: Reportage "Nous avons été l'étincelle de la révolution" : en Syrie, Deraa se souvient des premiers soulèvements contre le régime al-Assad
Tout a commencé par un graffiti en 2011. "C'est sur les murs de cette école qu'on a tagué : 'Ton tour arrive, Docteur.'" Le docteur en question était Bachar Al-Assad, ophtalmologue de formation. C’est Mouawya, qui avait alors 17 ans, qui raconte. Il fait partie d'une vingtaine d'adolescents raflés plusieurs jours plus tard par la police syrienne.
"Nous avons passé 45 jours dans plusieurs prisons. Nous avons subi des tortures inimaginables, à coups de décharges électriques et bien d'autres sévices. Il voulait savoir qui nous avait poussé à faire ça, mais j'ai dénoncé personne", poursuit Mouawya. En sortant de captivité, ils découvrent les premières manifestations déclenchées par leurs arrestations. "Nous avons été l'étincelle de la révolution syrienne", se réjouit le jeune homme.
Les prisons se remplissent alors de manifestants anti-régime. Ahmad, aujourd'hui 35 ans, a passé un mois et dix jours dans les geôles de l'ancien régime. "Ils me disaient : "Ah, tu veux la liberté ? Et ils me frappaient avec des bâtons et plein d'autres choses".
"Quand il me tapait, il me demandait si j'aimais Bachar et je répondais : 'Non, je ne l'aime pas', et les tortures redoublaient d'intensité jusqu'à ce que je perde connaissance."
Ahmad, un habitant de Deraaà franceinfo
Mais la police tire sur la foule. Bilan : deux morts, les deux premiers du soulèvement. Mohamed est le frère de Hossam Ayach, l'une des deux victimes. "Son sang n'a pas coulé pour rien, déclare-t-il. Il réclamait la liberté pour tous et il a été le premier des 500 000 morts de la guerre en Syrie".
Car la population va prendre les armes pour se défendre. C'est le début de la guerre civile. Dans les mois qui suivent, Deraa va payer un très lourd tribut : la ville sera en grande partie rasée, avant des années de gel du conflit et, le 8 décembre dernier, la chute du régime de Bachar al-Assad.
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