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Russie: quels effets peuvent avoir les sanctions occidentales?

Les Occidentaux ont pris une série de sanctions, notamment financières, contre la Russie en raison du rôle joué par Moscou en Ukraine. Au Kremlin, on rétorque que ces sanctions n’auront aucun effet. Mais en même temps, le président Vladimir Poutine a annoncé des mesures de riposte. Et son gouvernement admet qu’il va falloir exercer un tour de vis budgétaire en raison de ces sanctions...
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Le président russe, Vladimir Poutine, préside une réunion du gouvernement à la résidence d'Etat de Novo-Ogaryovo près de Moscou le 30 juillet 2014. (Reuters - Alexei Nikolskyi - RIA Novosti - Kremlin)
Il est naïf de penser qu’avec de telles méthodes, on nous fera peur ou on nous forcera à reculer», a affirmé le 4 août 2014, dans un entretien à l’agence Itar-Tass, l’oligarque Guennadi Timtchenko, proche du président russe. Un proche lui-même placé sur une liste noire par les Etats-Unis en mars. Selon lui, les Occidentaux se sont trompés en espérant ainsi faire pression sur le Kremlin et modifier sa politique en Ukraine.

On peut toutefois se demander s’il ne s’agit pas d’une fanfaronnade de la part du pouvoir russe… Car s’il parle des «prétendues sanctions», Vladimir Poutine a ordonné le 6 août «d'interdire ou de limiter pendant un an les importations sur le territoire russe de certains types de produits agricoles, de matières premières et de denrées alimentaires» en provenance de pays qui ont «décidé la mise en place de sanctions économiques» contre la Russie.

Moscou a également évoqué la possibilité que les compagnies occidentales n’aient plus l’autorisation de survoler la Sibérie pour rejoindre l’Asie. Une mesure qui augmenterait la durée et le coût des vols. «Ce qui reviendrait sur un accord pourtant signé dans les années 1970, durant la Guerre froide», commente Les Echos.

Effets «collatéraux et diffus» mais concrets
En attendant, les mesures prises par les Etats-Unis et l’UE (visant la finance, la défense, le pétrole et les technologies sensibles, à commencer par l'interdiction faites aux principales banques d'Etat russes d'accéder aux marchés financiers occidentaux) semblent avoir déjà eu des effets «collatéraux et diffus», selon Le Monde. Mais très concrets. Entre autre effets, le rouble a ainsi baissé de 7 % face au dollar depuis janvier ce qui «met à terre les sociétés tenues d’acheter des prestations étrangères». En trois semaines, cinq tour-opérateurs russes ont ainsi fait faillite et des milliers de touristes se sont retrouvés bloqués sur leurs lieux de vacances.

Sur un chantier naval de Vladivostok (Sibérie) le 8 mai 2014. (AFP - Ria Novosti - Vitaliy Ankov)

«Au-delà du tourisme, des pans entiers de l'économie russe sont affectés par un climat politique aussi délétère qu'imprévisible. Les investissements se bloquent. Les capitaux fuient : au premier trimestre, 48,8 milliards de dollars (36,5 milliards d'euros) ont quitté la Russie», poursuit le quotidien français. 
 
Il s’agit donc là d’«effets diffus», imprévisibles. Mais potentiellement ravageurs pour Moscou. C’est sans doute d’ailleurs ce que cherchent les Occidentaux…
 
Dans ce contexte, «coincée par une inflation galopante, la Banque centrale (russe, NDLR) a dû renchérir le coût du crédit», précise Le Monde. Avec toutes les conséquences en chaîne sur l’économie en général, les entreprises et les simples citoyens en particulier. A tel point que selon l’AFP, certains experts estiment que les sanctions pourraient provoquer une récession de l’économie russe en 2015.
 
Hausse des impôts… et du nationalisme ?
On n’en est peut-être pas encore là. Pour autant, le Monde croit pouvoir noter que Vladimir Poutine est «de plus en plus nerveux». Le Kremlin est d’ailleurs lui-même obligé de reconnaître une détérioration de la situation. Le budget pour la période 2015-2017 devra «refléter la situation actuelle de l'économie russe, ce qui inclut les conséquences négatives des sanctions mises en place envers la Russie» a ainsi déclaré le 5 août le Premier ministre Dmitri Medvedev. Dans ce contexte, il sera nécessaire d’augmenter les revenus de l’Etat. «Ce qui inclut les options les plus variées, y compris une hausse des impôts», a ajouté le dirigeant. L’instauration d’une telle mesure ne contribuerait pas forcément à la popularité du président russe…

Reste à savoir si les sanctions occidentales auront des conséquences politiques. En clair si elles inciteront Vladimir Poutine et son pouvoir à assouplir leurs positions sur l’Ukraine. Rien n’est moins sûr, estime l’écrivain russe d’origine ukrainienne Vladimir Féderovsky, ancien de l’équipe Gorbatchev, interviewé par Le Figaro. «Plus l'Occident punit la Russie, plus le nationalisme russe en sort renforcé», estime-t-il.

«Oui, l'économie russe va souffrir, peut-être perdre 4% de croissance. (…) Mais ce que les Occidentaux ne comprennent pas, c'est que les Russes ont l'habitude de souffrir. C'est un peuple triplement martyr: par les communistes (25 millions de morts), dans la guerre contre le nazisme (25 millions de morts) et la bêtise russo-occidentale de 1991-92 (1800% d'inflation, une économie démantelée)», ajoute-t-il. Autrement dit, Moscou pourrait être enclin au jusqu’au-boutisme et à la confrontation. Tout en se rapprochant de la Chine.
 
Des soldats russes marchant sur la place Rouge à Moscou à l'occasion de l'anniversaire de la fin de la Seconde guerre mondiale. (AFP - Kirill Kudryavtsev)

Signe avant-coureur ? Selon l’OTAN, le nombre de militaires russes le long de la frontière avec l'Ukraine est passé de 12.000 à la mi-juillet à 20.000. Ce qui créé une «situation dangereuse», a affirmé mercredi une porte-parole de l’organisation militaire. Celle-ci craint que Moscou utilise «le prétexte d'une mission humanitaire ou de maintien de la paix pour envoyer des soldats dans l'est de l'Ukraine». «Les informations que je reçois (…) nous permettent d'estimer que la menace d'une intervention directe russe est certainement plus importante qu'il y a encore quelques jours», a rapporté, également le 6 août, le Premier ministre polonais, Donald Tusk, dont le pays possède une longue frontière avec la Russie.
 
Pour autant, les généraux russes auraient des «états d’âme», si l’on en croit des informations provenant du Pentagone et cité par le Canard. Selon des experts du ministère américain de la Défense «plus ou moins nourris de rapports barbouzards, ces hauts gradés ne partagent pas totalement les ambitions géopolitiques de leur estimé président» et seraient «assez réservés au sujet de (son) attitude un tantinet agressive à l’égard des pays de l’OTAN». Reste à savoir quel crédit accorder à de telles informations... 

Sanctions russes: quelles conséquences en France

BFMTV, le 6-8-2014

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