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Karim, bébé devenu borgne après un raid, nouveau symbole des atrocités de la guerre en Syrie

Un bébé de deux mois blessé dans un bombardement du régime est au centre d'une campagne de solidarité virale sur les réseaux sociaux. 

Article rédigé par franceinfo - Louise Hemmerlé
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Grièvement blessé, Karim a aussi perdu sa mère dans un bombardement de l'armée syrienne, le 29 octobre 2017, dans la Ghouta orientale (Syrie). (#SOLIDARITYWITHKARIM CAMPAIGN)

Il y a eu Aylan, échoué sur une plage turque, puis Omran, hagard, couvert de poussière et de sang. C'est maintenant la photo de Karim, un bébé syrien devenu borgne lors d'un bombardement près de Damas, qui fait le tour du monde depuis plusieurs jours, jeudi 21 décembre.    

A chaque fois, ces photographies sont de violentes piqûres de rappel du quotidien des quelque 7,5 millions d'enfants qui vivent en Syrie, selon l'ONG Save the Children. A chaque fois, elles provoquent une vague d'indignation et d'émotion sur les réseaux sociaux. Cette fois, pour afficher leur solidarité avec Karim, les internautes ont trouvé un signe fort : se photographier en se cachant un œil, avec le hashtag #SolidarityWithKarim (Solidarité avec Karim). 

Des habitants de Douma (Syrie) se couvrent un œil en solidarité avec le petit Karim, le 19 décembre 2017.  (#SOLIDARITYWITHKARIM CAMPAIGN / AFP)

Victime du régime 

Karim avait 40 jours lorsqu'un raid du régime syrien, le 29 octobre, l'a grièvement blessé à l'œil et a tué sa mère. Le bébé se trouvait à Hamouria, une localité de la Ghouta orientale. Assiégés depuis 2013, ces environs de la capitale syrienne font partie des quatre zones dites de "désescalade" mises en place cette année dans certaines régions du pays en vue d'instaurer une trêve. Mais le régime a intensifié depuis la mi-novembre ses frappes contre la région, qui souffre de graves pénuries de nourriture et de médicaments.

Selon son médecin, le chirurgien neurologue Abou Jamil, Karim devrait souffrir de "séquelles" après une blessure au lobe frontal qui a également endommagé son globe oculaire gauche. "Le lobe frontal tient un rôle essentiel dans la compréhension, l'intelligence et la mémoire de l'être humain, rappelle-t-il. Il y a une possibilité de traitement, avec la thérapie comportementale et cognitive (...) et aussi la chirurgie esthétique. Mais pas dans la Ghouta." D'après le père de l'enfant, la tante du bébé veille sur lui "en permanence" et s'occupe du "suivi de son traitement dans un hôpital de Hamouria".

Vague de solidarité internationale

On doit la photo de Karim, prise le 4 décembre, à Amer Almohibany, un photographe indépendant qui collabore occasionnellement avec l'AFP en Syrie. Il a ensuite pris une photo de lui-même, sa main cachant un œil. "J'avais rendu visite à l'enfant (...) et son image m'a marqué avant même de prendre la photo. Elle me hantait, explique le photojournaliste syrien. Le but de la campagne est de (...) faire parvenir au monde la voix de cet enfant qui a perdu son œil et sa mère."

Depuis ce tweet d'Amer Almohibany, le visage de Karim est massivement partagé sur les réseaux sociaux. Et des internautes du monde entier postent leur photo d'eux, un œil caché avec leur main : des enfants dans la rue, des anonymes, mais aussi des Casques blancs, des membres d'ONG ou des journalistes.

La solidarité avec l'enfant s'exprime même au Conseil de sécurité de l'ONU, où l'ambassadeur du Royaume-Uni, Matthew Rycroft, a tweeté une photo de lui assis à la table ronde et cachant son œil droit avec sa main. "Nous mettons en garde contre l'inaction qui fait que davantage de gens vont mourir. Davantage d'écoles vont être bombardées. Davantage d'enfants seront blessés, écrit-il. Il faut que le bombardement et le siège de la Ghouta orientale prennent fin." 

En France, le ton du message de Cécile Duflot est lui aussi politique : "Le monde ne doit pas accepter le bombardement et le siège de la Ghouta orientale", écrit l'ancienne ministre écologiste.

Le footballeur Franck Ribéry s'est lui aussi fendu d'un #SolidarityWithKarim en soutien à l'enfant. 

"Nous voulions attirer l'attention du monde sur les crimes commis par le régime syrien contre la population (...) Il assassine l'enfance", a asséné Firas al-Abdallah, un photographe de 24 ans qui a contribué à la campagne. Pari réussi. 

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