hamas dans le jeu politique, sur le plan régional comme sur le plan international", acquiesce le politologue Adnane Abou Amer, de l'université Oumma de Gaza. D'autant que la population lui sait gré de rendre les coups à Israël, souligne Moukhaïmer Abou Saada, professeur de sciences politiques à l’université Al-Azhar de Gaza.
Surtout, les vingt-neuf jours de frappes massives sur la bande de Gaza n’ont pas anéanti la menace militaire que fait peser sur Israël le Hamas. Et si elle estime avoir tué quelque 900 terroristes palestiniens, l’armée israélienne n’a annoncé la mort d’aucun chef important de la branche militaire du mouvement islamiste.
Parce que la communauté internationale hausse le ton
La décision de retirer de Gaza toutes les troupes au sol répond aussi à un impératif diplomatique. Car après le bombardement de trois écoles de l'ONU en dix jours, Israël s'est attiré les foudres de la communauté internationale.
"Combien de morts faudra-t-il encore pour que s'arrête ce qu'il faut bien appeler le carnage de Gaza ?", a demandé lundi le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, tandis que François Hollande a déploré les "massacres" commis en territoire palestinien. "Le droit d'Israël à sa sécurité est total, mais ce droit ne justifie pas qu'on tue des enfants et qu'on massacre des civils", a insisté Laurent Fabius. Ban Ki-moon, le secrétaire général de l'ONU, a lui-même dénoncé "une violation flagrante du droit humanitaire international", tandis que les Etats-Unis, principaux alliés d'Israël, se sont dits "consternés".
Le retrait de Tsahal de la bande de Gaza, conjugué à l'entrée en vigueur de la trêve de 72 heures, ne signifient pas pour autant la fin de l'opération "Bordure protectrice". Depuis le début de l'offensive, plusieurs tentatives de cessez-le-feu ont échoué, et rien ne garantit que celui-ci tiendra plus longtemps que les précédents. Surtout, les pourparlers qui doivent se tenir en Egypte s'annoncent difficiles, entre deux camps aux exigences totalement opposées. Seul point encourageant, estime dans Le Monde l'analyste Ofer Zalzberg, "Nétanyahou tout autant que le Hamas ne peuvent s’assurer un futur politique qu’en parvenant à un cessez-le-feu solide et à une levée du siège".Mais à quel prix ?
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