Irak : à Mossoul, une radio fait de la résistance à l'Etat islamique
Alors que l'offensive des forces de la coallition, qui doit libérer la deuxième ville d'irak se fait toujours attendre, Alghad Radio donne la parole aux habitants. En tout anonymat, ils évoquent le quotidien sous le joug de Daesh.
Les habitants de Mossoul attendent toujours la libération de leur ville. Depuis plus de deux ans, ils vivent sous le joug du groupe État islamique. L’offensive des forces de la coalition, sur la 2ème ville d’Irak est attendue dans les jours ou les semaines qui viennent. Depuis le Kurdistan irakien voisin, une radio – Radio demain- diffuse les témoignages d’habitants qui appellent de l’intérieur de la ville pour raconter leur tragédie et leurs espoirs.
Les intervenants risquent leur vie en témoignant
Après un journal donnant des nouvelles du front et un message dénonçant la propagande de l’Etat islamique, c’est l’heure de l’émission phare d’Alghad Radio. Dans son petit studio blanc, Ahmad, ouvre la libre antenne : priorité aux appels venus de Mossoul. "Dis moi quelle est la situation chez vous?", demande l'animateur. "Je te jure que c’est horrible. On meurt lentement ici. Moi je ne dors pas de peur que quelque chose se passe pendant mon sommeil", répond un habitant de Mossoul. "Leurs patrouilles attaquent tous les quartiers ?", poursuit Ahmad. "Nous sommes fatigués, fatigués, fatigués, ça fait deux ans et demi. Personne ne peut imaginer notre situation. On préfèrerait la mort plutôt que cette vie-là. », confie cet auditeur anonyme.
Sur Alghad Radio, les intervenants n’indiquent pas leur vrai prénom, ni le quartier d’où ils appellent. Téléphoner est un acte de résistance risqué rappelle Mohammed, un des animateurs. Il a lui-même fui Mossoul à l’arrivée des djihadistes. "La punition, c’est la mort, pour quiconque a un portable. Donc normalement, les gens appellent en cachette, dans des endroits fermés. Et en plus de ça, c’est très dur de capter du réseau."
Chronique du quotidien sous l'Etat islamique
Créée par l’ancien gouverneur de Mossoul, Alghad radio parvient à émettre jusque dans la ville où l’écouter est tout aussi dangereux. Également diffusée sur internet, elle permet à ceux qui ont fui Mossoul, d’avoir des nouvelles de ceux qui sont restés. "Avec nous Kinan de l’intérieur de Mossoul. Allez-y Kinan", lance l'animateur à cet habitant de Mossoul. "Les policiers de Daech harcèlent les jeunes hommes pour rien du tout. Tous les prétextes sont bons. Ils en ont arrêtés 14 ou 15 et les ont entassés dans un pick-up. Ils leur ont fait faire des tours pour les humilier. Même moi j’ai été arrêté une fois à cause de mes vêtements. Ils ont dit que ma djellabah était trop longue. J’ai dit : qu’est-ce que je dois faire ? la porter jusqu’au genou ?"
Chronique d’un quotidien sous l’Etat islamique, entre absurdité et cruauté, Alghad radio, a aussi pour objectif de redonner espoir aux habitants, quitte à faire de la propagande pour les forces armées qui s’apprêtent à entrer dans la ville. L'imminence de cette intervention se ressent sur le comportement des djihadistes, témoigne Houssam, dont le frère et le père ont été mis à mort sous ses yeux.
"Ils se préparent à l’offensive. Ils barrent des routes avec des blocs de béton. On est dans une vraie prison ici.
"Nos familles à Bagdad et dans les autres villes nous manquent raconte Houssam. Mais si Dieu le veut les hommes de Daech seront écrasés. Ils commencent à être pris de panique. Nous, de l’intérieur de Mossoul, nous allons libérer la ville."
Entre deux appels, Amad lit un SMS disant qu’un des "héros de la résistance" a tué deux hommes de Daech mais qu’il a été arrêté avant que Racha ne s’impatiente : "Vous dites toujours que la libération est pour demain, demain mais ce sera quand demain?"
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