"C'est pour le briser moralement" : les soutiens d'Alexeï Navalny, transféré en Arctique, dénoncent une manœuvre de Vladimir Poutine
Selon eux, pas de doute : le timing a été choisi. À quelques jours du Noël orthodoxe, Alexeï Navalny se trouve loin de tout, à 3 000 kilomètres de Moscou. Comme ses soutiens le craignaient, l'opposant n°1 à Vladimir Poutine a été transféré dans une nouvelle colonie pénitentiaire. Après 19 jours sans nouvelle d'Alexeï Navalny, ses avocats ont réussi à le retrouver.
Jusqu'ici incarcéré dans une région proche de Moscou, Navalny est désormais à Kharp, une colonie pénitentiaire au nord de la Sibérie, au-dessus du cercle arctique, où il purge sa peine de 19 ans d'emprisonnement pour "extrémisme".
"On ne parle pas d'un système pénitentiaire normal"
Ses soutiens y voient une manœuvre politique du Kremlin pour tenter de faire taire l'ennemi n°1 du Kremlin à trois mois des prochaines élections présidentielles, et en pleine période de fêtes. "Alexeï Navalny est envoyé au-delà du cercle polaire et ce n'est pas anodin que ce soit exactement à cette période-là, estime Olga Prokopieva, de l'association Russie-Libertés. C'est pour l'isoler, le briser moralement. Ce sont des conditions de détention très difficiles où il ne peut pas recevoir de lettre, pas de visite de famille. C'est très compliqué pour ses avocats de le voir. En plus, les conditions climatiques de cette région sont très dures, et vont porter un coup supplémentaire sur son moral". En plein hiver, en Arctique, le soleil est visible à peine deux heures par jour.
"Le but des autorités russes, et pas seulement dans le cas d'Alexeï Navalny, mais pour tous les militants anti-Poutine, est de les isoler au maximum, décrypte Evgénia Kara-Murza, épouse d'un autre opposant au Kremlin, Vladimir Kara-Murza, incarcéré en Sibérie, condamné pour "haute trahison" après avoir dénoncé la guerre en Ukraine. Mon mari est tenu à l'isolement complet depuis le mois de septembre en Sibérie dans une cellule qui mesure trois mètres sur deux, des conditions de torture. On ne sait jamais à quoi s'attendre malheureusement parce qu'on ne parle pas d'un système pénitentiaire normal dans un pays démocratique. Ces gens sont persécutés, poursuivis pour s'opposer à la politique de Vladimir Poutine. Le système use de tous les instruments de répression contre eux, qui ont été utilisés pendant les années soviétiques, y compris la torture physique et psychologique. J'ai peur pour la vie de mon mari, tous les jours."
Faire peur aux quelques opposants encore en liberté
Pour Kira Yarmysh, la porte-parole d'Alexeï Navalny, Moscou cherche à faire peur aux quelques opposants encore en liberté et qui n'ont pas fui la Russie à quelques semaines du scrutin. "Alexeï a été sorti de sa prison près de Moscou et transféré à partir du 6 décembre. Le lendemain, nous avons lancé une campagne anti-Poutine, et la date de la présidentielle a été annoncée le même jour", indique-t-elle.
"Cela se voit que le pouvoir veut le cacher, le faire taire."
Kira Yarmysh, la porte-parole d'Alexeï Navalnyà franceinfo
"Navalny est le principal opposant politique de Poutine, même si son nom n'est inscrit sur aucun bulletin de vote", poursuit-elle.
Sa porte-parole assure qu'Alexeï Navalny "va bien" mais s'inquiète pour sa santé. Il a survécu à un empoisonnement il y a trois ans et n'aurait pas vu de médecin depuis.
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