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Quand le Larousse place la Crimée en Russie

Avec la version 2016 de leur Atlas, les éditions Larousse créent l'incident diplomatique. La Crimée n'y est plus ukrainienne. En ayant l'air de valider son annexion par la Russie sans l'aval de l'ONU, elles mettent en colère l'ambassadeur ukrainien. Et se font des ennemis sur les réseaux sociaux, tandis que d'autres applaudissent...
Article rédigé par Miriam Palisson
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Pour la version 2016 de l'Atlas socio-économique des pays du monde des éditions Larousse, la Crimée ne fait pas partie de l'Ukraine.


C'est l'incident éditorialo-diplomatique du début de cette semaine. Comme souvent, c'est Twitter qui l'a fait éclater. Depuis le 10 octobre, les internautes partagent la photo d'une page de l'Atlas socio-économique des pays du monde du prestigieux dictionnaire Larousse. Sur la nouvelle version 2016, la Crimée ne fait pas partie du territoire de l'Ukraine.

On le sait, la Crimée a été annexée par la Russie à la suite du «référendum d'autodétermination» du 16 mars 2014. Mais ce référendum, critiqué par la communauté internationale, n'a jamais été validé par l'ONU. L'Union européenne et les Etats-Unis ont mis en place de nombreuses sanctions à la suite de cette annexion.

«Malgré l'astérisque stipulant que la Crimée a été "rattachée" (même pas "annexée") par la Russie, cette représentation de Larousse (...) légitime la violation flagrante du droit international par la Russie.» C'est en ces termes que l'ambassade ukrainienne 
a fait part de son mécontentement dans une lettre à la maison d'édition. L'ambassadeur ukrainien en France Oleh Shamshur se dit «persuadé que Larousse fera honneur à sa réputation d'éditeur de référence en corrigeant cette erreur honteuse» qui «joue en faveur de la propagande russe»

Sur Twitter, l'ambassade demande une correction :

Qu'en dit le Quai d'Orsay ? Interrogé sur sa réaction «à la décision de l'Atlas du Larousse de placer la Crimée en Russie alors que la France ne reconnaît pas cette annexion», son porte-parole, Romain Nadal, répond ceci : «Comme nos partenaires de l'Union européenne et la quasi-totalité de la communauté internationale, nous ne reconnaissons pas l'annexion illégale de la Crimée et sommes attachés à l'intégrité territoriale de l'Ukraine.»

Accusée sur Twitter de sympathies pro-russes ou même Front national, interrogée par de nombreux médias, la maison Larousse a simplement déclaré à l'AFP «vouloir éviter la polémique»L'erreur était partielle (ou la rédaction partagée?) : la version numérique de son Atlas, elle, n'entérine pas l'annexion. La Crimée y est toujours «une région de l'Ukraine», et le dernier paragraphe précise que «le référendum est déclaré illégal par la communauté internationale».

Larousse est-il le seul grand éditeur de manuels ou de dictionnaires à placer la Crimée en Russie ?
Les Presses universitaires d'Oxford aussi se sont attiré pour le même motif une lettre du représentant de l'Ukraine au Royaume-Uni, qui «regrette profondément que (leur manuel de géographie) induise en erreur les étudiants» et ajoute «croire sincèrement (à) une grave erreur des éditeurs (sans rapport) avec la scandaleuse campagne de propagande menée par la Russie pour justifier ses crimes».


La maison d'édition britannique, dont le manuel de géographie présente la péninsule de Crimée comme «une région de Russie extérieure à son territoire principal», «annexée en 2014», a déclaré n'avoir pas l'intention de revoir la version actuelle. Est-ce un choix éditorial ? En tout cas, l'agence d'information du Kremlin à l'étranger, Sputniknews, range l'Oxford University Press au côté de Larousse parmi ceux pour qui «la Crimée est russe».

Sur Twitter, Sputnik et Russia Today, autre média pro-Kremlin, triomphent : 



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