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Yémen : qu'est-ce qui a poussé la France à fermer son ambassade à Sanaa ?

Les ressortissants français ont été invités, mercredi, à quitter le pays, en pleine instabilité.

Article rédigé par franceinfo avec Reuters
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Deux soldats gardent l'entrée de l'ambassade de France au Yémen, à Sanaa, le 18 janvier 2015.  (MOHAMED AL-SAYAGHI / REUTERS)

La France annonce, mercredi 11 février, la fermeture de son ambassade à Sanaa, la capitale du Yémen, contrôlée par les miliciens houthis, dans un message adressé à la communauté française et publié sur le site internet de sa représentation. L'ambassade française sera fermée "provisoirement et jusqu'à nouvel ordre" à partir de vendredi 13 février. 

Dans son message, la France invite ses ressortissants à quitter le pays "dans les meilleurs délais". "Il s'agit d'une recommandation, pas d'une évacuation," a toutefois précisé une source diplomatique, ajoutant que les intérêts français seraient représentés par l'ambassade du Maroc.

"Compte tenu des derniers développements politiques, et pour des raisons sécuritaires, [l']ambassade vous invite à quitter provisoirement le Yémen (...) en empruntant les vols commerciaux à votre convenance", peut-on lire sur le site internet de l'ambassade. Francetv info revient sur le déroulement de ces évènements.

Acte 1 : la rébellion houthie se renforce

Depuis le départ en 2012 de l'ancien président Ali Abdallah Saleh, dans la foulée du Printemps arabe, le Yémen vit dans l'instabilité politique. Dans ce contexte, la rébellion houthie, un courant chiite qui représente environ un tiers de la population, s'est renforcée. Elle a mené au fil des mois des centaines de manifestations, appelant, entre autres, à l’autonomie sur la région qu'elle contrôle dans le nord du pays et à la démission du gouvernement et du président Abd Rabbo Mansour Hadi. 

Acte 2 : les rebelles s'emparent de la capitale

Après un mois de manifestations parfois violentes, les rebelles Houtis lancent en septembre 2014 une offensive surprise sur Sanaa, la capitale, dont ils prennent le contrôle. "Dans les rues de Sanaa, les Houthis paradent, les armes et le drapeau de leur mouvement, Ansaruallah, à la main. Ils contrôlent les principaux axes routiers, en ville et alentour, et tiennent toujours l’aéroport international", rapporte Le Monde.fr.

"Malgré la signature d'un accord de paix sous l'égide de l'ONU, qui prévoyait leur retrait de Sanaa et la reprise du processus de transition politique", les Houthis continuent de progresser, "s'emparant du port stratégique de Hodeida sur la Mer Rouge et s'enfonçant aussi vers les provinces centrales de Dhamar, d'Ibb et de Baïda", constate France 24 en octobre. 

Pour de nombreux experts, l'avancée des miliciens chiites n’a pu se faire sans le soutien de l'ancien président Ali Abdallah Saleh, qui les avait pourtant violemment combattus pendant des années. Espérant revenir au pouvoir, il aurait notamment ordonné à ses partisans de rejoindre la rébellion chiite pour déstabiliser le gouvernement en place, ce qui expliquerait la passivité de certaines unités de l’armée face à cette progression. 

Acte 3 : le palais présidentiel tombe

En début d'année, tout s'accélère. Les Houthis prennent possession du palais présidentiel à Sanaa le 20 janvier. Des combats dans la capitale font de nombreux morts et blessés, forçant plusieurs ambassades occidentales, dont celle de France, à fermer leurs portes. Une dernière vague de violences provoquée par le refus des miliciens chiites d'entériner un projet de constitution qui les priverait notamment d'un accès à la mer.


Yémen: affrontements près du palais... par 20Minutes

Les Houtis attaquent alors le siège de la télévision nationale et affrontent l'armée dans la capitale à l'occasion de ce que le pouvoir qualifie aussitôt de coup d'Etat. Le président Abd Rabbo Mansour Hadi et son gouvernement sont, en effet, poussés à la démission. Les négociations menées par les différents partis, sous l'égide de l'ONU, ne parviennent pas à endiguer la crise. 

Acte 4 : les Houtis s'installent au pouvoir 

Désormais, les miliciens chiites annoncent la dissolution du Parlement, alors que les autres partis politiques veulent garder cette assemblée qui représente à leurs yeux la dernière institution légitime du Yémen après la démission du président et du gouvernement. Ansaruallah annonce, le 6 février, la mise en place d'un Conseil présidentiel de cinq membres pour assurer l'exécutif. 

Dans une "déclaration constitutionnelle" rendue publique depuis le palais présidentiel, elle annonce, par ailleurs, la création d'un Conseil national de 551 membres, censé remplacer le Parlement dissous. Le Conseil présidentiel devra former à son tour un gouvernement de compétences nationales pour une période de transition, que la milice fixe à deux ans.

Acte 5 : des ambassades ferment

Dans un discours télévisé, mardi soir, le chef de la milice chiite, Abdel Malek Al-Houthi, tente de rassurer les missions diplomatiques dans la capitale yéménite, assurant que la situation sécuritaire était "très stable" à Sanaa. En vain. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni ferment leur ambassade et commencent à évacuer leurs diplomates. Mercredi, la France décide de faire de même. 

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