Comment le meurtre au couteau de trois fillettes à Southport a provoqué une série d'émeutes au Royaume-Uni

Article rédigé par franceinfo
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Un policier, devant la mosquée de Southport (Royaume-Uni), attaquée par des émeutiers d'extrême droite, le 31 juillet 2024. (RASID NECATI ASLIM / ANADOLU / AFP)
Des rumeurs, non vérifiées, présentent l'adolescent auteur de l'attaque survenue lundi comme musulman, et désignent les lieux de cultes musulmans comme des cibles. La police se prépare à un week-end sous tension, alors que des manifestations sont annoncées dans plusieurs villes et pourraient dégénérer.

Des affrontements qui s'intensifient. Depuis l'attaque au couteau ayant coûté la vie à trois fillettes et blessé une dizaine de personnes, lundi 29 juillet, à Southport (nord-ouest de l'Angleterre), les émeutes se multiplient au Royaume-Uni. Malgré l'arrestation et la mise en détention de l'adolescent auteur de l'attaque, des centaines de personnes ont pris part, ces derniers jours, à des affrontements avec la police à Southport et à Sunderland (nord-est).

Des échauffourées entre la police et des manifestants d'extrême droite ont aussi éclaté dans plusieurs autres villes samedi 3 août, notamment à Liverpool, Manchester ou Belfast. Franceinfo revient en actes sur cette attaque au couteau et les émeutes qui, depuis, embrasent le Royaume-Uni.

1 Une attaque au couteau dans un cours de danse

L'attaque s'est produite lundi 29 juillet, peu avant midi, dans une école de danse de Southport, une ville du nord-ouest de l'Angleterre, à une vingtaine de kilomètres de Liverpool. "Les enfants assistaient à un événement sur le thème de Taylor Swift dans une école de danse, quand l'assaillant, armé d'un couteau, est entré dans le bâtiment et a commencé à attaquer les enfants à l'intérieur", a rapporté Serena Kennedy, responsable de la police locale du Merseyside, lors d'une conférence de presse. Selon la police, les secours sont intervenus rapidement après avoir été alertés "à 11h48", en dépêchant "13 ambulances" et des médecins sur place. Dave Kitchin, le responsable des services de secours locaux, a décrit en conférence de presse une "scène dévastatrice" à son arrivée sur les lieux.

Le bilan est dramatique. Deux fillettes, âgées de 6 et 7 ans, sont tuées dans l'attaque et huit autres enfants sont blessés, dont cinq sont pris en charge par les secours dans un état critique. Une des enfants pris en charge succombe le lendemain à ses blessures, à l'âge de 9 ans. Deux adultes ont également été grièvement blessés par des coups de couteau reçus en tentant de "protéger" les enfants, selon la police. 

2 Un adolescent de 17 ans arrêté

Rapidement après l'agression, des agents de police armés "ont arrêté un homme et saisi un couteau",  a annoncé un communiqué de la police du Merseyside, publié peu de temps après l'attaque. Lors d'une conférence de presse tenue l'après-midi de l'attaque, Serena Kennedy a précisé que le suspect, un "homme de 17 ans", avait été placé en détention. La responsable de la police a ajouté écarter à ce stade un mobile terroriste, estimant que les motivations de l'homme interpellé restaient "incertaines" en l'état.

L'identité de l'adolescent, nommé Axel Rudakubana, a finalement été révélée jeudi lors de son arrivée à la cour de justice de Liverpool. Son audience, pendant laquelle il n'a pas pris la parole, n'a duré que cinq minutes. Le juge a décidé de son placement en détention provisoire dans un établissement pour mineurs, après son inculpation du meurtre des trois fillettes et de dix tentatives de meurtres.

3 Des violences après une veillée en hommage aux victimes

Au lendemain de l'attaque, de violents affrontements ont éclaté à Southportaprès une veillée organisée en hommage aux victimes. Des centaines de personnes se sont d'abord rassemblées dans le centre de cette ville balnéaire en début de soirée, et ont observé une minute de silence. Mais le rassemblement a viré à l'affrontement plus tard dans la soirée, alors que 200 à 300 personnes ont déclenché des feux, incendiant notamment des véhicules, selon l'AFP. Des projectiles ont également été lancés sur les policiers et une mosquée locale prise pour cible. Certains manifestants ont "jeté des briques sur une mosquée locale et endommagé une épicerie", a précisé la police de Merseyside, qui "soupçonne" les manifestants d'être des "soutiens" de la Ligue de défense anglaise (EDL), un mouvement d'extrême droite.

Bilan de ces affrontements : les services de secours locaux ont indiqué sur X avoir traité "39 patients au total, tous des officiers de police", dont 27 ont été hospitalisés. Dans un communiqué, la ministre de l'Intérieur britannique, Yvette Cooper, a dénoncé des "scènes honteuses" et a jugé "consternant" que la police, "qui mène une enquête criminelle urgente" après l'attaque au couteau, "puisse être la cible de violences". Le Premier ministre, Keir Starmer, a lui réagi sur X, promettant à "ceux qui ont détourné la veillée des victimes avec de la violence et de la brutalité" qu'ils "subiront toute la force de la loi".

4 De nouvelles émeutes à Sunderland

De nouvelles émeutes ont éclaté vendredi 2 août à Sunderland, une ville du nord-est de l'Angleterre. Sur les images des violences diffusées sur les réseaux sociaux, des centaines de personnes attaquent la police, mettant le feu à une voiture, ou encore attaquant un bus. Sur une vidéo notamment partagée par le collectif Stand Up to Racism sur X, un des émeutiers arbore un tatouage d'une croix gammée.

Trois policiers ont été hospitalisés et huit personnes arrêtées, selon la police. "Au cours de la soirée, ces officiers ont été confrontés à d'importants et graves niveaux de violence, ce qui est tout à fait déplorable", a déclaré Helena Barron, une responsable de la police de Northumbria dans un communiqué, précisant que deux des fonctionnaires étaient toujours à l'hôpital. "La police a le soutien absolu du gouvernement pour agir de la manière la plus énergique possible et s'assurer que toute la force de la loi s'exerce", a réagi la ministre de l'Intérieur britannique sur X.

5 La sécurité renforcée aux abords des mosquées

Face à la multiplication des émeutes, des slogans racistes, anti-musulmans et anti-immigration, la communauté musulmane britannique est en alerte ce week-end. Des rumeurs non étayées désignent l'adolescent auteur de l'attaque comme musulman, érigeant les mosquées comme cibles. "La communauté musulmane est profondément inquiète", a déclaré Zara Mohammed, la secrétaire générale du Muslim Council of Britain (MCB) à l'AFP.

Dans plusieurs villes, la police a annoncé avoir renforcé sa présence aux abords des mosquées, tandis que le Premier ministre britannique a promis une réponse ferme aux actes de "haine d'extrême droite" qui se sont multipliés depuis lundi. A Londres en particulier, la police a précisé avoir "augmenté" ses effectifs "pour rassurer" la population, lors d'une marche pro-palestinienne et d'un rassemblement anti-immigration prévus dans la capitale samedi, qui ont eu lieu sous haute surveillance policière, mais dans le calme.

Ce dispositif sécuritaire n'a toutefois pas suffi à empêcher les tensions : elles ont notamment éclaté à Liverpool, Manchester, Nottingham, Hull ou Belfast, samedi. "Plusieurs policiers ont été blessés alors qu'ils faisaient face à des désordres graves dans le centre-ville de Liverpool", a annoncé sur X la police du Merseyside. Keir Starmer a réagi à ces heurts, martelant qu'il n'y avait "aucune excuse pour la violence"

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