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"On est en train de mourir" : dans les quartiers libérés de Mossoul, les civils appellent à l'aide

Après 27 jours de combat, les forces irakiennes progressent péniblement dans Mossoul, toujours aux mains du groupe État islamique. Leur arrivée n'est pas toujours vue d'un bon œil par les civils. Reportage à Gogjali, un quartier libéré.

Article rédigé par Mathilde Lemaire - Benjamin Chauvin
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Des civils à Gogjali, quartier est de Mossoul, le 11 novembre 2016 (RADIO FRANCE / MATHILDE LEMAIRE)

De chaque côté de la route poussiéreuse, les habitations, les usines, les commerces ont été en partie démolis par les récents combats. Gogjali est l'un des premiers quartiers est de Mossoul dans lequel l’armée irakienne est entrée début novembre. Mais on entend encore le bruit des armes. Même dans les zones que l’on croyait sécurisées depuis plusieurs jours, des jihadistes ressurgissent. Après 27 jours de combats, la résistance du groupe État islamique dans son fief irakien est impressionnante. 

Les civils ne voient pas toujours d'un bon œil l'arrivée des forces de Bagdad

Gogjali semble désert mais tous les civils n'ont pas fui. Au bord de la chaussée, une vieille dame au foulard bleu s'emporte : "Regardez dans quel état on est ici ! Regardez dans quelles conditions on vit ! Moi j’ai des parents handicapés à la maison. Pas moyen de partir, de fuir vers les camps. On est en train de mourir."

Depuis que l’armée irakienne est arrivée, nous sommes encerclés. On n’a plus d’eau, plus d’électricité

Une habitante du quartier Gogjali

sur franceinfo

Quand Daech régnait encore sur Gogjali, le quartier disposait de deux heures de courant toutes les seize heures. Désormais, plus rien. Sous Daech, des vivres arrivaient depuis la Syrie. Le gouvernement irakien a bien envoyé quelques camions d’aide humanitaire, mais ils se font rares et "ils ne s'arrêtent pas ici", se lamente une maman, l'air épuisé, les larmes aux yeux. "Dans ma famille, il y a beaucoup d’enfants, explique-t-elle. Je récupère la moindre miette de chaque aliment. Avec ça, je mets le peu de farine qu'il nous reste et un peu d’eau pour leur préparer un semblant de petit-déjeuner."

Gogjali, quartier est de Mossoul, le 11 novembre 2016 (RADIO FRANCE / MATHILDE LEMAIRE)

Si les ONG et les Nations unies sont visibles dans les nombreux camps de déplacés en Irak, elles n’entrent pas dans les zones encore sous le feu. Des zones où les habitants ne voient pas toujours d'un bon œil les forces gouvernementales, qui ont lancé la bataille de Mossoul. "Sous Daech, il n’y avait pas de problème. Il fallait seulement éviter de se couper la barbe et porter les vêtements qu’ils voulaient, explique Abahmed, un quinquagénaire qui refuse de bouger lui aussi. Nous ne sommes affiliés à aucun parti politique, à aucun camp. Mais le gouvernement de Bagdad, je sais comment il fonctionne. Ils viennent chez toi. Ils prennent tout. C’est pareil partout dans le pays. Il y a pas d’avenir en Irak."

Nous sommes nés ici. Nous resterons ici. Je préfère mourir ici plutôt que de quitter ma ville

Abahmed, un habitant de Gogjali

sur franceinfo

Comme Abahmed, les habitants de Mossoul sont en majorité des musulmans sunnites, qui craignent pour leur avenir après cette offensive des forces de Bagdad à majorité chiite. Sur certains chars irakiens qui traversent le quartier Gogjali flotte même le drapeau à l’effigie de l'imam Hussein, le martyr des fidèles chiites.

Reportage de Mathilde Lemaire au cœur de Gogjali, quartier est de Mossoul, où les civils appellent à l'aide

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