Cet article date de plus de six ans.

Syrie : à Manbij, "chaque déclaration de la Turquie ne fait qu’inquiéter davantage la population"

Dans le nord de la Syrie, les habitants de Manbij, où sont basés des combattants kurdes, redoutent une intervention militaire turque. La présence de forces américaines ne suffit plus à les rassurer, selon les témoignages recueillis sur place par franceinfo. 

Article rédigé par Omar Ouahmane
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Un membre du conseil militaire de Manbij en surveillance au nord de la ville, le 31 mars 2018.
 (DELIL SOULEIMAN / AFP)

En Syrie, après avoir pris le contrôle de la ville kurde d'Afrin dans le nord du pays, Ankara envisage désormais se tourner vers Manbij. Cette localité, située près d’Alep, fait partie du territoire autonome contrôlé par les Kurdes et leurs milices, qualifiés de terroristes par la Turquie. Toutefois, le secteur bénéficie de la présence des forces américaines. Mais pour combien de temps ? 

>> À lire aussi : à Kobané, des réfugiés d'Afrin reprochent à la communauté internationale de les avoir "trahis"

Mustapha, originaire de Kobané, s’est installé sur le toit d’une maison en ruines, à une dizaine de kilomètres au nord de Manbij, face aux positions de l’Armée syrienne libre (ASL), formée de rebelles anti Bachar al-Assad recrutés par la Turquie pour combattre les forces kurdes. Ils ne sont qu’à quelques centaines de mètres, indique-t-il. En face de nous, il y a cette école, juste à côté de la mosquée. C'est là que les combattants de l’Armée syrienne libre se trouvent, assure-t-il. Mustapha précise qu'il y a souvent des affrontements. "Hier soir, aux environs de 22 heures, alors qu'il faisait nuit, des combattants de l’Armée syrienne libre se sont mis à tirer, ce sont les traces que vous voyez", déclare-t-il en montrant les impacts de balles autour de lui.

Les Américains nous demandent de ne pas riposter. Ils viennent régulièrement nous rendre visite tous les deux, trois jours pour voir si tout va bien. Ils nous disent de ne pas céder aux provocations. Les ordres sont de ne tirer que s’ils avancent vers nous.

Mustapha, face à l'Armée syrienne libre

Plus au sud, à Manbij, une ville multi-ethnique règne une coexistence pacifique. Un conseil militaire a été formé pour défendre la cité en 2016, juste avant la libération. Il est dirigé par Abou Adel. "Pour l’instant, nous comptons sur les Américains. Ils nous ont dit qu’ils resteront pour nous aider à protéger notre ville. Nous verrons", déclare-t-il. Les États-Unis se veulent rassurants. Ils déclarent vouloir s’opposer à la progression des forces turques.

Mais les inquiétudes des habitants ne sont pas apaisées pour autant, selon Amhid, avocat et membre du conseil civil de Manbij, chargé de gérer la ville. "Nous sommes parvenus à une forme de stabilité dans la région, mais chaque déclaration de la Turquie ne fait qu'inquiéter davantage la population", explique-t-il, soulignant que les habitants ont peur. 

Les gens commencent à avoir peur. Ils ne veulent plus de guerre, d’exode. Ils ont vu ce qui s’est passé à Afrin, les morts, les pillages. Ils ne veulent pas de ça.

Amhid, membre du conseil civil de Manbij

à franceinfo

Pendant ce temps, Ankara poursuit ses menaces contre les Kurdes, alliés des États-Unis mais qui ne sont pas à l’abri d’un lâchage de Washington. Les récentes déclarations de Donald Trump ont semé le trouble. Le président américain a affirmé le 30 mars dernier vouloir retirer très bientôt ses soldats de Syrie.

Le reportage d'Omar Ouahmane en Syrie, à Manbij, une zone où sont basés des combattants kurdes

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.